Des microalgues tout aussi prometteuses

Une cinquantaine de souches prometteuses ont été retenues. / © E.B.

Les grandes algues ne sont pas les seules à susciter l’intérêt. Depuis dix ans, le programme Amical (Aquaculture de microalgues en Nouvelle-Calédonie) étudie la faisabilité de production de microalgues locales. Et les premiers résultats sont encourageants.

Des fioles allant du vert foncé au marron clair sont mises à l’écart dans une salle du laboratoire. Impossible à l’œil d’identifier exactement quelles substances elles contiennent. Normal, il s’agit de microalgues. Une toute petite taille qui ne définit pas l’importance de ces organismes et leur potentiel. Ont-elles leurs chances, elles aussi, dans l’alimentation, la cosmétique ou la pharmacie ?

Pour répondre à ces interrogations, le Centre technologique des microalgues, associant l’Adecal-Technopole et l’Ifremer, étudie depuis 2011 la faisabilité du développement d’une filière de production. Les scientifiques travaillent entre le laboratoire de recherche appliquée (le LEMA) à Nouméa et le laboratoire de production pilote (le LTMA) à Koné. Créer une souchothèque de microalgues locales était leur première mission.

À Koné, la culture de microalgues est expérimentée dans plusieurs bassins. / © LEMA

UNE CINQUANTAINE D’ESPÈCES

Pour constituer cette collection, ils sont allés « bioprospecter » le long des côtes. « On a sélectionné des zones essentiellement côtières dans le lagon et des zones soit impactées par la mine, soit avec des variations importantes de salinité ou de température », explique Noémie Coulombier, ingénieure en biotechnologie à l’Adecal-Technologie sur le programme Amical.

Les chercheurs devaient regarder si ces souches, adaptées à des conditions particulières, avaient développé des caractéristiques intéressantes. Il fallait qu’elles soient suffisamment robustes afin de résister à des variations (comme des fortes pluies) une fois mises en bassin. « On les a sélectionnées selon leur vitesse de croissance. Notre objectif était d’avoir des espèces qui soient capables de faire de la biomasse donc qui poussent vite. » Leur souchothèque est aujourd’hui riche d’une cinquantaine d’espèces.

DES PARTENARIATS DÉJÀ SCELLÉS

Avec ce trésor multicolore, les scienti- fiques doivent désormais participer à la création d’une filière de production de microalgues. « C’est ce qui nous occupe actuellement, notamment par la recherche de voies de valorisation », indique Noémie Coulombier.

Les chercheurs ont déjà noué des partenariats dans plusieurs secteurs d’activité en Métropole. « Notamment en cosmétique, en alimentation humaine et en nutraceutique avec, par exemple, la société Valbiotis. » L’Institut Pasteur de Nouvelle- Calédonie s’est aussi montré intéressé. « Ce sont des recherches pour trouver de nouvelles molécules antibiotiques et anti-inflammatoires », précise Loïc Le Déan (Ifre- mer), chercheur du LEMA.

Le saviez-vous ?

Les microalgues représentent 50 % de la production d’oxygène sur terre.

Il y aurait entre 200 000 et un million d’espèces différentes. « Une dizaine d’espèces sont exploitées commercialement », informe Noémie Coulombier.

Les microalgues n’ont pas que des bienfaits. Il en existe des toxiques. La gratte est par exemple causée par une microalgue toxique.

 

Dans le cadre de ces collaborations, le laboratoire teste l’intérêt de certaines espèces. Par exemple, en cosmétique, leurs propriétés anti-âge, anti-oxydante ou anti-UV. « Les résultats sont très encourageants », assure Loïc Le Déan. Ils sont aussi en discussion avec les métallurgistes pour récupérer le CO2 qu’ils rejettent dans l’atmosphère. C’est avec ce dioxyde de carbone que poussent les microalgues. « Ce serait une petite forme de remédiation », souligne le chercheur.

Pour l’instant, le programme est encore au stade de la recherche appliquée avec des sociétés privées. Mais si ces bons résultats se confirment, un développement plus conséquent pourrait être envisagé. Et une nouvelle filière aquacole pourrait voir le jour.

Edwige Blanchon

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