Les sœurs Paudel, des fées venues du Népal

Les deux soeurs népalaises, que l'on pourrait croire jumelles, sont inséparables.© C.M

Parmi la vingtaine d’artistes se produisant au cirque de Samoa, deux sœurs acrobates ont un talent remarquable. Rencontre avec Rita et Renu Paudel.

Dernier acte chaque soir, imparable. Sous le chapiteau, le public retient son souffle. Rita Paudel fait monter un ballon sur les paliers d’une plateforme reliée à ses pieds, qu’elle guide jambes en l’air. L’essai numéro un échoue. L’objectif semble trop ardu mais l’artiste veut recommencer. Lentement, la balle remonte. À l’avant-dernier palier, Rita marque une pause qui semble durer une éternité… et parvient, dans un bref mouvement, à marquer le panier final sous un tonnerre d’applaudissements.

Avant cette prouesse, sous d’autres costumes, Rita et sa sœur avaient réalisé un superbe duo aérien sur cerceau (où l’une d’entre elles est suspendue à la simple force de sa mâchoire !), un numéro de funambule ou encore de hula-hop pour Renu. On a même pu les croiser dans le public, munies de pop-corn et autres jouets fluorescents.

INDIA’S GOT TALENT

Bruno Loyal ne s’est pas trompé en embauchant ce duo, visible pour la deuxième fois en Nouvelle-Calédonie. « C’est le meilleur duo de filles que j’ai jamais eu », dit-il.

Rita et Renu, que l’on pourrait croire jumelles, ont été formées par l’Indian Rambo Circus, l’un des plus anciens et importants cirques d’Inde qui tourne dans tout le pays et au Moyen-Orient avec des shows digitaux et jusqu’à une centaine d’artistes.

« On trouve en Inde des actes fantastiques, très exotiques, de jonglage, de pliage de métal, de lancer de couteau. Mais c’est très rare pour un cirque étranger d’en produire » précise Bruno Loyal, le chef de troupe.

De fait, elles ont grandi dans ce cirque. Rita, aujourd’hui 34 ans, a commencé à travailler à sept ans, sa sœur Renu, 32 ans, l’a suivie à l’âge de dix ans. Elles ne parlent pas des conditions qui les ont conduites à travailler si jeunes. Elles expliquent qu’elles ont gagné leur argent et aidé leur famille. Mais qu’il n’était pas toujours facile de se produire chaque soir. Le travail des mineurs était très répandu dans le milieu du cirque, en Inde, à cette époque.

Les filles sont originaires de la ville d’Hetauda dans la province de Bagmati au Népal, ville moyenne de 80 000 habitants, au sud de Katmandou. Elles ont acquis en Inde et au Népal une certaine notoriété. En 2022, elles ont même participé à l’émission télévisée India’s Got Talent (l’équivalent de La France a un incroyable talent) où elles ont fait sensation avec leur célèbre numéro aérien, sur la même base que celui qu’elles offrent actuellement à Dumbéa.
À 17 heures, Rita (à gauche) et Renu se préparent dans la petite cabine d’un container qui leur sert
de chambre et de dressing : maquillage, vérification et ajustement des costumes. Elles aident ensuite
à la mise en place de la salle. Elles s’entraînent chaque matin. Cette vie est la leur depuis leur tout jeune âge. © C.M

LE NÉPAL TOUJOURS EN TÊTE

Rita et Renu, inséparables, disent aimer cette vie nomade où elles enchaînent les contrats entre les deux cirques. « On a pu voir des endroits extraordinaires », raconte Rita. Leur emplacement préféré ? « Tahiti est vraiment incroyable, répondent-elles d’une seule voix, après un regard. Les gens sont adorables et viennent parfois plusieurs fois de suite. »

Elles ont également l’occasion de retourner chez elles entre deux contrats. Elles sont très proches de leurs trois sœurs. Mais le show et le chapiteau sont leur vie. Elles ne s’en plaignent pas. Elles aiment se produire, « faire plaisir au public ». Chacune avec ses aptitudes. « Renu est plus flexible » selon Rita, et pour Renu « Rita a plus de talent, tout simplement ».

Les accidents en revanche font partie de la discipline. « On en a eus tellement ! À la cheville, au poignet… montre Rita. Mais dans ce cas-là, on fait une pause, on est soignée et on recommence. Le risque fait partie du cirque. » À ce titre, elles préfèrent se produire dans des localités tropicales ou tempérées, le grand froid raidissant les corps.

Elles savent aussi qu’elles devront arrêter cette carrière assez tôt, « quand le corps nous le fera savoir ». Leur ambition ensuite ? Ouvrir un magasin au Népal, probablement ensemble.

Chloé Maingourd