Renouveler sa garde-robe à l’infini de manière éthique

La boutique d’Émilie Martucci fonctionne sur l’échange de vêtements et d’accessoires d’occasion. / © E.B.

Ouvert il y a six mois, Mes Troquetteries, située au Mont-Coffyn, est la première boutique d’échange du territoire. Émilie Martucci a troqué son poste de responsable de communication pour celui de gérante de magasin
de vêtements d’occasion.

Du jaune, du vert, du rouge, du bleu. Les clientes d’Émilie Martucci en prennent plein la vue. Des vêtements de toutes les couleurs sont exposés sur les portants. Un véritable showroom composé uniquement d’articles d’occasion.

Pour celles qui n’ont pas l’habitude d’acheter des habits déjà portés, elles seraient surprises en mettant un pied chez Mes Troquetteries. « Il y a des femmes qui n’achètent que du neuf et qui n’envisagent pas du tout la seconde main. C’est ce qui m’a donné envie d’ouvrir une boutique jolie, qui met en valeur des articles en parfait état. »

Émilie Martucci n’a pas la prétention de dire qu’elle va changer les mentalités. Car c’est bien tout le marché de la seconde main qui y contribue. Toutefois, les femmes qui peuvent être hésitantes oublient parfois leurs idées reçues en arrivant chez elle. « On n’a pas l’impression d’être dans une friperie. Tout est bien rangé. On n’a pas besoin de fouiller », témoignent les clientes.

Et les hommes ?

Le magasin ne propose pas de vêtements pour homme pour plusieurs raisons. La première : le manque de place. La seconde : le marché.

« Les hommes, naturellement, sont moins consommateurs de prêt-à-porter que les femmes. Il y a une demande pour acheter de la seconde main mais les vêtements qu’ils portent, ils les gardent longtemps. Ils ne seront donc pas toujours en très bon état pour l’échange », estime Émilie Martucci.

 

En même temps, ce n’est pas une boutique de seconde main tout à fait comme les autres. Son concept, basé sur l’échange, fait toute la différence.

DU TROC CHIC ET FACILE

« C’est très répandu dans les pays anglo-saxons », précise la gérante. Le principe n’est pas sorcier. Il suffit d’apporter les vêtements qu’on ne porte plus et d’en récupérer d’autres à la place. Les clientes vont payer « une prestation de services », une sorte de forfait comme à la salle de sport. « C’est un abonnement qui permet de faire ses échanges pendant une certaine durée », explique la responsable.

Une journée, un mois, six mois. Les clientes ne sont pas contraintes de réaliser l’échange instantanément. Si, par malchance, rien ne va ou qu’elles ne trouvent pas leur taille le jour-même, elles ont la possibilité de repasser. « Elles peuvent renouveler leur garde-robe plus facilement. »

DIRE NON À LA SURCONSOMMATION

Pour Émilie Martucci, il était essentiel de laisser la liberté aux femmes de troquer leurs articles comme il leur chante. Son but : qu’elles aient envie de revenir et de se convertir davantage au marché de l’occasion. D’où le critère non négociable du parfait état. « Pour ce concept, je suis obligée d’avoir des articles qui se valent. »

L’avantage (ou le désavantage) sur une île comme la Nouvelle-Calédonie, c’est qu’il existe un vrai marché de seconde main avec des articles dans un état impeccable. « Il y a beaucoup de commandes sur internet. Qui dit achat en ligne, dit qu’on n’essaye pas. Quand les vêtements arrivent, ce n’est pas la bonne taille, ce n’est pas la couleur à laquelle on s’attendait. Rien ne vaut de toucher, d’essayer. »

Des femmes de tout âge et de toute catégorie socio-professionnelle poussent la porte de sa boutique. Certaines viennent même avec leurs adolescentes afin de leur apprendre à s’habiller autrement. « C’est sûrement plus répandu que lorsque nous étions plus jeunes », note Émilie Martucci, même si, de son côté, elle a toujours fréquenté les friperies.

Petite, c’était plutôt le lieu côtoyé par les personnes en difficulté. Adolescente, c’était l’endroit rêvé pour dénicher des pépites. Aujourd’hui, c’est une façon de dire non à la surconsommation. Une majorité de ses clientes lui rendent visite pour des raisons écologiques.

Consommer autrement est bien la raison principale qui a poussé Émilie Martucci à laisser son poste de responsable de communication. « Le fait d’avoir des enfants m’a fait prendre conscience de plein de choses. Et notamment de ce qu’on va leur laisser à l’avenir. » À 43 ans, c’était le bon moment d’embrasser un nouveau métier qui prend tout son sens.

Edwige Blanchon

L’échange en quatre étapes

  1. Les clientes apportent à la boutique les vêtements et accessoires qu’elles ne veulent plus, en parfait état, de saison, d’actualité, propres et repassés.
  2. Émilie Martucci vérifie les articles, fait sa sélection et attribue des points :
    – Les vêtements enfants : 0,5 point
    – Tops et jupes : 1 point
    – Pantalons et robes : 2 points
    – Articles coup de cœur : 3 points
  3. Les clientes achètent un Pass à la journée (3 500 francs), au mois (4 500 francs) ou sur six mois (18 900 francs).
  4. Avec ce Pass, elles peuvent se procurer de nouveaux articles.

 

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