La vie 31 % plus chère en Nouvelle-Calédonie

Symbolique, le secteur de l’alimentaire, qui représente les achats du quotidien pour les ménages, connaît des prix 78 % plus élevés que dans l’Hexagone. (Sources : Enquêtes de comparaison spatiale des prix, Insee - Isee - ISPF)

Un ménage calédonien doit dépenser 31 % en moyenne de plus que dans l’Hexagone. C’est ce qu’il ressort de la dernière étude menée par l’Isee sur la comparaison des prix à la consommation entre la Nouvelle-Calédonie et la France métropolitaine. Derrière ce chiffre se cache de fortes disparités selon les secteurs. L’alimentaire est 78 % plus cher. Un record.

♦ N°1 EN OUTRE-MER

Au jeu de la vie la plus chère, c’est la Nouvelle-Calédonie qui remporte la palme en outre-mer avec 31 % de plus en moyenne par rapport à la France hexagonale, talonnée par la Polynésie française (30,8 %), selon l’étude sur la comparaison des prix entre les outre-mer et la Métropole que l’Isee, Institut de la statistique et des études économiques, vient de rendre publique. « C’est bien plus qu’ailleurs », commente Olivier Fagnot, son directeur : 15,8 % en Guadeloupe, 13,8 % en Martinique, 13,7 % en Guyane, 8,9 % à La Réunion, et 10,3 % (hors loyers) à Mayotte.

♦ L’ALIMENTAIRE : +78 %

« Il y a des effets très contrastés selon les secteurs », remarque Olivier Fagnot. Le plus emblématique est celui de l’alimentaire, qui arrive en deuxième position, avec des coûts plus élevés de 78 %, le plus gros écart de l’outre-mer (il est de 46 % en Polynésie française). « C’est un poste de dépenses important, puisque ce sont celles que l’on fait au quotidien. » Elles représentent 18 % du budget des familles selon l’enquête 2019-2020 (l’alimentaire, le transport et le logement constituent à eux trois 53 % du budget des ménages).

Et encore, l’Hexagone a connu une inflation sans précédent en 2022 (+5,2 %), ce qui a sans doute freiné la hausse de cet écart. Jusqu’à quand les prix vont-ils continuer de grimper ? « La question est de savoir si à un moment donné, avec ces tarifs, il y aura des consommateurs en face qui acceptent de payer pour ces produits-là », interroge le directeur.

♦ LES PLUS MODESTES LES PLUS TOUCHÉS

Plus les ressources du foyer sont limitées, plus le poste de l’alimentaire, « qui sont des dépenses vitales », a tendance à avoir un poids important. « Vous ressentez bien plus difficilement l’augmentation des prix. » Mais, ce n’est pas qu’un ressenti. L’Isee mesure l’inflation des ménages les plus modestes. « Il y a un écart de l’ordre de 1 point entre celle calculée sur l’ensemble de la population et celle calculée sur les ménages les plus modestes entre août 2022 et 2023. » Ces derniers sont davantage pénalisés.♦ COMMUNICATIONS, LOGEMENT ET ESSENCE

Devant l’alimentaire, l’alcool et le tabac occupent la première place en termes de différences de tarifs. Ils sont près de deux fois plus élevés, en raison notamment de la hausse des taxes. L’hôtellerie et la restauration (+77 % contre 35 % en 2015) sont également concernées par cette augmentation, tout comme les communications (+67 %), sans doute en lien avec la concurrence à laquelle se livrent les opérateurs dans l’Hexagone. Les dépenses de santé sont plus lourdes de 41 %. Le logement et l’énergie, qui représentent 16 % du budget des ménages, sont 30 % plus chers.

Deux postes notables sont inférieurs en Nouvelle-Calédonie. Le transport, l’essence étant 30 % moins chère qu’en Métropole. Ainsi que les biens et les services. Pour ces derniers, selon Olivier Fagnot, cela serait lié, entre autres, au fait que le SMG est 30 % inférieur au salaire minimum métropolitain.

♦ UNE TRÈS LENTE RÉDUCTION DE L’ÉCART

Avec l’Hexagone, l’écart se réduit très légèrement depuis 2010 avec 34 %, puis 33 % en 2015 et 31 % en 2022. « C’est très lent, mais cela a tendance à baisser. Alors que sur l’ensemble des autres territoires d’outre-mer, il a tendance à s’agrandir. » Pourquoi ? Il n’y a pas vraiment d’explication, mais Olivier Fagnot suggère : « on peut imaginer qu’il y a un niveau ‘acceptable’ des tarifs et qu’ils ne peuvent pas continuellement augmenter ».

D’ailleurs, au vu de de la baisse du coût du fret et de celui des matières premières, l’évolution des prix sera à observer dans les prochains mois. « Logiquement, ils devraient fléchir. Est-ce que cela va être le cas, est-ce que les distributeurs vont jouer le jeu, cela devrait être intéressant à voir. En Métropole, on dit qu’on ne retrouvera plus les niveaux connus en 2019. »

Olivier Fagnot, directeur de l’Isee.

♦ À QUAND UNE ÉTUDE SUR LA STRUCTURATION DES PRIX ?

Afin de mieux appréhender le phénomène, il pourrait être intéressant de mieux connaître la structuration des prix, estime Olivier Fagnot, qui constate que l’inflation a été moins prononcée en Nouvelle-Calédonie, avec +3,7 %. « La différence d’inflation observée entre la Nouvelle-Calédonie et la France hexagonale nous laisse penser que les distributeurs ont rogné sur leurs mages pour limiter l’inflation. C’est une hypothèse qui pourrait être vérifiée si on avait le détail des prix des produits entre le moment où ils partent et le moment où ils sont vendus sur nos étals. »

Anne-Claire Pophillat