Une biochirurgie qui en veut à votre matériel !

La maladie est le terrain de chasse privilégié des charlatans de tout poil. Ces moments de faiblesse sont le moment idéal pour tirer profit de ces personnes. Les arnaques sont légion et prennent des formes très diverses. La Calédonie a son lot de prédateurs, c’est le cas d’une pratique épinglée en métropole : la biochirurgie immatérielle.

Les arnaqueurs font preuve d’une imagination débordante et toujours renouvelée. La maladie est un terrain de chasse tout trouvé pour ces prédateurs qui jouent sur la faiblesse des gens afin de leur soutirer de l’argent. La Calédonie est épargnée par un grand nombre de techniques qui sont parfois très élaborées. Par un grand nombre, mais pas toutes. La biochirurgie immatérielle en fait partie.

Le territoire accueille une praticienne de cette discipline un peu étrange. Inventée par Jean-Marie Bataille, la biochirurgie immatérielle repose sur le concept de l’esprit intégral. Le principe est relativement simple, le patient s’allonge et le biochirurgien procède à l’opération. Concrètement, le « spécialiste » utilise des ustensiles immatériels et donc imaginaires, retire vos organes – tout ou partie, en fonction des pathologies – et les remplace par du « neuf ». Mieux et plus facile que l’entretien de votre véhicule. En une demi- heure, vous êtes comme neuf et avez surtout le porte-monnaie un peu plus léger.

Une opération « immatérielle »

Cette technique, Jean-Marie Bataille est venu la présenter, en 2012, devant la commission d’enquête du Sénat sur l’influence des mouvements à caractère sectaire dans le domaine de la santé. Les réponses du praticien (le rapport de l’audition est consultable sur le site du Sénat) sont pour le moins étonnantes. S’il se défend de tout abus de faiblesse et de mise en danger, devant la commission, Jean- Marie Bataille a assuré à plusieurs reprises ne pas faire de diagnostic ni de prescription, des exercices réservés aux médecins. Ce qui permet d’ailleurs aux biochirurgiens immatériels ou ondobiologues d’utiliser le terme de médecine, qui n’est pas protégé.

Toujours dans le fil de cet entretien, l’ondobiologue résume l’exercice de sa discipline. « Il s’agit de l’aboutissement de toutes les recherches que j’ai pu mener. En cas, par exemple, de lombaires douloureuses, au lieu de se faire opérer, il est possible de les rénover en extrayant tout ce qu’il faut régénérer ; on crée une pièce que je pense être des cellules souches ; on la remet en place ; on reprogramme la génétique et après, ça se rematérialise et ça se raccorde. » On l’aura compris cette opération (du Saint-Esprit) relève du magique même si Jean-Marie Bataille n’utilise jamais le mot et rappelle que la pratique doit être complémentaire d’un traitement médical.

Une arnaque qui peut coûter cher

Pour rester dans la légalité, la terminologie utilisée est donc très importante. Elle donne l’impression d’avoir affaire à un véritable médecin, ce qui donne un certain ascendant sur les malades. Dans certains cas, des ondobiologues ont retardé les traitements médicaux nécessaires et conduit à l’aggravation de pathologies. Au-delà du côté médical, le préjudice financier peut être énorme. Certaines victimes ont perdu jusqu’à 10 000 euros (1,2 million de francs). Par intervention, les praticiens se font rémunérer plus de 7 000 francs par consultation et près de 60 000 francs pour une opération.

Mais les disciples de cette méthode sont en quelque sorte également des victimes. Pour devenir « stagiaires », ils doivent débourser la modique somme de 1 500 euros pour chacun des trois stages et 9 000 euros pour obtenir le diplôme final. Au total, devenir ondobiologue coûte la bagatelle d’un peu plus de 1,6 million de francs. Alors, juste un conseil, si l’on vous propose une consultation, passez votre chemin ou adressez-vous plutôt à un véritable médecin.

M.D.