Salaire minimum agricole : « Le sujet n’est pas clos »

Le SMAG net atteindra 141 284 francs au 1er janvier 2027, comme l’actuel SMG, en vertu de l’accord qui vient d’être signé. (© G.C.)

Le SMAG enfin « aligné » sur le SMG : le 19 février, le Medef a annoncé la conclusion d’un accord « historique » entre partenaires sociaux. Les syndicats, même ceux qui ont signé, sont beaucoup moins enthousiastes. Ils pointent la fragilité et les lacunes de l’accord.

Le 28 décembre, deux organisations patronales (le Medef et la CPME, avec le soutien de l’U2P) ainsi que trois des six syndicats représentatifs dans le privé (USTKE, CSTC-FO et Usoenc) ont signé un accord visant à augmenter de 9,6 % le salaire minimum agricole garanti d’ici janvier 2027. Le SMAG brut restera inférieur au salaire minimum brut en vigueur dans les autres secteurs (le SMG), mais par le jeu des exonérations de cotisations sociales accordées à l’agriculture, le salaire net sera équivalent : 141 284 francs contre 128 907 actuellement.

Le 19 février, le Medef s’est félicité de cet accord « historique », qui marque « une avancée significative dans l’histoire du salariat calédonien », puisque « le consensus a été atteint ». Les syndicats, cependant, apportent une analyse très différente.

« CE N’EST PAS L’ACCORD DU SIÈCLE »

« C’est une avancée, mais ce n’est pas l’accord du siècle. On considère que notre signature est une étape », dit Fidel Malalua. Le 4e vice- président de l’USTKE s’en tient au préambule de l’accord du 28 décembre, qui dit que « l’ambition partagée » des signataires est de « supprimer le SMAG », une demande qui était déjà celle de l’intersyndicale vie chère, au début des années 2010. Car malgré l’accord actuel, le SMAG pourrait de nouveau décrocher du SMG, si ce dernier venait à être augmenté seul.

Jean-Pierre Kabar (Cogetra) a lu les petites lignes du contrat, lui aussi, et a reposé son stylo. « On n’est évidemment pas contre cette augmentation du SMAG, mais on ne voulait pas signer un accord qui pourrait ne plus être valable dans quelques mois. Il y a trop d’incertitudes. » L’article 1er prévoit l’alignement sur le SMG au 1er janvier 2027 « si le secteur agricole continue de bénéficier des abattements » de 75 % sur les cotisations patronales. Or, ces exonérations sont appelées à être réanalysées dans le cadre de la réforme du Ruamm portée par l’Éveil océanien. Si elles venaient à être supprimées, l’augmentation de 9,6 % s’étalerait jusqu’en 2029, dit l’accord, ce qui représenterait pour les salariés une perte équivalente à l’inflation des années 2027 et 2028.

« CE QUI EST PRIS EST PRIS »

« On souhaite qu’on se réinterroge sur ces filières déjà aidées », lance Jean-Marc Burette. Pour le président de l’Usoenc, le combo SMAG-exonérations est pour certains une « rente dans la rente ». La réflexion vise tout particulièrement les entreprises d’entretien des espaces verts, qui n’appartiennent pas au secteur agricole mais sont autorisées à payer leurs salariés au SMAG. Les avantages dont elles bénéficient ont fait l’objet d’âpres discussions dans le cadre de l’accord salarial, et se poursuivront dans celui de la réforme du Ruamm.

Dans l’immédiat, l’Usoenc se réjouit des augmentations consenties par les organisations patronales. « C’est une avancée, c’est bien. Ce qui est pris est pris. Mais le sujet n’est pas clos. Ça fait 10 ans qu’on travaille sur la suppression du SMAG, et le résultat n’est pas du tout à la hauteur de nos attentes. »

Les négociations, cependant, semblent terminées pour un certain temps, aucune nouvelle réunion de travail n’étant prévue. « On a d’autres questions à régler dans l’immédiat. La problématique économique et sociale est aggravée. On va passer une année très compliquée. »

 


L’accord bientôt étendu à toutes les entreprises ?

Pour l’heure, l’accord n’est applicable que dans les entreprises affiliées aux organisations patronales signataires, Medef et CPME. Comme de coutume dans ce genre d’accord, les signataires demandent au gouvernement son extension à toutes les entreprises qui pratiquent le SMAG, ce qui nécessite un passage par la collégialité. Cet arrêté d’extension pourrait être pris dans les prochaines semaines.

 

Gilles Caprais