Taekwondo : le dernier rêve olympique de Thierry Coleux

Membre fondateur de la Fédération française de taekwondo, conseiller technique régional, Thierry Coleux officiait lors des derniers championnats du monde, en mai, en Azerbaïdjan. (© World Taekwondo)

Au mois de décembre, l’arbitre de taekwondo disputera l’épreuve qualificative pour Paris 2024. Une deuxième participation aux Jeux, après Pékin en 2008, serait l’apothéose de près de 35 ans au service de son sport.

Soixante arbitres ont rendez-vous à Manchester (Angleterre) en fin d’année. Au dernier jour de l’épreuve, on distribuera 34 « mercis » et 26 « félicitations ». Thierry Coleux connaît la chanson. Cravate soigneusement nouée, barbichette impeccable, concentration maximale, il fera de son mieux pour obtenir son billet pour Paris 2024. Ce sera difficile, comme toujours.

De Sydney 2000 à Tokyo 2021, il a échoué cinq fois aux portes des Jeux. Il les a franchies une fois, à Pékin, en 2008. « C’était énorme. » La rigueur le fascine. « On était logés à part. Zéro sortie, zéro contact avec les officiels et les délégations. Pas de copinage. L’enjeu est trop important. Si on voit une photo de toi, t’es mort. »

GUIDÉ PAR BRUCE LEE ET JUANTORENA

Thierry Coleux rêve des anneaux olympiques depuis 1976, année d’immortalisation du coureur cubain Alberto Juantorena et de sa foulée prodigieuse. « Quand je l’ai vu, je me suis dit : « Je ne sais pas comment je vais faire, mais il faut que j’aille aux JO ». »

Cette même année, le maître coréen Kwon Bong Sik arrive à Nouméa avec, dans ses bagages, le taekwondo. Le « karaté volant », comme on l’appelait alors, lui plaît immédiatement. « On regardait les films de Bruce Lee, on sautait partout, on avait envie de donner des coups de pied comme lui ! »

Taekwondoïste de niveau national, Thierry Coleux n’aura pas sa chance en tant qu’athlète : sa discipline n’entrera aux Jeux qu’en 2000, près de dix ans après son passage à l’arbitrage et à l’entraînement.

Thierry Coleux, c’est l’histoire du taekwondo calédonien.

« LA RÉCOMPENSE DU TRAVAIL DE TOUTE UNE VIE »

Henri Jouanno, président de la Ligue calédonienne de taekwondo, est de tout cœur avec Thierry Coleux. S’il est sélectionné cette fois-ci, ce sera au nom de la Nouvelle-Calédonie. « Il tient à représenter son pays, et c’est très important pour nous aussi. Thierry, c’est l’histoire du taekwondo calédonien. Ce serait la récompense du travail de toute une vie, d’un sacerdoce », qui l’a amené à entraîner des générations de combattants.

Axel Raymond, son protégé pendant 14 ans, doit sa carrière de sportif de haut niveau à son goût de l’excellence. « Il était très dur. Il habitait au 6e kilomètre. Mon frère et moi, aux tours de Saint-Quentin. Il venait nous chercher en footing. On allait à la salle de la SLN, et on revenait en courant », se souvient le président du Koryo, le club de Dumbéa, où Thierry entraîne toujours. Les enseignements du maître 7e dan ont largement dépassé les tatamis. « Si j’ai avancé dans ma vie personnelle, c’est aussi grâce à lui. Il a été un second papa. J’étais un petit con, il m’a recadré, il m’a mis dans le droit chemin. »

DERNIÈRE CHANCE

Ces louanges ne pèseront nullement dans la balance lors des sélections olympiques. À Manchester, seules compteront la condition physique ‒ « si tu as plus de 14 de tension, tu dégages » ‒ et la compétence. « Et il faudra accepter la décision, comme toujours. »

Pour Thierry Coleux, c’est la dernière chance. Les 29 années d’arbitrage international commencent à se faire sentir. « Il y a de la fatigue. Et puis j’ai passé plus de temps dans les avions qu’avec ma famille. »

Bientôt, le retraité de l’administration pénitentiaire aura davantage de temps pour chasser et pêcher chez lui, à La Foa. Mais rien ne presse : il est disposé à attendre la fin d’année prochaine, après Paris 2024.

Gilles Caprais