Rugby : de très bons potentiels chez les filles

Christina Bearune et Arwen Lavuia, intègrent la sélection Outre-mer pour la compétition de l’Amicale des 6 Nations (moins de 18 ans).© Chloé Maingourd

Longtemps réservé aux hommes, le rugby se joue au féminin. Le World Rugby, la Fédération française comme la ligue calédonienne mettent le paquet pour recruter des joueuses. Le vivier s’étoffe de bons espoirs, dans les pas de Yolaine Yengo.

Sur la pelouse du Stade de Rivière Salée, vendredi 29 septembre, Arwen Lavuia (RC Mont-Dore) et Christina Bearune (Noresa Maré), 16 et 15 ans, s’entraînent avec la sélection calédonienne. Une très bonne nouvelle est tombée la semaine dernière. Avec Loane Gope (Olympique Nouméa), ces pensionnaires du pôle espoirs ont été retenues par la Direction technique nationale de la FFR pour intégrer la sélection ultramarine des moins de 18 ans qui disputera les finales nationales de l’Amicale des 6 Nations en rugby à 10, prévues fin octobre en Métropole.

La tête bien faite, elles sont déjà concentrées sur cette échéance. Arwen, issue d’une famille de joueurs, a commencé ce sport à 10 ans. C’est toute sa vie. Elle évolue au pôle espoirs depuis un an et demi, tantôt comme « demie de mêlée, centre ou talonneuse ». Elle aime « le contact, la lecture du jeu ». Christina l’a découvert en 6e en UNSS puis au club de Maré, avant d’intégrer le pôle cette année. L’ailière nous parle « plaquages et crochets ».

Sans remettre en cause une seule seconde leurs qualités  ‒ « il faut bien s’accrocher parce que c’est physique, très mental et pas facile » ‒ les bonnes joueuses ont « davantage de chances d’être repérées étant moins nombreuses que les garçons », concède Arwen.

« RAPIDES ET ADROITES »

Le mois dernier, Anaïck Konyi, l’une des sept filles du pôle, a rejoint le Stade Rochelais, Madison Terrat a intégré le pôle espoirs de Lyon. Yolaine Yengo fait partie du XV de France. « Il y a vraiment des potentiels sur le territoire, observe Malio Lagikula, président de la commission féminine à la Ligue. Surtout sur les lignes arrière. On a des joueuses très rapides, très adroites et quelques avants ».

L’ancien ailier à abattre du RCC, ex-membre de la sélection calédonienne, arbitre, à la Ligue depuis 2016, plus de 23 ans de rugby à son actif, a troqué le management des U16 garçons pour le rugby féminin en mars 2023. Un secteur « au plus mal depuis deux ans » avec une quinzaine de licenciées seulement, éparpillées et délaissées.

Il s’est donné pour objectif de faire revivre la discipline, de licencier un maximum de recrues. Pour ce faire, Malio Lagikula organise un premier regroupement d’une trentaine de joueuses au mois d’avril puis un tournoi Touch (sans plaquage) au Mont-Dore.

Les filles sont invitées à se licencier pour jouer aux vraies règles. On leur dit que ce n’est « pas qu’un sport de garçon » et qu’il y a « tous les gabarits ». De cette façon, « nous sommes montés à 76 licenciées », se réjouit le président, de quoi organiser un championnat senior à 7 au mois de juin par bassin, puis à 10 au mois d’octobre à Dumbéa.

Malio Lagikula a une belle carrière dans ce sport. Il a décidé de mettre toute son expérience et sa motivation pour le développement du rugby féminin.© C.M.

VALEURS

Au même moment, les planètes s’alignent. La Fédération française donne une ligne de conduite, un projet sportif (POS) sur trois ans, qui va dans le même sens avec des subventions pour organiser ces tournois de filles. Le développement d’un championnat doit permettre d’avoir une représentation aux prochains Oceania et aux Jeux du Pacifique de 2027.

Signal positif, au mois d’août, la sélection calédonienne a accédé à la finale du tournoi de Wallis face à Fidji. En parallèle, la ligue travaille sur les bases. « On rencontre les chefs d’établissements pour pousser au développement de ce sport », explique Malio Lagikula, qui rappelle que Anaïk Konyi a commencé au collège de Kaméré. Un projet est en cours de construction avec le vice-rectorat.

Le président invite les filles à rejoindre l’ovalie : « Venez au rugby, ce sport permet de se découvrir, apprend le respect, la solidarité, peut aider les jeunes à trouver leur place ». Arwen et Christina ne diront pas le contraire. « Ça m’a permis de me faire beau- coup d’amis et de prendre confiance en moi », livre Arwen, quand Christina explique que le rugby l’a quelque part délivrée. « Avant, j’étais très timide, maintenant j’ose parler. »

Ces filles rêvent en grand. Elles se voient professionnelles, en équipe de France. Arwen est inspirée par son cousin Matthieu Uhila (RC Vannes) et le néo-zélandais Caleb Clarke. Christina, elle, a un exemple féminin bien de chez elle. « Yolaine Yengo. C’est mon idole ». À leur tour maintenant d’inspirer.

Chloé Maingourd

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