Avec son service d’oncologie, la clinique traite mieux les cancers

L’équipe médicale a réuni la presse mardi 23 avril, pour informer les Calédoniens sur l’offre d’oncologie à Kuindo-Magnin. © C.M.

Une bonne nouvelle dans une période plutôt morose. La clinique Kuindo-Magnin dispose désormais d’un service d’oncologie avec pas moins de cinq spécialistes – « du jamais vu en Nouvelle- Calédonie » – et un partenariat avec l’emblématique centre métropolitain Gustave Roussy pour traiter tous les types de cancer.

Sous le patronage du docteur Drovetti, chef de service, les docteurs Matias, Torregrosa, Epail- lard et Nicolas, des oncologues l’ayant aidé à bâtir ce service au fil des mois. Ils ont principalement été formés en Métropole, ont officié dans de grands établissements en région parisienne ou encore à Marseille avec différentes spécia- lités – sein, gynécologie, digestifs, ORL, poumons, tumeurs urinaires, carcinomes, sarcomes, etc. – et sont intéressés par diffé- rents axes de recherche.

« Augmentation des cancers »

Le Dr Drovetti était, il y a six ans, le seul oncologue de la clinique, rejoint l’année suivante par le Dr Matias. Personnage assez « exceptionnel » de l’avis de ses collègues comme des patients qui se sont exprimés ces derniers jours, il avait « tout en tête » pour développer un service et s’est large- ment impliqué. Il y a deux ans environ, la clinique a été sensibilisée à « l’augmentation des cas de cancer » et a décidé de faire de l’oncologie l’un de ses deux services phares, avec les soins de suite et de réadaptation. « Nous avons 200 nouveaux cas de cancer du sein par an. Dans les années 2008-2010, c’était environ 100 », note le docteur Nicolas Epaillard. C’est le premier cancer féminin. Le plus fréquent, tous sexes confondus, est le cancer du poumon en raison du grand nombre de fumeurs (tabac, cannabis).

La clinique est passée de 15 lits d’hospitalisation conventionnels pour ces maladies à 25, dont une dizaine en soins palliatifs. « Ils sont toujours pleins, ce qui reflète les besoins du pays », expose le Dr Drovetti. Le chef de service a aussi développé la collaboration avec Gustave Roussy, centre d’excellence français et européen. « Roussy nous aide dans nos choix thérapeutiques. Et Roussy, on ne peut pas faire mieux. » Des réunions de consultations pluridisciplinaires tous les 15 jours (RCP Pacifique) permettent d’aborder le traitement des cas rares et complexes, et globalement de faire diminuer le nombre d’Evasan (1 000 dossiers depuis cinq ans pour cancer). Ils comptent désormais pour 15 % des cas selon les médecins.

Dépistages précoces, PET-SCAN…

Les projets sont nombreux pour cette équipe médicale. On peut citer la mise en place de consultations d’oncogénétique et de commissions d’éthique médicale. Prévus également, des essais cliniques pour des traitements ciblés à partir d’anomalies moléculaires, une application mobile pour améliorer la prise en charge quotidienne des patients, une plateforme de télésurveillance destinée aux professionnels de santé pour aider à mieux gérer les complications de leurs patients ou, encore, une étude sur le traitement des cancers du sein triple négatif par chimiothérapie et immunothérapie néoadjuvante.

Le développement de parcours de soins avec des techniques innovantes, comme l’immunothérapie, nécessiterait une « dream team » de spécialistes (oncologues, néphrologues, etc.) avec Gustave Roussy pour la prise en charge des effets secondaires. Pour des dépistages plus précoces, ils veulent instaurer le scanner des poumons une fois par an pour les fumeurs d’un certain âge, prônent un dépistage colorectal systématique, là aussi selon l’âge, et du mélanome et visent des diagnostics plus efficaces, par exemple sur les ganglions (technique développée par le gynécologue, Rémi Tetefort).

Ils souhaitent organiser des consultations avancées pour les patients du Nord « qui font parfois quatre, cinq ou six heures de voiture pour une consultation ou une chimiothérapie d’une heure » et proposer une expertise aux pays limitrophes. « Il y a en particulier une demande de Fidji où il y a zéro oncologue pour 900 000 habitants. Nous pouvons nous positionner », explique le Dr Drovetti. Enfin, ils espèrent que le territoire puisse obtenir un PET-scan, machine d’imagerie médicale complémentaire à l’IRM, échographie et scanner, principalement utilisée en cancérologie et dont l’usage impose de nombreux trajets hors territoire.

Le chef de service veut partager son espoir. « Nous sommes en mesure de proposer une prise en charge de très haute qualité et très rapide – de 48 à 72 heures – pour les patients envoyés par le biais des spécialistes et généralistes, et je veux rassurer les Calédoniens : nous ne partons pas, nous renforçons au contraire notre équipe. » Il fait état plus globalement d’une « révolution » en oncologie. « Nous avons sept patients guéris d’un mélanome métastatique. Il y a dix ans, c’était neuf mois de survie. Grâce à l’immunothérapie, on guérit. » Dans une dizaine d’année, avance-t-il, la plupart des cancers métastatiques seront traités « comme des maladies chroniques ».

Chloé Maingourd