Un quasi-retour à la normale

C’est la reprise en Nouvelle-Calédonie. Une sortie de crise sanitaire qui fait remarquer que si pendant la gestion du Covid-19 un consensus politique a jailli, le retour à la normale a été un peu plus chaotique, avec la réapparition de voix restées muettes.

C’est un quasi-retour à la normale qui s’opère depuis lundi, même si la crise sanitaire laisse encore quelques traces comme le maintien des mesures de distanciation, le port du masque en certaines circonstances ou encore avec la fermeture de nos frontières en dehors des rapatriements et du fret. Une Calédonie qui s’en sort relativement épargnée d’un point de vue sanitaire dans ce monde qui lutte contre la pandémie et compte ses morts, mais une Calédonie qui doit se relever les manches pour relancer une économie déjà affaiblie avant l’apparition du Covid-19.

Des décisions unitaires et conjointes

Sur le plan politique, cette crise sanitaire a démontré que les décisions institutionnelles ont pris le pas sur la politique politicienne. Dès le confinement, un consensus a jailli, soutenant les actions du gouvernement et de l’État et renvoyant la question de la tenue du prochain référendum à plus tard.

Dès l’arrivée du Covid-19 sur le territoire, tous les partis se sont unis autour du gouvernement collégial pour tenter d’apporter leur soutien à la gestion de cette crise. Certains élus ont parlé d’union sacrée, d’autres d’unité territoriale ou encore d’unité calédonienne. C’est ainsi qu’au-delà des questions strictement sanitaires concernant les médicaments ou les masques, notamment, des premières mesures économiques à destination des petites entreprises ont été prises par la province Sud, tout comme les mesures de rapatriement des Calédoniens bloqués à l’étranger, jusqu’aux stocks d’hydroxychloroquine pour traiter ceux qui seraient atteints du virus.

Bref, un ensemble de mesures réalisées en étroite collaboration avec l’État et qui démontre bien à tous les Calédoniens que, sans la France, cette gestion de l’épidémie aurait pris une direction tout autre, aux lourdes conséquences sanitaires. Un État que les Calédoniens avaient, semble-t-il, un peu perdu de vue depuis quelques mois, référendum oblige, et qui est revenu sur le devant de la scène, même si les indépendantistes tentent aujourd’hui de détourner cette réalité.

L’union puis…

Du côté des indépendantistes, justement, si Roch Wamytan, par le biais du Congrès s’est rapidement rallié aux décisions du gouvernement, côté partis, l’UNI avait dégainé le premier en indiquant qu’il soutenait toutes les institutions dans leurs actions contre le coronavirus. Une unité saluée aussi par l’UC. Une unité qui a pourtant vite été bafouée dès l’annonce du déconfinement, faisant ressortir des voix discordantes au niveau du gouvernement.

Sous le prétexte que le Covid-19 était une maladie importée et de fait, que la gestion sanitaire ne concernait pas les Mélanésiens, les indépendantistes, muets pendant toute la crise, s’en sont pris jusqu’au haut-commissaire en l’accusant même d’avoir empiété sur les plates-bandes sanitaires de la Nouvelle- Calédonie ! Des indépendantistes qui ont donc repris, dès les premiers jours du retour à la normale, leurs habitudes politiciennes pour critiquer une nouvelle fois l’État, cette fois sur son prêt accordé pour redresser la situation économique et répétant qu’il aurait mieux valu faire un don ! Certains allant même jusqu’à dire que s’ils avaient eu les fonds disponibles, ils n’auraient pas eu besoin de la France. Avec des si…

Le poids des coutumiers

Cette crise sanitaire aura, en tout cas, mis en évidence le poids des coutumiers reléguant à l’arrière-plan les partis indépendantistes. Ils se sont immédiatement positionnés en prenant des mesures fortes, comme la fermeture de l’aérodrome de Lifou ou la mise en place de barrages routiers dans le nord du territoire pour éviter toute migration et contenir celle du virus. Les coutumiers se sont donné l’autorité sur leurs terres coutumières comme leur avis. Ils ont respecté leurs compétences, jusqu’au coup de gueule concernant l’éventuelle arrivée par avion de relèves militaires et administratives en Nouvelle-Calédonie. Un débordement qui a permis aux partis politiques, toutes tendances confondues, de leur rappeler qu’ils devaient rester dans le cadre strict de leur compétence, c’est-à-dire à leur place.

L’hyper provincialisation évidente

Cette crise sanitaire, gérée de manière institutionnelle, aura surtout mis en évidence le poids et le rôle déterminant des provinces. Qu’il s’agisse du Nord, des Îles et du Sud, toutes composantes associées aux décisions du gouvernement et de l’État, ce sont elles qui ont géré d’une manière autonome les problèmes spécifiques de leurs populations et au-delà.

Si la province des Îles a préféré s’isoler en laissant même son président, Jacques Lalié, un temps, sur la Grande Terre, la province Nord a défini son confinement aménagé et sa sortie comme bon lui semblait. La province Sud, la plus impactée économiquement (détenant 85 % du PIB du territoire) s’est démenée rapidement pour aider financièrement et logistiquement les administrés les plus touchés et les plus fragiles (petites entreprises, cartes A, gens de maison, stock de masques et médicaments, etc).

Chaque province a traité avec l’État selon ses besoins et ses volontés, jusqu’à mettre parfois en difficulté des mesures voulues par le gouvernement. Une hyper provincialisation affirmée qui laisse entrevoir, peut-être, le visage de la Calédonie de demain. En tout cas, les avis politiques sont unanimes, cette crise sanitaire a pu être gérée efficacement et rapidement grâce au soutien de la France avec le respect d’une large autonomie. Espérons que le Covid-19 nous épargne encore pour laisser la place maintenant à la relance économique dont le territoire a tant besoin.

D.P.

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