Nadia, celle qui n’abandonne jamais

Arrivée à la 23e place du 130 km (43 partants), Nadia Bresil est moins téméraire qu’il n’y paraît, assure Daniel Bonnefis, organisateur du Festival de trails. « Elle connaît très bien son corps, elle connaît ses limites. » © G.C.

Nadia Bresil, marraine du Festival de trails, a bouclé sans tergiverser les 130 kilomètres de l’« ultra », le 28 mai, portée par sa force mentale habituelle. Le cancer ne l’a pas stoppée, pas plus que les barrières invisibles qui la destinaient à devenir hôtesse de l’air plutôt que pilote.

En 33 heures et 14 minutes, Nadia Bresil a bouclé les 130 kilomètres du Festival de trails, son huitième « 100 bornes » en autant de tentatives. Les 10 derniers kilomètres ont été difficiles, admet-elle. Mais deux jours plus tard, quasiment pas de courbatures. « Mon corps commence à maîtriser cette discipline. » Qui doutait vraiment de la voir franchir la ligne d’arrivée ? Dans le petit monde du trail, tout le monde le sait : Nadia n’abandonne jamais.

En 2018, ses amis avaient tenté de la dissuader de se lancer dans la Diagonale des Fous, après seulement quelques mois d’entraînement régulier. Avec 169 kilomètres de long et 10 000 mètres de dénivelé positif, la célèbre course réunionnaise est une référence.

Sollicités par des traileurs venus du monde entier, les organisateurs n’acceptent que les coureurs confirmés. Pour concourir l’année d’après, Nadia devait donc impérativement boucler deux « 100 kilomètres » au plus vite. Impossible, pensaient certains.

« POUR MOI, JE N’ÉTAIS PAS MALADE »

Au mois de novembre 2018, Nadia apprend qu’elle est atteinte d’un cancer du sein. Elle se présente tout de même au départ des 102 kilomètres de Tarawera, en Nouvelle- Zélande, le 9 février 2019, dix jours après le début de sa chimiothérapie. « Ma famille avait peur, les médecins n’étaient pas pour. Mais j’en avais besoin. Je voulais qu’on me traite autrement que comme une malade. Pour moi, je n’étais pas malade. » Les premiers kilomètres sont difficiles. Mais dès le 20e, elle est « sûre et certaine » d’arriver au terme. « Ce jour-là, j’ai su que le cancer ne gagnerait pas. »

Sa ténacité « exceptionnelle » a tapé dans l’œil des organisateurs du Festival de trails, qui ont fait d’elle la marraine de l’édition 2023. « On l’a choisie parce que c’est une femme qui commence et qui finit tout ce qu’elle fait, parce qu’elle s’engage à fond », explique Daniel Bonnefis, président de l’association de l’Union des traileurs, ravi de mettre à profit sa petite notoriété dans le milieu du trail. « Les gens l’apprécient pour sa simplicité. Elle garde une certaine timidité, malgré un parcours qui est assez exceptionnel », à la montagne comme à la ville.

L’ASCENSION SE POURSUIT

Pilote de ligne chez Aircalin, Nadia Bresil a commencé sa carrière dans l’aviation en tant que personnel navigant commercial, une ascension peu commune pour une fille de Bourail, éloignée du monde de l’aéronautique. « Quand tu es une petite fille, les clichés veulent que tu sois hôtesse de l’air. Quand je suis entrée chez Aircalin, en 2004, j’ai vite compris qu’en réalité, je voulais piloter. J’avais 30 ans, j’étais posée, j’avais une vie confortable. Mais j’ai tout remis en question. »

Elle investit du temps dans le pilotage : Cessna 152, DA42, Twin Otter à Wallis-et-Futuna pendant sa formation, ATR 72 lors d’un passage chez Air Calédonie. Depuis le début de l’année, elle pilote les A320 de la compagnie à la fleur d’hibiscus à destination de Sydney, Auckland, Port-Vila ou Wallis, en attendant les long-courriers, les A330.

D’où vient cette détermination sans faille ? « J’avais peut-être des prédispositions au niveau mental », répond simplement Nadia, qui s’est fixé un nouvel objectif sportif : l’Échappée Belle, une autre course de renom, qui consiste à traverser le massif de Belledone : partir de Savoie pour arriver en Isère, après 149 kilomètres et 11 300 mètres de dénivelé positif. « C’est encore plus dur que la Diagonale des Fous. Ce n’est pas du GR. Il n’y a pas de vrai sentier, c’est du caillou. » Du solide, comme Nadia.

Au soutien de l’ACSMC
En tant que marraine du Festival de trails, Nadia Bresil avait pour mission de récolter des fonds pour l’association calédonienne de soutien aux malades du cancer. « Son aide était vraiment bienvenue. On est une petite association, c’est vraiment sympa d’avoir pensé à nous », remercie Monique Pellerin, la présidente.

 

Gilles Caprais