[DOSSIER] La Nouvelle-Calédonie plus ambitieuse que le reste du monde ?
Le gouvernement défend une « décarbonation » énergétique du territoire d’ici 2030, en développant les énergies renouvelables dans l’industrie métallurgiste très polluante.
L’ absence de la Nouvelle-Calédonie à la conférence égyptienne ne traduit pas son manque d’intérêt pour la question environnementale.
Le Schéma de transition énergétique du territoire (Stenc) doit repasser à la fin de l’année devant les élus du Congrès, après une motion préjudicielle le renvoyant devant la commission en novembre. « Il doit être adopté prochainement. Les auteurs de la motion préjudicielle ne sont pas contre le Schéma, ils veulent des informations complémentaires. Une commission, le 12 décembre, donnera les éléments nécessaires pour le faire adopter à l’unanimité », soutient Christopher Gygès.
3,7 milliards de l’Union européenne
Une nouvelle aide européenne a été accordée à la Nouvelle-Calédonie, en clôture du Forum de l’Union européenne avec les pays et territoires d’outre-mer (PTOM). 3,7 milliards de francs seront reversés pour le financement du Schéma de transition énergétique.
Le membre du gouvernement en charge de la transition énergétique et des énergies renouvelables, qui n’a pas pu voyager en Égypte pour des raisons de calendrier, partage les déceptions à la sortie de cette COP27. « La COP manquait un peu d’ambition, insiste-t-il. Sans être prétentieux, je pense que nous sommes plus ambitieux en Nouvelle-Calédonie. »
L’exécutif local mise sur les énergies renouvelables pour s’émanciper des combustibles fossiles dans huit ans. 96,9 % de l’énergie consommée en Nouvelle-Calédonie est d’origine fossile.
FERMER LES CENTRALES
Aujourd’hui, 47 centrales productrices d’énergie renouvelable maillent le territoire, contre 14 installations thermiques. En 2020, 15,6 % de la production électrique calédonienne était verte.
D’autres fermes photovoltaïques sont en projet. En 2024, le solaire, l’hydraulique et l’éolien devraient couvrir la totalité de la consommation domestique et tertiaire, c’est-à-dire les besoins des habitants et des entreprises hors nickel en journée. Le plan du gouvernement prévoit la fermeture de toutes les centrales au fioul et au charbon d’ici 2035. « C’est la totalité des énergies fossiles que nous allons transformer, insiste Christopher Gygès. Ce qui correspondra à une réduction de 70 % de nos gaz à effet de serre. »
+ 1,3°C
Entre 1970 et 2020, Météo-France Nouvelle-Calédonie a enregistré une augmentation de la température de 1,3°C.
Pour contourner la délicate question du stockage des énergies renouvelables, le gouvernement compte investir dans deux stations de transfert d’énergie par pompage. Ce système de bassins de rétention d’eau permettrait d’alimenter en continu le réseau électrique. Deux unités sont capables d’emmagasiner 300 mégawatts pour un prix de construction de 70 milliards de francs, selon l’AFP.
ENGAGER LE NICKEL
Mais pour réussir, la mise à jour de la politique énergétique doit surtout s’appliquer à l’industrie métallurgiste qui consomme 75 à 80 % de l’électricité. En 2030, l’objectif est de satisfaire 70 % des besoins du territoire avec des énergies vertes, en convertissant en partie le secteur porté par les trois usines.
Les industriels devront intégrer, au minimum, 50 % d’énergies renouvelables. « Ce n’est pas que de la communication, parce que nous avons signé un accord-cadre avec deux métallurgistes (SLN et Prony Resources en juin, ndlr). Le troisième va rentrer dans le dispositif prochainement. »
5 millions de tonnes de CO2
En 2020, la Nouvelle-Calédonie a émis 5 millions de tonnes de CO2 selon la Dimenc. C’est 8,6 % de moins qu’en 2019. L’industrie, principalement minière et métallurgiste, est responsable de 76 % de ces émissions. 12 % provient du transport, majoritairement routier.
Un deuxième volet du Stenc se concentre sur la mobilité, qui émet 12 % des gaz à effet de serre selon la Direction de l’industrie, des mines et de l’énergie de Nouvelle-Calédonie (Dimenc). Le gouvernement invite notamment les entreprises du nickel à renouveler leur parc automobile, avec des camions à hydrogène par exemple. Il vise, à l’horizon 2030, 18 500 véhicules électriques en circulation dans toute la Nouvelle-Calédonie avec le déploiement massif de bornes de recharge et des dispositifs incitatifs.
Cela devra représenter 50 % des nouvelles ventes. 62 bornes sont aujourd’hui en service et les voitures électriques ne représentent qu’1 % des ventes. L’accent est aussi mis sur la performance et la rénovation énergique des bâtiments pour espérer atteindre à la prochaine décennie une île moins polluante.
Brice Bacquet
Photo : « Nous avons développé un parc d’énergies renouvelables unique au niveau du Pacifique, et même au niveau national et européen », estime Christopher Gygès, membre du gouvernement en charge de la transition énergétique. / Archive DNC