Un grand chef sur le caillou

L’établissement de formation professionnelle des adultes a fait venir le très célèbre chef Michel Sarran, du 6 au 10 février. L’occasion pour le chef d’un restaurant deux étoiles et jury de l’émission Top chef de découvrir les chefs et les amateurs calédoniens ainsi que les produits qui font notre terroir.

Les cuisines étaient en ébullition cette semaine. Et pour cause, le grand chef deux étoiles Michel Sarran était en visite sur le caillou pour une petite semaine. Pas question de vacances pour cette personnalité bien connue des métropolitains pour être un des membres du jury de la célèbre émission culinaire Top chef. Michel Sarran a répondu à l’invitation de l’établissement de formation professionnelle des adultes (EFPA), ex-ETFPA, qui organisait l’événement pour marquer la réouverture de sa filière de formation tourisme-hôtellerie-restauration.

L’établissement qui avait ouvert son premier plateau technique hôtellerie en 1976 avait dû le fermer en 2015. Le conseil d’administration a toutefois rapidement décidé de sa réouverture. Pour Jean-Christophe Cardeilhac le directeur de l’EFPA, la venue du chef étoilé répond à un triple objectif. Celui de « marquer le coup », dans une premier temps, et dans un second, « de permettre à nos chefs et nos stagiaires de côtoyer l’excellence pendant quelques jours », souligne le directeur.

Un outil pour la filière tourisme-hôtellerie-retauration

Pour l’EFPA, il y a également un enjeu de montrer sa capacité à financer des opérations permettant précisément d’offrir le meilleur à ses stagiaires dans le cadre d’un partenariat public-privé. On notera la participation d’un nouveau sponsor, Newrest, spécialisé dans la restauration collective. Une participation qui peut s’expliquer par les négociations actuellement en cours entre le groupe déjà implanté dans près de 50 pays et la Restauration française en vue de son rachat. Pas de hasard en cuisine, Michel Sarran est également partenaire du groupe.

Mais le grand chef français n’est pas venu parler de restauration collective aux chefs calédoniens qui étaient invités à venir travailler une journée avec lui en cuisine, accompagnés de stagiaires de l’EFPA. Une journée de rencontres qui a bien sûr été marqué par les désormais incontournables « seflies » mais surtout par les échanges en matière de cuisine. Et les acteurs de la gastronomie calédonienne du Nord et du Sud ont massivement répondu à l’appel. Autour des fourneaux, des chefs de toutes la Grande Terre et tous horizons. Des plus installés au plus jeunes, des grandes tables au tout petit restaurant d’une dizaine de couverts. Pour Henri Jewine, par exemple, le chef de la Néa, à Koné, cette journée était l’occasion de voir comment le chef arrive à marier les produits calédoniens à la cuisine française.

En creux, un des autres objectifs de l’opération est de mettre en valeur la Nouvelle-Calédonie et son terroir. C’est toute la mission que se sont fixés les Toqués du caillou, association dont le but est de faire d’assurer la promotion touristique de la Nouvelle-Calédonie au travers de ses produits, sa cuisine et ses acteurs. Quoi de mieux pour séduire les touristes que de soigner leurs estomacs ? C’est bien l’avis de Michel Sarran qui estime si les visiteurs viennent en Calédonie, c’est notamment pour découvrir la cuisine, un morceau de « culture française calédonienne ».

C’est l’association qui s’est chargé du programme du chef sur le territoire. Au menu, rencontres avec les chefs, avec des particuliers tirés au sort, des élus ainsi que des producteurs. Michel Sarran a ainsi pu se rendre chez Ghislain Santacroce, figure du mon de l’élevage calédonien et président du conseil d’administration de l’Ocef. Le chef a également pu découvrir la vanille de Julien Pascal, médaillée d’argent au concours général agricole en 2016.

Opération séduction

Et si les Toqués du caillou ont mis les petits plats dans les grands, ce n’est pas sans une petite arrière-pensée. Charmer le membre du jury de Top chef serait peut-être la clef pour attirer l’émission sur le caillou et faire en sorte qu’une manche y soit organisée. Les retombées seraient considérables mais on n’ose tout de même pas trop espérer, la logistique d’un tel programme étant colossale.

D’un point de vue plus calédonien, la relance d’une formation continue en tourisme-hôtellerie-restauration répond à d’importants besoins. Une étude commandée en 2015 par l’EFPA a permis de mettre en lumière les carences en matière de formation dans la filière. Des carences qui pénalisent les professionnels qui ont du mal à recruter. Le plateau a donc vocation à devenir un outil pour les acteurs, invités à se l’approprier. Il devrait devenir un lieu de rencontres et d’échanges, permettant autant la montée en compétences que le recrutement de personnels opérationnels, complémentaire des formations initiales proposées par les lycées professionnels.

 


L’EFPA, un centre de formation pour accéder à l’emploi

L’EFPA permet de former environ 400 stagiaires par an dans des domaines aussi divers que les transports, la logistique, le bâtiment ou encore la maintenance. Les formations qualifiantes permettent d’acquérir des titres reconnus par le gouvernement et l’Etat. Les formations étant continues, il arrive que les formateurs interviennent directement sur les lieux de travail de façon à éviter les interruptions de travail. Sur les 400 stagiaires, une centaine relève du dispositif SPOT qui s’adresse à des personnes à partir de 17 ans et sans qualification. L’idée est de donner aux stagiaires tous les prérequis pour l’accès à l’emploi tels que l’hygiène, la sécurité ou le respect des consignes.

La qualité dans nos assiettes

La gastronomie passe avant tout par la production de bons produits. De nombreux acteurs travaillent dans ce sens, qu’ils s’agissent des services techniques des provinces qui aident accompagnent les agriculteurs ou encore les différents réseaux de professionnels ou association comme Biocaledonia. L’association délivre le label de qualité Bio Pasifika, un label propre aux territoires du Pacifique et qui, comme son nom l’indique, a vocation à promouvoir la qualité en plus du bio. Petite particularité de l’association, la certification se fait après des visites d’inspections effectuées par un producteur et un consommateur. Une manière d’apporter un regard un peu différent des professionnels. De manière plus générale, les élus ont saisi l’importance de valoriser les produits, raison pour laquelle une loi du pays a été votée, le 12 janvier, officialisant six signes de qualité (dont certains existent depuis près de dix ans). Ces signes permettent de différencier les productions et donc les prix, l’idée étant qu’en produisant mieux, les producteurs peuvent gagner davantage.

La vanille cherche l’excellence

En 2016, Julien Pascal a démontré tout son savoir-faire en matière d’affinage de vanille en décrochant une médaille d’argent au concours général agricole de Paris. Le jeune producteur a d’emblée souhaité se positionner sur un marché haut-de-gamme. Enorme avantage, les produits s’écoulent plus facilement et à meilleur prix. Il faut dire que les gousses contiennent 4,6 % de vanilline, contre 1,2 % pour les gousses malgaches et 2 % en moyenne. En dehors du concours agricole de Paris, le producteur travaille avec Pascal Barbot, chef trois étoiles au guide Michelin ou encore Roellinger épices, un des plus grands noms des épices au monde. Si elle est encore peu connue, la vanille calédonienne commence à se faire un nom. Et l’on devrait en entendre parler dans les années à venir. Julien Pascal a été chargé par la province Sud de monter sur pied une filière d’excellence, notamment avec des producteurs de l’Île des Pins. Partis à huit, la filière du Sud comptera cette année 26 producteurs. Julien Pascal estime qu’elle sera mature d’ici à cinq ans et en mesure d’exporter.