Une ministre novice de l’Outre-mer

La passation de pouvoir entre Philippe Vigier et Marie Guévenoux, nommée le 8 février, s’est déroulée vendredi 9 février. (© Dimitar Dilkoff / AFP)

Macroniste de la première heure, députée de l’Essonne depuis 2017, Marie Guévenoux succède à Philippe Vigier en tant que ministre déléguée aux Outre-mer. Certains élus ultramarins lui reprochent son manque de connaissance des dossiers.

Fidèle d’Alain Juppé, Marie Guévenoux devient, à 46 ans, la nouvelle ministre des Outre-mer. C’est aux côtés d’Alain Madelin que cette professionnelle de la politique fait ses classes en tant que collaboratrice parlementaire au début des années 2000. Peu de temps après, l’Amiénoise rencontre Alain Juppé et devient la première présidente des jeunes de l’UMP en 2003, où elle se lie avec Gérald Darmanin.

Sa carrière se poursuit au sein de plusieurs cabinets ministériels, dont ceux de Brigitte Girardin alors en charge de la Coopération et de la Francophonie, de Jean-Louis Borloo à l’Environnement ou encore de Xavier Darcos à l’Éducation nationale. En 2016, la future députée intègre l’équipe de campagne d’Alain Juppé pour la primaire des Républicains avant de rejoindre, après son échec, celle de François Fillon pour la présidentielle.

PRIORITÉ AU DIALOGUE

La politicienne, en retrait à la suite de la mise en examen du candidat LR, adhère, peu de temps après, à La République en marche (LRME). Investie aux élections législatives de 2017 dans la 9e circonscription de l’Essonne, Marie Guévenoux remporte le scrutin. Quelques mois plus tard, son nom apparaît parmi ceux qui forment le bureau exécutif du parti. Réélue en 2022, la parlementaire est nommée première questeure de l’Assemblée, un poste stratégique, les questeurs étant chargés de la gestion administrative et financière de l’institution.

Son arrivée au gouvernement pour succéder à Philippe Vigier est saluée par Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur et des Outre-mer, lors de la passation de pouvoir, vendredi 9 février. « Je connais Marie Guévenoux, son engagement, sa pugnacité », ne doutant pas de son intention à « travailler à améliorer la vie ultramarine ».

La nouvelle venue a évoqué des « enjeux immenses » dans son discours. « La vie chère, la sécurité, l’environnement, l’immigration, l’économie, l’accès aux soins, à l’eau. Je mesure l’ampleur de ces difficultés et vous assure de placer toute mon énergie au service de ces territoires ultramarins. » Parmi ses autres missions, continuer à mettre en œuvre les mesures du CIOM, Comité interministériel des Outre-mer. Dans un esprit d’échange. « Je suis une femme d’écoute […] », « je veux établir un dialogue de confiance » avec les élus ultramarins.

Des paroles à l’épreuve de la réalité deux jours plus tard lors de son premier déplacement à Mayotte, où elle est arrivée dimanche 11 février avec Gérald Darmanin, sur une île sous tension, en proie à des blocages contre la délinquance et l’immigration illégale. À la fin du mois, c’est en Nouvelle-Calédonie que Marie Guévenoux est attendue, aux côtés du ministre de l’Intérieur et d’Éric Dupond-Moretti, garde des Sceaux.

« VALSE DES INTERLOCUTEURS »

Le turn-over est largement critiqué. « Quatre ministres chargés des Outre-mer en 20 mois, les ministres passent, les problèmes demeurent », déplore Philippe Naillet, député réunionnais, citant la crise du logement, la vie chère, le problème de l’eau à Mayotte, le taux de pauvreté élevé. Une nomination qui lance un mauvais signal. « Cette valse des interlocuteurs ne peut que renforcer le sentiment des élus et des populations des Outre-mer d’un manque de respect et d’une absence de volonté politique d’inscrire ces territoires dans les priorités gouvernementales », réagissent Olivier Nicolas et Béatrice Bellay, respectivement premier secrétaire fédéral de Guadeloupe et secrétaire national aux Outre-mer et première secrétaire fédérale de Martinique dans un communiqué, renvoyant Marie Guévenoux et ses prédécesseurs à « une même politique méconnaissant les urgences des territoires ».

PHILIPPE VIGIER, À PEINE SIX MOIS

Nommé le 20 juillet 2023 dans le gouvernement d’Élisabeth Borne, le passage de Philippe Vigier aura été court et peu marquant, même si lors de la passation de pouvoir, Gérald Darmanin a salué le travail « très important » accompli dans des mois « très difficiles ». « Philippe a parcouru le monde et donc la France avec passion et énergie essayant de résoudre des problématiques », ajoutant : « c’est grâce à lui si la crise de l’eau à Mayotte a pu être accompagnée ».

Le ministre de l’Intérieur l’a également remercié pour son implication « dans la préparation pour tout le travail en Nouvelle-Calédonie », rappelant : « cet accord dont on devra beaucoup à Philippe s’il devait arriver ». De son côté, l’ancien ministre a, entre autres, mentionné l’augmentation du budget des outre-mer de 7 % pour 2024.

 

A.-C.P.