Un bon repas, une bonne action

Depuis mardi 2 mai, le café solidaire ouvre ses portes le matin, du lundi au samedi, de 7 h 30 à 13 heures.

La Banque alimentaire a ouvert son café solidaire samedi 22 avril à la Vallée-du-Tir, à Nouméa. Chaque jour, un chef et des bénévoles élaborent un repas avec des invendus. Chaque plat acheté permet d’en financer un pour les personnes démunies.

« Un vrai bonheur. » Betty Levanque affiche, comme à son habitude, un large sourire, samedi 22 avril, lors de l’ouverture du café solidaire He Tāngata, entre les rues Unger et Berthelot, à côté de l’OPT. Le concept s’inspire du café suspendu, tradition napolitaine du milieu du XXe siècle : un café acheté, un offert aux plus démunis. L’aboutissement de trois ans de travail pour la présidente de la Banque alimentaire. « Cela a été compliqué. » Un certain soulagement de voir se concrétiser un tel projet, mais non sans « douleur ». Et « le début des soucis, car c’est un énorme enjeu et un sacré engagement pour le faire tourner ».

La matinée est une réussite. Aux fourneaux, des bénévoles de la Banc et de la Néo Calédonienne Gymnastique aux côtés du chef Sam. Au menu : poulet rôti aux herbes de Provence, sauce « umami bomb » « qui claque en bouche » avec ail, soyo, gingembre, tomates et champignons, le tout accompagné de riz pilaf. Samuel Machon imagine ses recettes à partir des produits donnés à l’association. « On fait de la vraie cuisine. C’est comme dans un restaurant il y a le même plaisir et attachement à la qualité. »

Dans les arrière-salles, l’équipe s’affaire. Une énorme marmite de sauce repose sur la gazinière. Plusieurs commis découpent la volaille, cuite dans de grands plats au four. D’autres mettent en barquette. Des desserts réalisés par Ludovic Pannier (Chocolats Morand) sont également proposés. Les clients prennent à emporter ou mangent sur place, discutent autour d’un café. Dans la petite cours, vingt place assises.

« ON FÉDÈRE PAR L’ALIMENTATION »

L’objectif de vendre 250 repas à 1 000 francs est largement dépassé. De quoi s’acquitter du loyer du local, mis à disposition par la SIC. Et redistribuer 250 repas aux centres communaux d’action sociale de Nouméa, Dumbéa et du Mont-Dore, à la mairie de Païta, ainsi qu’à l’association Un Sandwich pour autrui. Ce n’est qu’un début. Betty Levanque ne livre pas son premier combat. Sa ténacité paye. Quelques jours plus tard seulement, une cheffe est embauchée. Joselita Caune est secondée par des bénévoles et, bientôt, deux services civiques en cours de recrutement viendront les rejoindr

Une façon de faire de la politique pour cette femme engagée. « C’est ça le destin commun, on fédère par l’alimentation. Ceux qui ont achètent pour aider ceux qui sont dans le besoin. On estime à 10 000 le nombre de personnes précaires dans le Grand Nouméa. » Autre effet positif : la lutte contre le gaspillage alimentaire et pour la préservation de l’environnement. « Produire de la nourriture nécessite beaucoup de moyens. »

Un message de « solidarité, générosité et partage » que Betty Levanque souhaite transmettre à la jeunesse. Elle en profite pour lancer un appel au mécénat et aux bénévoles afin de leur prêter main forte dans cette aventure.

Joselita Caunes, au centre, est la cheffe du café solidaire. Elle accueillait ses premiers clients mardi 2 mai. (© Banc)
♦ Samuel Machon, chef
« C’est une réjouissance »

« Je trouve ça bien de participer à ce genre d’engagement, et cela prend encore plus de sens aujourd’hui. Après, ça demande du temps. J’ai bloqué une semaine pour préparer l’ouverture. Cela fait plus d’un an qu’on travaille dessus, il a fallu remettre aux normes, acheter du matériel, obtenir l’agrément d’hygiène… Alors ce matin, après plusieurs reports, c’est une réjouissance absolue, un contentement. »

♦ Cédric Chenevier, bénévole
« Aider les gens »

« À partir du moment où on peut le faire, il faut aider les gens, donner le peu que l’on a pour soutenir les autres. On en aura peut-être besoin un jour nous aussi. Je ne suis pas un habitué de la cuisine, mais je me suis vite mis dans le bain et ça me plaît. C’est une grande joie d’ouvrir le café, parce que cela représente des années de travail. »

♦ Inès Guttierez et sa fille Alicia, bénévoles
« Donner du temps aux personnes en difficulté »

« C’est un projet qui nous tient à cœur, alors on est contents. J’ai ressenti le besoin, pendant le Covid, de développer un intérêt sociétal. J’ai décidé de me dégager du temps et d’en donner aux personnes qui sont en difficulté. Et ma fille m’a suivie. C’est important, cet engouement de la jeunesse. Il faut toucher le maximum de gens. »

 

⇒ He Tāngata

Le nom du café solidaire a été donné en hommage à l’ancien consul général de Nouvelle-Zélande Bruce Shepherd, qui a soutenu le projet et est décédé brutalement d’une crise cardiaque en 2020. « He Tāngata signifie l’homme avec un grand H placé au centre de la communauté », explique Betty Levanque, présidente de la Banc.

Anne-Claire Pophillat (© A.-C.P. et Banc)