Huit choses à savoir sur le VIH/SIDA

Une partie de l’équipe de Solidarité Sida à la clinique Kuindo-Magnin, vendredi 1er décembre, avec la présidente Dominique Solia (à gauche). L’association proposait une journée de dépistages rapides, gratuits et anonymes grâce au TROD (test rapide à orientation diagnostique). Réalisé par des médecins, il consiste à prélever une goutte de sang sur un doigt et donne un résultat en quelques minutes. (© A.-C.P.)

Pourtant mieux soigné, le VIH continue de faire peur et véhicule de nombreuses idées reçues, ce qui entrave sa prévention, notamment par le dépistage. À l’occasion de la Journée mondiale de lutte contre le Sida, vendredi 1er décembre, l’association Solidarité Sida y a dédié une journée à la clinique Kuindo-Magnin, afin de sensibiliser sur l’importance de ce geste, « pour soi et pour les autres ».

C’EST QUOI LE VIH/SIDA ?

Le VIH est le nom du virus de l’immunodéficience humaine. Une de ses caractéristiques est d’être silencieux. « Il peut être installé dans le corps et rester des années sans que rien ne se passe », introduit Dominique Solia, présidente de Solidarité Sida. Il affaiblit le système immunitaire en détruisant les lymphocytes T, des globules blancs essentiels à son bon fonctionnement, l’empêchant de se défendre contre les maladies opportunistes. « C’est cette phase-là qu’on appelle Sida. »

♦ COMMENT SE TRANSMET LE VIRUS ?

En Nouvelle-Calédonie, la transmission se fait quasi essentiellement par relation sexuelle, pénétration vaginale, anale ou buccale sans protection. « Si on retient cela et qu’on se protège, on arrête la transmission du VIH. » La difficulté, c’est qu’il y a eu tellement d’avancées dans la prise en charge de l’épidémie « qu’on a fini par la banaliser. On oublie que ça continue à se transmettre et qu’on peut encore en mourir si on laisse la phase Sida s’installer ».

♦ COMMENT S’EN PROTÉGER ?

En utilisant un préservatif masculin ou féminin. Dans le cas contraire, il faut faire un dépistage, indispensable pour être soigné. « Chaque année, des personnes dépistées tardivement endurent des hospitalisations longues avec leur processus vital mis en jeu », commente Frédérique Cid, chargée de mission de l’association. « En se dépistant, on s’aide soi et les autres, ajoute Dominique Solia, puisque la personne qui ne sait pas si elle est porteuse du virus peut potentiellement le transmettre. » Le problème, c’est que ce dispositif n’est pas assez utilisé, regrette l’association, par méconnaissance, peur du résultat, de la stigmatisation ou du rejet dont sont victimes les séropositifs.

♦ QUEL TRAITEMENT ?

Avant, un malade devait prendre 14 cachets par jour. « Aujourd’hui, c’est un. Il existe aussi le traitement par injection, une piqûre toutes les huit semaines. » Ayant beaucoup évolué, il est désormais considéré comme un outil de prévention. Il stoppe le développement du virus, abaisse la charge virale jusqu’à la rendre indétectable, et permet de sortir de la chaîne de transmission. Si cette maladie chronique peut avoir des répercussions – effets secondaires, fatigue, fragilisation… -, il est possible de bien vivre avec et l’espérance de vie est la même que pour une personnes non atteinte.

L’affiche de la campagne de promotion du dépistage.

♦ POURQUOI EST-IL TABOU ?

Parce que cela reste compliqué de parler de son intimité sexuelle. « Et l’idée que cela serait dû à une sexualité déviante, sale ou débridée, est bien ancrée », analyse Dominique Solia. Or, « la différence entre quelqu’un de séropositif et quelqu’un qui ne l’est pas, c’est le facteur chance ». Qui n’a pas vécu une fois où il n’a pas utilisé de préservatif sans connaître la sérologie de son partenaire ? « On est nombreux dans ce cas-là », rappelle la présidente. Enfin, il y a le fait que ce « qui est différent de moi me fait peur parce que je ne le comprends pas ».

♦ COMMENT VIVRE AVEC ?

Le plus dur, sur un petit territoire, est de vivre avec la crainte d’être découverts et de devoir subir « le regard discriminant qui existe encore », d’être ostracisés. Une disposition spécifique a donc été mise en place. « On ne donne pas le nom d’une personne qui a un test positif afin de préserver son anonymat. C’est elle qui choisira de le dire ou pas. » L’association suit de nombreux séropositifs qui choisissent de taire leur maladie, même à leur famille. Les préjugés restent tenaces. Cela empêche, entre autres, d’obtenir des témoignages, qui sont pourtant « la meilleure façon de faire de la prévention », parce que cela représente « une prise de risque social » pour les malades.

♦ QUELLES SONT LES IDÉES REÇUES ?

Une grande partie de la population pense que le VIH se transmet par la salive, la piqûre d’un moustique ou en serrant la main d’une personne vivant avec, indique Solidarité Sida. Un Calédonien sur quatre pense que se laver après l’acte sexuel est efficace contre le VIH. Selon une enquête de la CPS, 30 % des jeunes refuseraient de manger avec un séropositif. Toutes ces croyances sont fausses. Il n’est pas possible de l’attraper en parlant, touchant, serrant la main, côtoyant, embrassant, etc., une personnes atteinte. La maladie semble être de moins en moins bien connue, notamment par les jeunes. « Peut-être parce que moins de personnes en meurent et qu’on en parle moins. »

♦ POURQUOI UNE PRÉVENTION PLUS GLOBALE ?

« On ne peut pas faire de prévention uniquement sur le VIH, tout est lié », insiste Frédérique Cid, qui évoque les grossesses non désirées et les IST (infection sexuellement transmissible). « On sait que le préservatif n’est pas très utilisé quand on constate le grand nombre d’IST. Elles sont quatre à huit fois supérieures par rapport à la Métropole et sont une porte grande ouverte pour le VIH », parce qu’elles peuvent abîmer les muqueuses en engendrer des lésions génitales.

L’association parle de vie affective et sexuelle. Un point d’autant plus important dans un contexte d’alcoolisation et de violences. « On explique l’égalité homme-femme, le respect de son conjoint, du corps de l’autre, du consentement, on essaie d’apporter des savoir-faire, des ressources. Il faut que nos jeunes aient une sexualité sereine et plus sécuritaire. » Pas évident alors qu’ils sont de plus en plus nombreux à s’éduquer à la sexualité par la pornographie, constatent les deux professionnelles, où les violences et les stéréotypes sont davantage présents. « On est plutôt sur un constat très alarmant. »

 

22 000 dépistages effectués en 2023

291 personnes vivent avec le VIH

10 nouveaux cas environ sont recensés par an

20 % de personnes séropositives s’ignorent, soit plus de 50 personnes

52 % des nouveaux cas sont des jeunes et 48 % des quinquagénaires

 

Solidarité Sida : 24 15 17/87 38 32 ; solisida.dir@solisida.nc ; page Facebook.

Anne-Claire Pophillat