Trois émouchets bleus libérés, délivrés

Ces actions au parc provincial des Grandes Fougères sont facilitées par la reprise de la gestion du site par la Direction du développement durable des territoires de la province Sud, depuis le 1er janvier 2022. / © E.B.

Après les chouettes et les colliers blancs, trois rapaces endémiques ont été relâchés au parc des Grandes Fougères, vendredi 18 août. D’autres opérations de ce type devraient être renouvelées cette année.

Ils se rappelleront de ce vendredi comme du premier jour du reste de leur vie. 8 heures. Trois émouchets bleus du parc provincial zoologique et forestier s’apprêtent à effectuer un long voyage.

Enfermés dans leur cage, ils montent en voiture aux côtés de Béatrice Jeannin, soigneuse du parc, et prennent la direction de Farino. Du bruit, de la circulation, une mini prison. Deux longues heures stressantes mais au bout du tunnel : la liberté. Il est 10 heures lorsque les caisses sont posées à même le sol. Les oiseaux viennent d’arriver au parc provincial des Grandes Fougères. Ils aperçoivent leur nouvelle maison à travers les grilles. Leur petit cœur bat à vive allure. Bientôt, ils feront partie de ce paysage. « Les émouchets sont les seuls rapaces endémiques à la Nouvelle-Calédonie », introduit la soigneuse devant une poignée de visiteurs.

L’émouchet bleu est une espèce protégée. Il est interdit de le chasser, de le capturer ou de l’approcher. © E.B.

Les oiseaux s’excitent, impatients de sortir. « On a une femelle qui est arrivée au parc zoologique et forestier suite à des blessures. En général, les rapaces, quand ils sont blessés, soit ils ont été attaqués par d’autres rapaces, par des chiens ou des animaux, soit ils ont subi un choc frontal avec une voiture », poursuit-elle. Dans la deuxième boîte, on observe deux jeunes émouchets nés en janvier. Leur plumage est entièrement marron, le dessous blanc strié de grosses taches brunes. « On voit très bien la différence avec un adulte. Le juvénile a une autre couleur jusqu’à ses huit mois à peu près. D’ailleurs, on le confond souvent avec l’émouchet gris. »

RETOUR À LA VIE SAUVAGE

Les présentations sont faites. La soigneuse ne fait pas durer le suspense plus longtemps. « On va les relâcher si vous êtes d’accord ? » Béatrice Jeannin tient l’un des loquets dans sa main. Gaëlle Kasovimoin, agent d’accueil et d’animation du parc des Grandes Fougères, tient le deuxième. Clac. Les portes s’ouvrent en même temps. Les trois oiseaux hésitent quelques secondes avant de prendre leur envol, sans se retourner. Tous les yeux sont rivés vers le ciel. Les émouchets choisissent rapidement une branche sur laquelle se poser. Béatrice Jeannin ne cache pas son émotion. « On nous apporte régulièrement des animaux blessés. Dans le meilleur des cas, on arrive à les sauver. C’est une fierté de réussir à les soigner, les remettre sur pied, et après, les relâcher. C’est une belle histoire. »

Le rapace s’observe facilement dans le parc des Grandes Fougères. / © E.B.

Ce ne sont pas les rapaces qui diront le contraire. Eux qui commençaient à se trouver à l’étroit dans leur volière à Nouméa. Ils vont maintenant devoir se réadapter dans ces 4 000 hectares de forêt tropicale humide, au milieu de leurs congénères et des plantes endémiques. Leur instinct sauvage devrait vite refaire surface. « La femelle avait déjà vécu dans les grands espaces, elle va montrer l’exemple aux juvéniles. »

Est-ce qu’ils donneront des nouvelles ? Les bagues qu’ils possèdent aux pattes joueront leur rôle. « On va pouvoir les repérer, il y aura un suivi régulier », assure Gaëlle Kasovimoin. Les promeneurs n’ont plus qu’à tendre l’oreille et rester attentifs. Au milieu du cagou, du notou et du pigeon vert, ils pourraient bien, maintenant qu’ils les connaissent, reconnaître en un coup d’œil ces oiseaux tout aussi chouettes.

Edwige Blanchon

Les juvéniles ont un plumage entièrement marron et le dessous blanc strié de grosses taches brunes. / © E.B.

Pièce d’identité

Nom :

Accipiter haplochrous

Nom vernaculaire :

Émouchet bleu

Statut :

l’espèce est protégée en province Sud et en province Nord.

Taille :

de 31 à 38 centimètres Poids:de180à300g

Couleur :

bleu ardoise sur la tête, la queue et la partie haute. Le reste du corps est blanc. Le bec et les pattes sont jaunes. Il possède une petite collerette grise.

Habitat :

« C’est un oiseau commun sur toute la Grande Terre », informe Isabelle Jollit, guide spécialisée en ornithologie. Il évolue dans les milieux ouverts et la forêt dense. « On le voit aussi bien au parc de la Rivière bleue qu’à Deva. » Il s’agit du seul rapace calédonien observé chassant sous la forêt dense, indique le site endemia.nc

Alimentation :

l’émouchet se nourrit de rats, de reptiles et d’autres volatiles. « C’est un oiseau incroyable. Comme il est petit, il est très agile, il va très vite. Je l’ai déjà vu s’attaquer à des cagous et à des notous. Il a une vue bien perçante », décrit Isabelle Jollit.

Reproduction :

de novembre à janvier. La femelle pond deux à trois œufs « blancs comme neige ». À savoir : la femelle est plus grande que le mâle.

Nidification :

cet oiseau retrouve son nid durant plusieurs années, un épais tapis de brindilles et de feuilles situé en hauteur dans les arbres.