Ils forment la communauté des créateurs de jeux de société

Le collectif de créateurs de jeux de société se réunit toutes les semaines pour tester leurs idées. Le jeu Cache Cache Killer fait partie des inventions en cours de développement.© E.B.

Un collectif de joueurs s’est récemment constitué, aspirant retrouver un jour en magasin un des univers qu’ils ont imaginé. Un travail de longue haleine qui implique des réunions, des tests, du temps et beaucoup de passion. Ils nous confient les règles à suivre pour venir à bout de leur quête.

Créer un jeu de société ? Vous ? Jamais ça ne vous est venu à l’esprit. Et pourtant, sans le savoir, vous faites peut-être partie de la catégorie des inventeurs. Si en jouant au Uno vous avez déjà décidé d’additionner les cartes +4 avec les +2, par exemple. « Tout le monde modifie les règles », reconnaît Jean-Baptiste Guénégan, citant le célèbre jeu de cartes qui associe les couleurs et les chiffres. « Envisager une variante, c’est déjà être créateur », insiste-t-il.

À côté de ces « petits » joueurs (tricheurs…), lui, possède une imagination débordante. Jean-Baptiste Guénégan a pensé à de nombreux concepts qu’il souhaiterait un jour développer. Avec cinq autres passionnés, ils forment un collectif qui se retrouve chaque semaine pour travailler sur leurs idées. « Julien Dulaurans, le gérant de l’Escape Game, a monté le collectif car il est l’un des éditeurs principaux qui possèdent Vic édition. Son but était que les auteurs calédoniens puissent éditer leurs propres créations », explique Muriel Mével.

Des mordus de jeux de société, des habitués, des gros joueurs, des illustrateurs, des gens du numérique… Tous ont décidé de se mettre autour de la table les lundis soir. « On était une vingtaine au départ », précise Muriel Mével. Lors de ce rendez- vous hebdomadaire, si un joueur arrive avec une idée, il apporte son prototype et propose une partie avec les membres du collectif. Il s’agit ensuite d’en discuter pour que le jeu puisse évoluer. « Jusqu’à ce qu’on arrive à un consensus. Ce n’est pas tout le temps évident », assure Laurent Couillaud.

TESTER ENCORE ET ENCORE

Les critères à respecter : il faut que le jeu soit « fun », qu’il y ait des missions, des objectifs, de l’interaction avec les joueurs. « Ce sont tous ces ingrédients qu’on essaie de disséminer. Ça engendre quelques discussions sympas », sourit Laurent Couillaud. Une fois que les joueurs sont « à peu près d’accord », ils organisent des matinées ou des journées test. Une étape cruciale qui leur permet d’avoir des retours. « C’est beaucoup de tests, de retours sur test, de modifications. Il faut avoir une bonne notion de lâcher prise. Quand le jeu est posé sur la table, il ne t’appartient plus. »

Parfois trop longs, parfois trop compliqués. Des jeux peuvent se faire « massacrer ». Certains ont vécu un mauvais moment lors de la première journée d’essai. « On l’avait ouverte à tout le monde. Beaucoup de familles sont venues avec des enfants de 8, 9, 10 ans. Leur critère c’était : ah, ce n’est pas joli, les cartes ne sont pas rondes », se remémore Jean-Baptiste Guénégan, qui a bien failli séparer deux personnes qui commençaient à se prendre la tête sur sa création. « Finalement, ils ont adoré. »

16 JEUX EN EXPÉRIMENTATION

Certains anciens membres du groupe font office aujourd’hui de bêta-testeurs. Ils s’impliquent ainsi dans le développement des jeux tout en apportant des critiques constructives. 16 productions sont actuellement en cours d’expérimentation. Certaines n’en sont encore qu’à l’étape d’idée, d’autres ont déjà été agréées par le collectif qui travaille activement dessus. « Trois jeux sont presque terminés, cinq demandent encore beaucoup de travail et quatre vont être testés », résume Laurent Couillaud. Un seul est réellement fini et déjà presque édité : Zanatomy (lire ci-dessous). « Il ne manque plus grand-chose pour qu’il soit en boutique », dévoile Muriel Mével.

Parmi toutes leurs inventions, aucune ne se ressemble. Les jeux ont été ciblés en fonction de ce qui les fait vibrer, leurs sensibilités. On retrouve donc des histoires de sorciers, une version du tarot améliorée, un Mario Kart façon jeu de plateau… Le collectif tente différentes recettes avec toujours comme ingrédient principal : le fun. « Le plus important à prendre en compte, c’est la frustration. Si tu t’amuses et qu’un autre non, c’est l’indicateur. »

Le secret pour devenir créateur de jeux de société ? Il faut être à la fois bon et mauvais joueur. Car les deux doivent pouvoir s’amuser. « On ne pourra rien faire en revanche pour un mauvais perdant », nuance Laurent Couillaud. Le secret pour créer un bon jeu de société ? Là encore, chacun a sa propre perception : rapide, long, marrant, casse-tête, qui provoque des discussions houleuses… Finalement, le seul critère primordial, c’est de passer un bon moment. Le meilleur jeu, c’est simplement celui qui te rend heureux.

Edwige Blanchon

Zanatomy, leur première réussite

Le premier jeu abouti du collectif s’appelle Zanatomy. Il s’agit d’un jeu d’apéro, rapide, « qui met bien dans l’ambiance ». L’objectif ? Attribuer des maladies aux joueurs. « Par exemple, tu vas avoir une conjonctivite, le joueur sera obligé de cligner des yeux pendant la partie. Tu colles des effets aux autres. Il peut y avoir jusqu’à cinq effets cumulés au total », explique Jean-Baptiste Guénégan.

Huit mois ont été nécessaires pour mettre ce jeu sur pied même s’il a dû être retravaillé par le collectif. « La première chose qu’on se demande devant un jeu c’est : quel est le but ? Qu’est-ce que je dois faire ? Nous, au départ, à part le fun, il n’y en avait pas. On a dû trouver les histoires, des missions », raconte Muriel Mével.

Cache Cache killer, leur coup de cœur

Imaginez un jeu où un tueur digne de Scream (et aussi intelligent que lui) vous pourchasse. La mission des joueurs : survivre en essayant de ne pas se faire poignarder. C’est le principe du jeu Cache Cache killer que le collectif s’éclate à essayer depuis quelque temps. « On adore. On prend plaisir à le tester plusieurs fois », confie Muriel Mével.

 

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