Et si une petite entreprise calédonienne révolutionnait l’irrigation ? Aqualone, inventé et testé en Nouvelle- Calédonie, suscite en tout cas l’intérêt de l’État californien où la sécheresse sévit depuis dix ans. Car ce système, qui fonctionne sans électricité et sans intervention humaine, permet de réduire la consommation en eau de près de 55 %.
De Nouméa à Los Angeles en passant par l’Australie, une invention calédonienne affole le monde de l’agriculture. Et pour cause, le dispositif Aqualone, conçu par l’ingénieur Bernard Balet, promet de réduire la consommation en eau des plantations de 55 %*. Et ce, avec un simple système de régulation, capable de commander l’arrosage « à la demande » de la plante. Le tout sans intervention humaine, sans électricité et à moindre coût. L’invention de Bernard Balet est simple et peut être utilisée aussi bien par les professionnels que les particuliers (potagers, pelouses, etc.). Les conduites d’arrosage sont reliées à un pot témoin, rempli de la même terre que la plantation et à un sous-pot en céramique poreuse muni d’un flotteur. Lorsque l’eau du sous-pot s’évapore, le flotteur est en position basse, ce qui déclenche mécaniquement les vannes d’arrosage de la plantation. Si l’humidité est satisfaisante, le système d’irrigation reste fermé.
Alors au dernier Salon international de l’irrigation de Los Angeles, une référence dans le monde professionnel, Aqualone fait sensation au point d’obtenir le Prix de l’innovation. « Dès le lendemain, j’étais reçu au gouvernement californien, puis à l’université de Davis. Celle-ci va mettre mon invention en test. » Il faut dire que depuis dix ans, la Californie est en proie à la sécheresse. L’arrosage y est strictement contrôlé et les zones agricoles reculent. Or, sans plantes, l’eau de pluie ruisselle et n’atteint plus les nappes phréatiques. Un cercle vicieux qu’Aqualone pourrait rompre.
Gain de temps, d’argent et de rendement
En Nouvelle-Calédonie, le système a été testé pendant six mois par l’Institut agronomique néo-calédonien (IAC) sur sa station de Pocquereux. En parallèle d’Aqualone, un programmateur classique, réglé en fonction de l’évapotranspiration temporelle (ETP, une équation qui prend en compte la température, le vent, le taux d’humidité, etc.). Le résultat est sans appel : 55 % d’économie d’eau avec Aqualone.
« Les tests sont clairs. Ça marche et c’est fiable », confirme Zacharie Lemerre-Desprez, ingénieur agronome à l’IAC, qui souhaite généraliser le système à l’ensemble des plantations de la station de Pocquereux. Car avec Aqualone, plus besoin de faire de réglages tous les jours, ni de se plonger dans les épais manuels d’utilisation des programmateurs classiques. Les agriculteurs y voient bien leur intérêt : un gain de temps, d’argent, mais aussi des rendements améliorés. « Aqualone permet d’arroser en fonction des besoins réels de la plante. On n’a donc ni d’excès, ni d’insuffisance d’eau », poursuit Zacharie Lemerre-Desprez. Donc plus de problème de pourrissement ou de dessèchement sur pied.
Dès le mois prochain, Aqualone sera testé grandeur nature « sur une parcelle de dix hectares, en partenariat avec l’Adecal et la province Sud », précise Bernard Balet. La commercialisation va, quant à elle, commencer dès cette année, avec une première production destinée au marché australien et au marché calédonien.
Charlotte Mannevy.
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Une idée née il y a trente ans…
Bernard Balet a commencé à travailler sur des prototypes il y a dix ans, avant de trouver en 2014 les partenaires financiers lui permettant de véritablement lancer son entreprise. Mais l’idée lui est venue il y a bien plus longtemps. Il y a trente ans, en visite chez un oncle vivant dans la Drôme provençale deux mois par an, une région française particulièrement aride, il conçoit un système mécanique permettant d’utiliser une petite nappe d’eau pour entretenir un potager toute l’année. L’idée est déjà d’une simplicité confondante : une barre basculante reliée à l’ouverture du tuyau d’arrosage. D’un côté un poids, de l’autre des éponges ménagères, arrosées en même temps que les cultures. Lourdes d’eau, les éponges retombent et ferment le robinet. Sèches, la barre bascule de l’autre côté et rouvre l’arrivée d’eau. De retour l’année suivante, le tonton découvre une oasis de verdure au milieu de ce qui n’était auparavant qu’un champ de cailloux…