Tendre la main à la paix

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C’est par un geste ordinaire qu’ils ont accompli quelque chose d’extraordinaire. En se serrant la main, Jacques Lafleur et Jean-Marie Tjibaou ont mis fin à une guerre civile qui a coûté la vie à près de 90 personnes.

Les deux leaders politiques que tout opposait se sont assis côte à côte pour trouver une autre solution que la violence. Sous l’égide de Michel Rocard, Premier ministre de l’époque, les accords de Matignon que cette poignée de main acte symboliquement ont permis de rétablir le dialogue entre deux Calédonie qui s’affrontaient, entre les indépendantistes et les partisans du maintien dans la République.

La statue en bronze, érigée l’an dernier au cœur de la ville de Nouméa, est là pour rappeler ce 26 juin 1988. Elle trône au milieu d’une place symboliquement renommée Koo Wè Joka (place de la Paix en langue nââ numèè). L’esprit de réconciliation qu’elle incarne a ouvert une voie poursuivie par l’Accord de Nouméa et les discussions actuelles. La poignée de main est l’un des moments-clés de l’histoire contemporaine calédonienne. Si ce n’est le plus important. Le territoire est toujours en quête du consensus qu’elle a initié.

Avons-nous donc besoin d’une nouvelle poignée de main pour avancer ? Ou d’un symbole similaire ? Bien sûr, le contexte n’est pas le même. Les querelles sanglantes ne divisent plus les tribus et les villages. Mais imaginons. Donnons libre cours à la fiction… Qui pourrait aujourd’hui se serrer la main ? Qui rassemblerait, des deux côtés, les positions divergentes ? Quel sens devrions-nous lui donner ? Et finalement, est-ce réellement utile 35 ans après Jacques Lafleur et Jean-Marie Tjibaou ?

Brice Bacquet

Dans notre dossier

« Sans rien abandonner, ils ont su donner et pardonner »
Impossible d’imaginer les discussions institutionnelles d’aujourd’hui sans le geste historique de Jean-Marie Tjibaou et Jacques Lafleur. Leur poignée de main, née du sang et des larmes, acte aussi deux accords importants pour la suite. →

Un « pas de côté », une « voie à suivre »
Les descendants de Jean-Marie Tjibaou et Jacques Lafleur regardent avec beaucoup de respect le geste symbolique de leurs aïeuls, « deux hommes aux qualités hors normes ». L’esprit de dialogue qui les a guidés est, selon eux, toujours nécessaire aujourd’hui. →

Les regards tournés vers la jeunesse
Il y a quelques mois, les lycéens de Michel-Rocard dévoilaient leur fresque en l’honneur de ce geste fondateur. Un devoir de mémoire. Une façon de s’approprier ce symbole parfois malmené par les politiques. Le temps est venu de laisser la place à la nouvelle génération, selon Élie Poigoune, ancien président de la Ligue des droits de l’Homme. →

Un héritage qui pèse sur leurs épaules
Une nouvelle poignée de main pour relancer les discussions ? La première semble indépassable pour les représentants politiques indépendantistes ou non-indépendantistes et l’État. Elle appartient au passé, alors que tout reste à faire. →