Corps électoral : la majorité plus mesurée avant l’Assemblée nationale

Seance publique de questions au gouvernement au Palais Bourbon, dans l' hemicycle de l'Assemblee Nationale. (Photo by Xose Bouzas / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP)

Dans la perspective du vote, le 13 mai, du projet de loi constitutionnelle portant modification du corps électoral pour les provinciales, et après des semaines houleuses, Nicolas Metzdorf, le député Renaissance rapporteur du texte, et le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer, Gérald Darmanin, ont insisté sur la place laissée à un accord.

Le député a auditionné 55 personnes en Nouvelle-Calédonie : représentants de l’État, groupes politiques au Congrès, parlementaires, présidents d’institutions, signataires des accords, communautés, associations… « J’ai eu tout le monde sauf les représentants de l’UNI-Palika », se réjouit Nicolas Metzdorf. La CCAT n’a pas non plus répondu à ses sollicitations. Mais Roch Wamytan s’est déplacé, comme Jacques Lalié, et les contributions écrites de l’Union calédonienne et du Sénat coutumier figureront dans son rapport. Son rôle de rapporteur qui a avait suscité des remous n’aurait pas été rediscuté.

« Article oublié »

Nicolas Metzdorf © C.M.

Malgré des divergences sur le calendrier et les durées d’accès au vote qui vont de zéro à 20 ans, « à la quasi-unanimité, les gens défendent le principe du dégel », retient Nicolas Metzdorf. Le représentant Les Loyalistes se dit aussi marqué par la « méconnaissance totale du projet de loi ». « La radicalisation du discours de la CCAT a entraîné une lecture très binaire du texte. […] On a l’impression que c’est l’ouverture totale du corps électoral. »

Le député évoque un retour « à ce que prévoyait l’accord de Nouméa à sa signature, en 1998 », un dégel sur 10 ans glissant, uniquement « pour le corps provincial ». Il insiste sur l’article 2 que « tout le monde a oublié » prévoyant la suspension de la réforme, si un accord est trouvé dix jours avant les élections. Une « porte ouverte aux négociations et aux discussions jusqu’au bout », qui rendrait même inutiles les demandes de mission du dialogue.

Il rappelle, par ailleurs, que les élections prévues au plus tard le 15 décembre peuvent encore être retardées jusqu’en novembre 2025, conformément à l’avis du Conseil d’État. Le rapporteur ne déposera pas d’amendements (ex : répartition des sièges au Congrès). Le souhait est que le texte soit voté rapidement, dans les mêmes termes qu’au Sénat. Il appellera au rejet de tous les amendements déposés par les groupes.

« Accord sérieux »

Nicolas Metzdorf a poursuivi ses auditions en Métropole avec Nicolas Sarkozy, François Hollande, les anciens ministres, le préfet Rémi Bastille, le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer. Gérald Darmanin a aussi été entendu par la commission des lois, le 29 avril. La rédaction des sénateurs ne le « satisfait pas totalement », mais le texte correspond toujours à l’esprit de celui du gouvernement, a-t-il expliqué. Il demande qu’il soit adopté conforme dès la première lecture et confirme son souhait de voir un scrutin organisé avant le 15 décembre, tout en garantissant lui aussi la possibilité de le reporter « en cas d’accord sérieux ».

Gérald Darmanin © Valentine Chapuis / AFP

Gérald Darmanin dit aussi ne pouvoir ignorer les manifestations ayant rassemblé à Nouméa des dizaines de milliers de Calédoniens, preuve que le sujet reste « éminemment important et politique » et que « nous devrions tous prendre nos responsabilités ». Il souligne que le gouvernement est toujours favorable à discuter des modalités d’une autodétermination future. « La main du gouvernement est toujours tendue », a-t-il conclu. Des interventions plus calmes que précédemment pour ces deux représentants.

Chloé Maingourd

La majorité serait acquise avec la droite et le Rassemblement national « sous réserve ». La gauche continue de manifester son opposition. Si la réforme est adoptée, elle devra encore être approuvée par les trois cinquièmes du Parlement, en Congrès à Versailles.

 


Un rapport préconise « une mission impartiale »

Les députés Tematai Le Gayic, Davy Rimane et Philippe Gosselin ont publié un rapport sur la Nouvelle-Calédonie en avril.© Y.M.

La mission d’information sur l’avenir institutionnel des outre-mer débouche sur des conclusions différentes selon les tendances politiques.

Les députés de la mission d’information sur l’avenir institutionnel des outre-mer sont passés du 11 au 15 mars en Nouvelle-Calédonie. Leurs préconisations ont été livrées en début de semaine. « L’État doit mettre en place une mission impartiale destinée à faciliter les négociations entre les parties en présence dans le but d’aboutir à un accord global », concluent les rapporteurs. Cette initiative pourrait associer l’Assemblée nationale et le Sénat qui participeraient ainsi aux « travaux et décisions ».

Le projet de loi constitutionnelle sur le dégel du corps électoral provincial tend les relations. « La situation reste très sensible et le risque d’un embrasement est réel » redoutent les quatre parlementaires. Néanmoins, « un accord est possible dans un délai raisonnable ».

« Confiance »

Les rapporteurs aboutissent toutefois à des conclusions différentes. Davy Rimane et Tematai Le Gayic, de la Nupes, « considèrent qu’il est indispensable de laisser encore du temps aux négociateurs pour aboutir à un accord ». Les élus s’appuient sur l’avis du Conseil d’État. Il n’y aurait aucune urgence à examiner la question du dégel du corps électoral. « Un report de l’ordre de six à douze mois pourrait contribuer à rétablir la confiance. »

Philippe Gosselin, des Républicains, et Guil- laume Vuilletet, Renaissance, « appellent de leurs vœux la conclusion d’un accord global » et estiment eux que, « grâce aux amendements votés par le Sénat, les parties disposent encore de plusieurs mois » pour le formaliser.

Yann Mainguet