[DOSSIER] Catastrophes naturelles : à quoi doit-on faire face ?

vue aÈrienne, prise le 28 dÈcembre 2005, de la zone de Nouvelle CalÈdonie touchÈe par l'incendie qui sÈvit depuis le 23 dÈcembre. Le feu, qui a dÈj‡ ravagÈ plus de 3.000 hectares, s'approche de zones de rÈserves tels que les Mont Koghis, la RiviËre Blanche ou la Montagne des Sources sur les communes de DumbÈa et du Mont-Dore, dans la banlieue de NoumÈa. AFP PHOTO JACQUOTTE SAMPEREZ (Photo by JACQUOTTE SAMPEREZ / AFP)

En 50 ans, la température a augmenté de 1,3 degré. Dans ce même laps de temps, le niveau de la mer a grimpé de 5 à 6 cm. « Les données montrent que la Nouvelle-Calédonie se réchauffe et plus vite que la moyenne mondiale à 0,8°C », indique Alexandre Peltier, météorologue de Météo France Nouvelle-Calédonie. Ces évolutions auront des conséquences sur les catastrophes naturelles qui nous touchent déjà ou nous menacent de près.

  • Les feux

Les feux de brousse surviennent à chaque temps sec et venteux. La hausse des températures n’arrangera rien. Surtout combinée à un phénomène El Niño, marqué par un temps très sec. « Avec les changements climatiques, la saisonnalité change. On a des feux en juillet, en août et en décembre« , explique Alexandre Rossignol, capitaine de la Direction de la sécurité civile et de la gestion des risques (DSCGR) en charge de la communication.

Contre les feux, 24 casernes de pompiers maillent le territoire. La saison administrative des feux a été remplacée par une astreinte des hélicoptères bombardiers d’eau. Pendant quatre mois renouvelables, ils sont mobilisables depuis Koné ou Nouméa en 30 minutes.

En dehors de cette astreinte, l’appareil peut décoller toute l’année, mais dans le délai de l’opérateur privé Hélicocéan. « Les moyens sont illimités, assure Alexandre Rossignol. Si cela ne suffit pas, on peut demander concours à l’État, aux forces militaires. Si on n’y arrive toujours pas, on a la Métropole, l’Australie, la Nouvelle-Zélande… Tant qu’on ne sera pas arrivé au bout du feu, on montera en puissance. »

L’incendie de La Coulée en 2005 a particulièrement marqué les esprits. 15 700 ha étaient partis en fumée. Des pompiers, des volontaires, des professionnels de Métropole et d’Australie s’étaient relayés pendant plusieurs jours pour venir à bout du « plus gros feu de la décennie ».

  • Les tsunamis

Aucune prévision, aucune saison, aucune règle. Les tsunamis n’obéissent qu’à une seule loi : l’imprévisibilité. « Pour les séismes et les tsunamis, l’alerte à la population est un véritable challenge pour la Sécurité civile », reconnaît le capitaine de la DSCGR. En 2023, le dispositif métropolitain FR-Alert va être déployé. Toutes les personnes détentrices d’un téléphone présentes dans une zone de danger seront prévenues par SMS. L’outil sera couplé aux 72 sirènes réparties sur le territoire pour inciter les habitants à gagner les hauteurs.

De par sa position dans le Pacifique, la Nouvelle-Calédonie est exposée à cet aléa climatique. La côte Est et les Loyauté sont les plus menacées par leur proximité directe avec la faille du Vanuatu. Le tsunami est une masse d’eau, propulsée par un séisme sous-marin ou une éruption volcanique, qui inonde la côte. La montée des eaux aura forcément des conséquences.

Le programme Tsucal, mené par l’IRD et financé par le gouvernement, vise à mieux connaître les potentiels scénarios. Les chercheurs ont simulé plusieurs séismes pour envisager toutes les répercussions. En 2021, un petit tsunami était survenu, le même week-end qu’un cyclone et l’annonce du confinement. En 1875, un tsunami meurtrier avait emporté des dizaines de personnes à Lifou.

  • Les cyclones

Les cyclones se répètent, mais ne se ressemblent pas à chaque saison cyclonique, de novembre à mai. Un système de niveaux d’alerte est en place. « On l’améliore en permanence par rapport aux remontées du terrain », précise Alexandre Rossignol.

Rien ne prouve pour l’instant que le changement climatique accentue ou aggrave les cyclones dans le Pacifique Sud. « Les séries de données ne sont pas suffisantes pour en tirer des conclusions, détaille Alexandre Peltier, responsable de la division climatologie à Météo France Nouvelle-Calédonie. Une étude récente a montré que le nombre de cyclones très intenses avait augmenté, mais ce n’est qu’une seule étude. » Météo France Nouvelle-Calédonie a cependant constaté une augmentation des cyclones pluvieux.

Dans un futur plus chaud, les dépressions tropicales ressembleront-elles aux trombes d’eau de Lucas ou au meurtrier Erica ? Le cyclone de catégorie 4 avait balayé le territoire en mars 2003, causant des dégâts considérables. Trois personnes avaient perdu la vie, des centaines étaient blessées et des milliers se sont retrouvées sinistrées.

  • Les inondations

Une cartographie précise délimite les zones inondables (La Coulée, Boulouparis, Bourail, La Foa, etc.) « Ces zones sont repérées avec des échelles de crue et des panneaux », précise  Alexandre Rossignol. L’enjeu, dans ces catastrophes-là, demeure l’information. « La plupart des gens se mettent en difficulté, parce qu’ils bravent les interdits. »

La radio, les réseaux sociaux et les écrans dynamiques des villes sont mobilisés. La Sécurité civile travaille sur une application pour indiquer en temps réel la situation routière au cours d’évènements météorologiques dangereux. « On veut surtout éviter les réfugiés de la route, explique le capitaine. Cette application responsabilise les citoyens qui analyse s’il y a un risque de prendre la voiture. »

La Niña a explosé les records de précipitation en 2021 et 2022. Les années à venir n’arrangeront pas les choses. En contrepartie des phénomènes El Niño plus secs, les experts s’attendent à des épisodes La Niña toujours plus humides.

  • Les imprévus
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« Chaque évènement est analysé pour s’adapter, assure Alexandre Rossignol. La culture du risque est dans notre ADN. » Récemment, l’éruption volcanique aux Tonga a poussé la DSCGR à intégrer les explosions sous-marines et volcaniques dans son système d’alerte.

Mais dans la futur, les épisodes de fortes chaleurs, plus fréquents, pourraient avoir des conséquences sanitaires. « On parle de phénomène de longue durée, sur deux à cinq jours avec des chaleurs qui persistent la nuit. Cela peut avoir des effets sur une population vieillissante et touchée par des facteurs de comorbidité importants », détaille Alexandre Peltier.

Le projet CLIPSSA, mené par l’IRD et Météo France, cherche à déterminer les aléas climatiques de 2050 ou 2100. Des simulations très précises vont être réalisées pour connaître l’évolution de précipitations, des chaleurs ou des cyclones. Un autre volet du programme doit rassembler les pratiques et les savoirs locaux face aux risques. « Les aléas climatiques vont changer », prévient le météorologue. Et il faut s’y préparer

Brice Bacquet

Photo : Fin 2005, un feu gigantesque avait réduit en cendres des milliers d’hectares à La Coulée, nécessitant l’intervention de bénévoles, de secours de Métropole et de renforts d’Australie. / Marc Le Chelard, AFP

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