Un rapport de WWF France, sorti en 2021, laisse entrevoir les conséquences du réchauffement climatique sur les pratiques sportives collectives et individuelles dans l’Hexagone si les températures augmentent de 2 ou 4 °C.
Au-dessus des 32 °C, une activité physique pourrait être dangereuse pour la santé. Ce seuil critique, il ne sera pas si rare de l’atteindre ou de le dépasser dans les années à venir avec le réchauffement planétaire. Les vagues de chaleur, quand le thermomètre ne descend pas en dessous de 25,3 °C pendant trois jours, sont de plus en plus fréquentes dans le monde entier.
En Nouvelle-Calédonie, la température maximum moyenne mensuelle n’est pas passée en dessous de 30 °C entre décembre 2022 et mars 2023. Elle était de 29,4 °C en avril. « En moyenne, on va avoir 20 % de précipitations en moins au cours du siècle, 30 sur la côte Ouest. Cela se traduira par un climat beaucoup plus sec et une augmentation des jours caniculaires, rappelle Hubert Géraux, expert conservation et plaidoyer de WWF Nouvelle-Calédonie. Nous sommes en zone tropicale, les 32 °C vont être beaucoup plus souvent atteints qu’en Métropole. »
Un rapport de l’ONG environnementale, financé par le ministère des Sports en 2021 dans le cadre des Jeux olympiques de Paris 2024, souligne les conséquences du dérèglement climatique sur nos pratiques sportives. L’augmentation des températures pourrait faire perdre 24 jours (+2 °C) à deux mois (+4 °C) d’activités physiques par an dans l’Hexagone, selon cette étude.
9 à 22 jours
de running en moins parce qu’il ferait trop chaud
Cela aurait des impacts sur les sessions de jogging, les matchs de football entre amis, l’apprentissage dans les établissements scolaires et l’organisation d’événements sportifs. Des épisodes caniculaires ont déjà provoqué l’annulation de l’Urban Trail de Poitiers marathon de Montréal (Canada) en 2017. Localement, la saison de trail ou cycliste pourrait, par exemple, être raccourcie par des mois de plus en plus chauds.
FATALITÉ ET OPPORTUNITÉ
Les répercussions ne se limiteraient pas à la hausse des températures. La montée des eaux menace la pérennité de certaines installations. Les bases nautiques du Ouen-Toro et de Koumac pourraient être déplacées à cause de l’érosion des côtes. Ce n’est pas inimaginable. Avec une hausse de 2 °C, vers quoi le monde tend en 2050 selon les dernières estimations du groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), un club de voile sur sept serait menacé sur le littoral hexagonal, rapporte WWF France. La moitié des clubs de Méditerranée serait concernée. Leurs locaux seraient endommagés ou pourraient carrément devenir inutilisables. « La hausse du niveau de la mer, l’érosion côtière et l’accroissement de la fréquence des épisodes de submersion marine menaceraient les espaces de pratique sportive (disparition de plages, destruction de sentiers de randonnée…) et les équipements », indique le rapport.
5 à 62 jours
de pelouses de stade endommagées par les vagues de chaleur
Les infrastructures risquent aussi d’être abîmées par des phénomènes climatiques plus extrêmes. Les pluies intenses et les inondations noieront les terrains,bloqueront les routes d’accès et perturberont forcément l’activité sportive. « C’est une épée de Damoclès et une opportunité de responsabiliser davantage. Le sport a besoin de préparer son adaptation climatique tout en contribuant à réduire sa note carbone. La communauté sportive a pleinement sa place à jouer pour engager la population dans la transition », souligne Hubert Géraux.
Cette « exigence environnementale » doit être appliquée à tous les niveaux, de l’aménagement à la pratique, en rénovant les bâtiments existants, en construisant plus responsable, en verdissant les villes, en réduisant les déchets lors des événements, en installant des bacs de tri dans les salles de sport ou en promouvant le covoiturage et le transport groupé lors des rendez-vous sportifs. « L’ensemble des acteurs et responsables doivent porter ces messages d’écoresponsabilité », poursuit l’expert de WWF.
80 à 131 clubs de voile
menacés par la montée des eaux sur les 576 existants
À l’échelle nationale, un plan pour adapter le sport au changement climatique doit être annoncé prochainement par le gouvernement. Les mesures à mettre en place d’ici 2030 viseraient à faire évoluer les pratiques amateures et professionnelles face à une augmentation moyenne de 2 °C. Se battre pour le climat, martèle Hubert Géraux, c’est aussi « préserver notre liberté de faire du sport ».
Brice Bacquet
Dans notre dossier
Les sportifs à l’épreuve du changement climatique
Course à pied, voile, va’a, VTT : quel avenir pour ces sports dans un monde voué à subir de plein fouet les événements climatiques extrêmes ? Revoir sa pratique, les équipements, les compétitions… La parole aux sportifs calédoniens David Esposito et Angélique Plaire. →
Une pratique sportive déjà altérée
Trois projections-débats sont organisées par l’IRD et Météo France sur la thématique du sport et du climat à partir de la série documentaire « Sans limites » sur le dépassement de soi des athlètes calédoniens. →
Quel sport dans un futur plus chaud ?
La 32e édition de la Fête de la science, organisée sous l’égide du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, est consacrée cette année à la pratique sportive en préfiguration des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024. →