Semaine de quatre jours, ces pays qui l’ont essayée et adoptée

Islande, Royaume-Uni, Espagne, Belgique… Depuis quelques années, des entreprises se portent volontaires pour tester la semaine de quatre jours. Pour la majorité d’entre elles, les résultats s’avèrent très positifs. Tour d’horizon des expérimentations qui ont été mises en place.

  • AU ROYAUME-UNI

Six mois ont suffi à les convaincre. 92 % des entreprises britanniques qui s’étaient engagées à tester cette nouvelle façon de travailler, entre juin et décembre 2022, veulent poursuivre sur cette lancée. Les conclusions de cette expérimentation à grande échelle ont été rendues publiques le 21 février.

Plus de 60 entreprises ont participé à cet essai, qui a permis à près de 3 000 salariés de se rendre au travail un jour de moins par semaine tout en conservant leur salaire. Le test était organisé par l’association 4 Day Week Global, en collaboration avec les universités de Cambridge et Boston College.

Les résultats « montrent que presque toutes les entreprises poursuivront la semaine de quatre jours », avec notamment plus de neuf sur dix qui se disent certaines de continuer. Seules 4 % d’entre elles veulent arrêter. L’expérience a été « très positive » et la différence se voit « au quotidien » chez les salariés, indique à l’AFP le directeur client de Tyler Grange, une société qui l’a définitivement adoptée.

L’étude révèle une progression de 35 % du chiffre d’affaires des entreprises par rapport à la même période en 2021. Les chercheurs notent moins de démission, d’absentéisme, d’épuisement professionnel ou encore de stress.

  • EN BELGIQUE

Depuis le 21 novembre 2022, les salariés belges qui le souhaitent peuvent effectuer leur semaine de travail sur quatre jours. La condition ? Avoir une autorisation de leur employeur et condenser leurs heures.

Il ne s’agit donc pas de travailler moins, mais bien d’avoir des journées plus longues. Ce « deal pour l’emploi » a été adopté par les parlementaires en septembre de la même année. La mesure n’est pas généralisée, mais elle est proposée à tous les salariés qui

souhaitent profiter de cette réorganisation du temps de travail. Elle a été suggérée pour que les travailleurs puissent mieux concilier vie privée et vie professionnelle.

  • EN ESPAGNE

Le gouvernement espagnol a lancé une expérimentation qui concerne toutes les petites entreprises de moins de 250 salariés du secteur industriel. Objectif : réduire le temps de travail d’au moins 10 %, et ainsi passer à quatre jours et demi par semaine, sans réduction de salaire.

Ce test est d’abord programmé sur deux ans. En fonction des résultats, les pouvoirs publics pourraient la généraliser aux autres entreprises du pays. Ce plan à 10 millions d’euros doit permettre aux sociétés de se montrer plus efficaces tout en travaillant moins longtemps. Si au moins un quart des salariés s’engagent dans ce plan, l’entreprise pourra toucher une aide de 150 000 euros.

Le géant des télécoms Telefonica ou le magasin de prêt-à-porter Desigual la pratiquent depuis plusieurs années.

  • EN ISLANDE

Entre 2015 et 2019, le pays mène un grand projet pilote avec 2 500 participants. La semaine de 40 heures est raccourcie à 35-36 heures pour le même salaire. Elle est appliquée dans le secteur public, les bureaux, les écoles ou encore les hôpitaux.

Pour les chercheurs et les syndicats islandais, c’est un vrai succès. Désormais, près de 90 % de la population active bénéficie d’une réduction du temps de travail.

  • EN ALLEMAGNE

La proportion d’offres d’emploi faisant référence à la semaine de quatre jours a augmenté de 15,7 % en début d’année comparé au premier trimestre 2022, rapporte Der Spiegel dans Courrier international. Sur les 2 millions d’offres répertoriées sur la plateforme en mars, plus de 5 000 la mentionnaient. Et presque tous les secteurs d’activité sont concernés.

La crise sanitaire et économique n’est pas étrangère à cette réflexion sur la réduction du temps de travail. Chez IG Metall, les syndicats suggèrent de la mettre en œuvre afin de préserver les emplois dans l’industrie. Elle permettrait de rendre le secteur plus attractif.

  • EN NOUVELLE-ZÉLANDE ET EN AUSTRALIE

Chez nos voisins, elle fait aussi son chemin. L’entreprise de gestion de fortune Perpetual Guardian, en Nouvelle-Zélande, a été l’une des premières à se lancer dans l’aventure en 2018. Puis la société Unilever s’y est mise. Après des résultats encourageants entre décembre 2020 et juin 2022, l’expérience va être prolongée.

Pour les responsables de la société, c’est une vraie réussite avec un personnel plus heureux et plus motivé. L’absentéisme a baissé d’un tiers, tout comme le stress. D’où la décision de la multinationale de l’appliquer en Australie. Plus de la moitié des 900 employés australiens vont pouvoir tester ce nouveau rythme à partir du 14 novembre.

  • AU JAPON

Alors qu’ils travaillent plus de 50 heures par semaine et ne prennent que très peu de jours de congé par an, les Japonais sont pourtant en train d’imiter certains pays européens.

Les administrations publiques, qui font face au vieillissement de la population, ont du mal à embaucher de jeunes diplômés. Elles souhaitent donc rendre les postes plus attrayants avec cette refonte du temps de travail.

  • EN FRANCE

Les entreprises françaises ne font pas office d’exception. La société JC Logistique, située dans les Vosges, propose cette formule depuis 2019 tout comme la start-up Welcome to the Jungle.

La crise sanitaire a également changé la donne. Le groupe informatique LDLC, par exemple, a pris cette décision en janvier 2021. Les travailleurs sont passés de 35 à 32 heures par semaine, avec le même salaire.

Début février, le ministre des Comptes publics, Gabriel Attal, a annoncé le lancement d’une expérimentation par des agents de l’Urssaf en Picardie. Ici, le nouveau modèle d’organisation n’a pas trouvé preneur.  Seulement trois salariés sur 200 se sont portés volontaires pour cet essai qui doit durer un an.

La répartition du temps de travail sur quatre jours au lieu de cinq a été le frein principal. Les salariés ne préférant pas être présents 9 heures par jour au lieu de 7h20.

Edwige Blanchon

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