[DOSSIER] Singapour et Nouméa à nouveau reliées

Plus de trente ans après la dernière liaison de l’UTA, la Nouvelle-Calédonie renoue avec Singapour, cité-État hyper développée de l’Asie du Sud-Est et ouverte sur le monde. La nouvelle liaison aérienne directe proposée par Aircalin ouvre d’importantes perspectives touristiques, économiques et même géopolitiques. 

« Bienvenue à bord du vol SB700 à destination de Singapour. » L’A330neo, dénommé Luengöni,, a effectué la première rotation commerciale vers la ville asiatique le 1er juillet sous les commandes du capitaine Henri Bourgoin et de son copilote Antoine Hmaen, qui ont fait part de leur « immense joie » d’avoir été désignés pour l’occasion.

Parmi les 228 passagers, une large délégation d’officiels. Aircalin, Airbus, Nouvelle-Calédonie Tourisme (NCT), gouvernement, Congrès, journalistes. Une source de polémique à Nouméa, mais jugée nécessaire pour se « rendre compte des potentialités » et pour peser dans les échanges qui allaient s’y produire.

Nouvelle fenêtre sur le monde

L’ouverture de cette nouvelle ligne, qui intervient avec deux ans de retard, huit ans après Melbourne, est une bonne nouvelle pour Aircalin, lourdement impactée par la crise sanitaire. C’est aussi le fruit d’un important travail pour ses dirigeants et pour les responsables calédoniens (gouvernement, Adanc, NCT) et de l’État, notamment le ministère des Transports, investi dans l’instruction de ce dossier.

La compagnie cherchait à développer son réseau long-courrier, jusqu’ici concentré sur le Japon, et à le diversifier pour s’assurer d’autres voies – passagers et cargos – en cas de contraintes géopolitiques (ex. contournement actuel de la Sibérie en raison de la guerre en Ukraine), climatiques ou sanitaires.

Osaka a donc été abandonnée au profit de Singapour pour un temps de vol et un prix, pour l’instant, équivalents (8-9 heures de vol, à partir de 89 900 francs). Changi-Singapour, le 7e aéroport mondial (68,3 millions de passagers en 2019), a connu une reprise anticipée.

En mars 2022, 81 compagnies aériennes y opéraient déjà 2 800 vols par semaine. C’est aussi une plateforme en plein cœur de l’Asie reliant 116 villes et 46 pays. « Parfait pour notre stratégie de relance », selon le directeur général d’Aircalin, Didier Tappero, qui vise un équilibre à 80 % d’occupation sur toutes les lignes à l’horizon 2024.

Concurrence

Aircalin promet des connexions privilégiées vers la France et l’Europe avec ses partenaires Air France, KLM et Finnair, mais travaille sur d’autres accords avec des compagnies asiatiques, européennes, turques et même du golfe Persique. On évoque une possibilité de collaboration (« code share ») avec 30 compagnies pour 100 destinations.

Singapour Airlines (10 vols par semaine vers Roissy) est notamment intéressée par la prolongation de cette liaison avec Paris, plus compétitive sans les deux escales en Asie, puis en Australie. Elle proposerait le temps de voyage le plus court. Une concurrence qui, espère-t-on, pourrait servir les intérêts des passagers et de notre destination.

Pour l’heure, les Calédoniens pourront déjà découvrir Singapour et relier l’Asie (Thaïlande, Indonésie, Vietnam, etc.) sans passer par l’Australie. Deux vols par semaine sont opérés, prochainement trois, puis quatre espère Aircalin. Avec les quatre vols vers Tokyo, la Calédonie proposera un vol quotidien vers l’Asie. Tontouta pourrait devenir, pour sa part, un petit « hub » reliant Singapour et Papeete (la route « la plus courte »), et Singapour-Fidji par Wallis-et-Futuna.

Chloé Maingourd (Photo C.M.)


Une formation d’excellence pour les pilotes

Antoine Hmaen, pilote A320 et A330, dans un simulateur Airbus surprenant de réalisme.

La compagnie a signé un accord avec le centre d’entraînement Airbus-Singapour Airlines (AATC), le plus grand au monde. Jusqu’à 35 pilotes pourront y effectuer leurs formations initiales ou continues lors des escales, et ce sur les deux types d’avions qu’ils manœuvrent, A320 et A330.

« Nous allons pouvoir regrouper ici les formations qui se faisaient dernièrement à Paris avec une longue mobilisation des pilotes et des difficultés organisationnelles », explique Didier Tappero. « Une réelle plus-value », estime Henri Bourgoin, capitaine, instructeur et examinateur.

« Le centre est tout neuf. Airbus construit des avions et fournit des simulateurs. On a donc vraiment l’information à la source. » L’AATC propose ses services et matériel à 72 compagnies dans le monde et peut entraîner jusqu’à 10 000 pilotes par an.