Fantine Lesaffre, championne de natation : « Je suis fière de ma carrière »

© Gilles Caprais

Invitée d’honneur du Meeting Mobil organisé samedi 27 avril par le Cercle des nageurs calédoniens, soutenu par le groupe Sofical propriétaire du journal, Fantine Lesaffre, championne d’Europe 2018 du 400 mètres 4 nages, transmettra aux jeunes athlètes son expérience du haut niveau.

DNC : Qu’attendez-vous des rencontres que vous ferez en Nouvelle-Calédonie ?

Fantine Lesaffre : Tout d’abord, ce sera un plaisir de remettre la combinaison pour le meeting. Et puis comme je reste deux semaines, je vais pouvoir nager avec les jeunes, avec les masters et échanger avec tout le monde. Je vais profiter de leur enthousiasme et ils vont profiter de mon expérience de nageuse de haut niveau. Les aspects techniques ne sont pas la priorité : il y a déjà beaucoup de compétence en Nouvelle-Calédonie. Je pense plutôt apporter une expérience de la gestion du stress, de l’avant-course, de la récupération…

Lorsque vous avez annoncé votre retraite sportive, en octobre 2023, vous aviez parlé d’un « soulagement ». Quelques mois plus tard, ce sentiment est-il renforcé ?

Oui, c’était la bonne décision. J’ai arrêté parce que je savais que j’étais attirée par d’autres choses. Je n’étais pas focalisée à 100 % sur la natation. Mon esprit vadrouillait ailleurs alors que c’est un sport ultra-dur, qui demande une implication totale et énormément de sacrifices. Je ne voulais pas faire les choses à moitié. Prendre la décision d’arrêter n’a été ni facile ni difficile. Ça s’est présenté à moi tout naturellement, je ne regrette pas, et j’ai d’autant plus de plaisir à remettre la combinaison de temps en temps.

Vous n’êtes pas la première nageuse à évoquer un burn out. Avez-vous le sentiment qu’une vague de libération de la parole est en cours ?

Ces dernières années, des Américains, des Australiens, des Hongrois ont pris la parole. Il y avait eu Michael Phelps, quelques années auparavant. Ça fait plaisir, ça aide.On est vus comme des super-héros, donc c’est bien de montrer à tout le monde qu’on reste des êtres humains. Personne ne se rend compte du temps qu’on passe dans les bassins, en salle de musculation, à courir. C’est aussi vrai en escrime, en gymnastique, en athlétisme… Les gens qui nous regardent depuis leur canapé peuvent se dire qu’être payé pour faire du sport, c’est cool. Mais ce n’est pas rose tous les jours. Il y a énormément de sacrifices à faire, que ce soit au niveau de l’hygiène de vie ou de la famille.

Pour ma part, j’ai déménagé très loin de ma famille [notamment aux États-Unis en 2021, NDLR]. Elle reste importante dans les moments difficiles. Et quand j’étais en difficulté, j’étais loin de mes proches.

Faut-il une révolution dans les méthodes d’entraînement ?

Le mot “révolution” est un peu fort. Dans la natation, on a une vision du travail qui est assez vieille, qui a marché pendant très longtemps, et qui demande aujourd’hui quelques ajustements. Je pense qu’à certains endroits, ça commence à faire parler, à changer. Maintenant, il faut voir combien de temps prendront ces changements.

4’34 sur 400 mètres 4 nages, votre record établi en 2018, était le niveau requis pour une médaille de bronze aux Jeux de Tokyo. Vous arrive-t-il de vous dire que les JO ne sont pas tombés la bonne année ?

[Long silence] Oui… C’est sûr que si les Jeux avaient eu lieu comme prévu en 2020, ça se serait certainement passé différemment. Mais bon, on ne peut pas savoir. La dépression dans laquelle je suis tombée en 2021, je pense que je n’aurais pas pu l’éviter encore longtemps. C’est arrivé au moment où ça devait arriver. Ça ne sert à rien de se poser la question. On n’aura jamais la réponse. Aujourd’hui, je n’ai aucun regret. On ne me retirera jamais mes médailles nationales, internationales, mes 10 ans d’équipe de France. Je suis fière de ce que j’ai accompli, de l’exemple que j’ai pu donner aux plus jeunes. Je me sens déjà privilégiée, je ne vois pas l’intérêt de regretter des choses qu’on ne connaît pas. Je suis fière de ma carrière ‒ et ce n’était pas le cas il y a quelques années ‒ et je suis fière de la façon dont je l’ai arrêtée.

Propos recueillis par Gilles Caprais


400 concurrents attendus au Meeting Mobil, samedi

La 31e édition de la compétition, samedi 27 avril au Cercle des nageurs calédoniens (CNC), verra s’affronter près de 400 nageurs et nageuses, dans huit catégories d’âge, de U9 à Open. Ouverture des portes à 7 h 30, début de la compétition à 8 h 30, demi-finales à 14 h 30 et finales à 16 h 30. L’an passé, sous les yeux du champion du monde Jérémy Stravius, Alexandre Gané et Marine Erout s’étaient imposés.