Avenir institutionnel : un projet politique « partagé » se dessine

Thierry Santa (Rassemblement-LR), Pascal Vittori (Tous Calédoniens), Alain Descombels (Rassemblement national) ou encore Pascal Lafleur, candidat aux dernières législatives, travaillent à un projet commun, institutionnel, économique et social, à l’aube des discussions à Paris.

Peut-on parler d’une nouvelle alliance ? Plutôt « de personnalités qui travaillent à une vision partagée », corrige Thierry Santa. Après les élections législatives, ces personnalités ont entamé « dans une démarche d’abord apolitique » des discussions. « Nous étions d’accord sur le fait qu’il fallait pouvoir présenter un projet aux réunions tripartites et trouver les solutions les plus pertinentes pour l’avenir de la Nouvelle- Calédonie », raconte Thierry Santa.

Selon Alain Descombels, il n’était en effet pas question d’attendre que les solutions viennent de l’État. « Alors que les visions sont par ailleurs très troubles et qu’il y a une vraie lassitude des Calédoniens, notre idée est de travailler à un projet structuré, solide, qui correspond à une attente. » Pascal Lafleur ajoute qu’il était « essentiel de ne pas travailler que sur la solution institutionnelle, mais aussi sur un vrai projet de développement économique et social susceptible d’engager la relance ». Pour Pascal Vittori, élu de proximité, ce projet devait également « répondre au retard concernant les compétences et les financements des communes ». De l’avis de tous, les discussions sur le fond ont été faciles.

OUVERTURE

Depuis, ceux qui représentent des partis ont reçu l’aval de leur structure sur ce projet qui doit « transcender les clivages politiques locaux ou nationaux ». Les partenaires sont parvenus à décrire les premiers axes de leur pensée qui pourront être présentés à Paris avec une volonté auparavant d’en débattre avec les autres représentations.

La porte reste en effet ouverte à tous ceux qui pourront se reconnaître dans leurs idées. On sait que les représentants de la majorité présidentielle souhaitaient aussi rassembler. « On ignore leur vision, la nôtre en tout cas avance », entend-on ici.

VALEURS COMMUNES ET HÉRITAGE

Cette vision s’inscrit d’abord dans un héritage. « Il ne s’agit pas de partir d’une page blanche », est-il indiqué. Ils s’inscrivent dans les Accords avec ses réussites et ses échecs, et la reconnaissance mutuelle symbolisée par la poignée de main entre Jacques Lafleur et Jean-Marie Tjibaou.

Sur cette base, et après les trois référendums qui ont inscrit la Nouvelle-Calédonie dans la France « sans pour autant tout régler », une nouvelle étape « durable, rassurante et enthousiasmante » doit être dessinée. Elle repose sur une volonté de vivre ensemble et un socle de valeurs communes, républicaines, mélanésiennes, océaniennes, chrétiennes, humanistes, etc.

La solution souhaitée est une Nouvelle-Calédonie unie et autonome dans la République, inscrite dans la Constitution française, avec une auto-organisation décrite dans une loi du pays qui pourra donc être de responsabilité locale. Les partenaires affichent un attachement aux compétences régaliennes à la France, sorte de ligne rouge. Ils s’opposent au transfert des compétences de l’article 27. Le droit inaliénable à l’autodétermination est respecté, mais il faudra prévoir les modalités selon lesquelles il pourra être demandé.

SOUVERAINETÉ PARTAGÉE

Au niveau des institutions locales, il ne s’agit pas de bouleverser l’architecture actuelle : l’idée est d’améliorer l’existant avec efficacité, cohérence, et avec un contrôle accru sur la manière dont l’argent public est utilisé. Il faut revoir les modalités de représentativité et la répartition des compétences, simplifier le système et viser une logique de proximité.

 

La fiscalité calédonienne sera revue pour permettre aux collectivités d’exercer leurs compétences. Le groupe souhaite par ailleurs la fin du gel électoral. Les partenaires se positionnent en faveur de la recherche de signes identitaires communs et d’une politique culturelle du territoire.

Le projet va être largement enrichi ces prochains mois. La volonté est qu’il puisse devenir une référence jusqu’en Métropole. Il pourra en tout cas s’appuyer sur un soutien non négligeable dans la sphère politique nationale.

Chloé Maingourd

Photo : Les partenaires promettent un projet « solide ». / Archives DNC et DR

Un « bon équilibre » pour Pascal Lafleur

« Je considère qu’il est urgent de travailler à un projet pour l’avenir du territoire et l’ensemble de ses habitants. La situation économique ne cesse de se dégrader, une partie de plus en plus importante de la population connaît des difficultés pour boucler ses fins de mois. Nous ne pouvons ignorer cette situation et laisser des compatriotes sur le bord de la route.

Maintenant que nous sommes sortis de la période de l’Accord de Nouméa, il faut ouvrir une nouvelle page qui doit être synonyme de paix, de stabilité politique et de développement. Un groupe de travail s’est constitué avec des valeurs communes pour réfléchir à l’avenir institutionnel simultanément à des orientations qui permettront de rendre la Nouvelle Calédonie attractive aux investisseurs, aux entreprises et à ceux qui voudront s’y installer. Notre objectif est de pouvoir rassembler le plus grand nombre sur ces propositions.

Nous recherchons un bon équilibre pour que chacun trouve sa place ici sans exclusion, un bon équilibre entre développement et préservation de la biodiversité, un bon équilibre entre les valeurs de chacun dans la considération et le respect des communautés. Nous devons cultiver la richesse de notre diversité pour le bien de tous.

Enfin, nous devons proposer un projet dans lequel les futurs élus seront responsables de leurs actes, où la Métropole devra nous soutenir sans nous assister et permettre un contrôle strict des politiques publiques. Un système dans lequel des sanctions pourront être prises envers des élus et qui pourra redonner la parole à la population dans une consultation qui devra respecter certaines conditions ».