Un outil pour se mettre en lieu sûr en cas d’agression homophobe

Signaler des violences et permettre aux victimes d’agression contre les personnes LGBT de se réfugier dans un endroit sécurisé, c’est tout l’objet de l’application FLAG ! et En lieu sûr, présentée et mise en place sur le territoire par Diversités NC.

Trouver un refuge le temps de se remettre d’une agression. C’est tout l’enjeu de l’application En lieu sûr, lancée en Métropole par l’association FLAG ! (qui regroupe les personnes LGBT+ des agents des ministères de l’Intérieur et de la Justice, des pompiers et des policiers municipaux) et mise en place en avril dernier sur le territoire par Diversités NC, qui la présentait lundi matin.

Le concept ? Permettre aux victimes de violences, qu’elles se passent dans la rue, à la maison ou en entreprise, de se protéger en se mettant à l’abri dans un lieu sécurisé. Une cinquantaine font partie du dispositif pour l’instant. Pour ce faire, l’association travaille à nouer des partenariats sur l’ensemble du territoire avec le groupement des stations-service, des magasins, la Fédération des commerçants, les représentants de l’hôtellerie-restauration et des administrations. Leur rôle ? Accueillir, rassurer et alerter. Ce sont eux qui se chargent de prévenir les forces de l’ordre.

Une carte interactive

Une carte interactive disponible via l’application recense ceux qui ont intégré le dispositif. Et, sur le terrain, un sticker apposé sur la devanture garantit que la personne ne se trompe pas d’endroit. « Si on s’investit, il faut le faire jusqu’au bout, développe Laurent Garnier-Regãl, administrateur de Diversités NC. Certains gérants avaient dit oui et se sont finalement rétractés par peur pour leur commerce, il y a encore beaucoup d’hésitations et il y a une difficulté à être présent partout, notamment dans les îles. »

 

Les structures partenaires, recensées sur une carte interactive, doivent poser un sticker sur leur devanture afin d’être identifiables.

 

En lieu sûr vient compléter le dispositif FLAG ! actif depuis 2020 et qui permet de signaler tout acte de violence, que l’on soit victime ou témoin. L’application a été utilisée une dizaine de fois depuis son lancement. « Un tiers sont des victimes et deux tiers des témoins. La moitié sont des femmes et l’autre des hommes et les signalements ont concerné, à parts égales, la lesbophobie, l’homophobie et la transphobie, détaille Laurent Garnier-Regãl, qui indique que c’est un reflet tronqué de la réalité. Ces chiffres sont partiellement représentatifs puisque tout le monde ne se signale pas. Seulement 4 % des victimes d’injures osent se faire connaître et accompagner. » Or, il existe du « mal-être, des suicides, du harcèlement en entreprise, de l’exclusion de la famille, même s’il y a peu d’agressions directes dans la rue. Penser qu’il n’y a pas de problématique LGBTophobe est une fumisterie ». D’où un effort mené pour libérer la parole.

« Sortir en ayant moins peur »

FLAG ! permet enfin de qualifier la nature de l’agression LGBTophobe, ce qui est important car, en cas de plainte, c’est une circonstance aggravante, précise l’adjudante Annabelle Lepez, responsable de la Maison de confiance et de protection des familles de la gendarmerie.

Pas de doute. Pour Lou Pidjot, présidente du Congrès des jeunes, cette application est nécessaire. « Je pense que ça peut aider les personnes victimes de violences sexuelles, physiques ou morales, il y a beaucoup de transsexuels et d’homosexuels qui en souffrent et je pense qu’ils vont se sentir un peu entendus et plus en sécurité dans la société. On pourra sortir en ayant moins peur de se faire agresser ou critiquer ou de ne pas, tout simplement être acceptés, dans un magasin ou un restaurant, ce qui arrive. »

 

L’application FLAG ! est disponible sur Apple et Android. Pour rejoindre le réseau des partenaires En lieu sûr : diversitesnc.enlieusur@gmail.com ou 97 62 64.

 


Écoute, accompagnement, formation : les actions de Diversités NC

Créée en 1998, Diversités NC a pour objet d’accompagner les personnes LGBT et de faire avancer leurs droits. Dans son local de l’Orphelinat, l’association reçoit, répond aux appels, organise ses interventions en milieu scolaire et ses formations, suit les groupes de parole qu’elle gère ainsi que ses partenariats.

Dernièrement, c’est avec le CTOS, Comité territorial olympique et sportif, que travaille Diversités NC. « Dans le milieu du sport, il y a encore des croyances sur les pratiques d’animation d’une équipe, la virilité, la représentation machiste avec des phrases du type ‘on n’est pas des pédales’, explique Laurent Garnier-Regãl, administrateur de Diversités NC. Cela empêche le bien-être et la visibilité des joueurs LGBT qui seraient dans l’incapacité d’être ce qu’ils sont. » L’association forme aussi les encadrants et participe à des groupes de travail.

D’autres partenariats existent avec la Maison de confiance et de protection des familles, le collectif Handicaps, la Ddec (enseignement catholique), le gouvernement, SOS Écoute, l’Adavi (droit et aide aux victimes), CP2S (comité pour la promotion de la santé sexuelle) et Solidarité sida.

 

Diversités NC lutte pour le droit des personnes LGBT depuis plus de vingt ans.

 

Une difficile acceptation

Diversités NC soutient également les établissements scolaires dans leur prise en charge d’élèves homosexuels ou transsexuels. « Même si, parfois, certaines directions ou APE ne veulent pas qu’on intervienne. Il y a encore des réticences. » Le sujet reste délicat à aborder. « Il y a davantage de compréhension et de connaissance, mais en termes d’acceptation, c’est autre chose… »

Laurent Garnier-Regãl parle « d’invisibilisation » de ces personnes confrontées à une pression culturelle, familiale, religieuse, etc. « Il y a des cas d’astiquage, de mariage forcé, d’exclusion, certaines se mutilent, voire se suicident. Et il y a la question d’hommes ou de femmes homosexuelles de droit coutumier, qui n’est pas trop abordée. »

Ce mal-être et ces souffrances poussent certains à penser à quitter le territoire « parce qu’ils craignent pour leur vie », témoigne Laurent Garnier-Regãl. Diversités NC a lancé une enquête à laquelle quelque 250 personnes ont répondu. « Environ trois quarts d’entre elles disent qu’elles tiendront compte de leur quotidien dans leur vote au référendum et craignent que le résultat n’influe sur le maintien de leurs droits. »

Concernant ces droits, justement, s’ils ont évolué, ce n’est pas toujours évident. Exemple, la loi de bioéthique, qui élargit la procréation médicalement assistée (PMA) aux femmes seules ou homosexuelles. « Ce n’est pas facile de la retranscrire ici. Et puis il y a des problèmes techniques. La clinique de la fertilité est fermée par défaut de praticien, même si une personne doit arriver, donc il est compliqué de faire les actes, et pour la PMA, il y a besoin d’un donateur, donc il faudrait avoir une filière pour conserver les gamètes. »

 

Anne-Claire Pophillat (© A.-C.P.)