Réforme du Ruamm : les chiffres

Les indépendantistes accusent les organisateurs de la mobilisation anti-réforme de faire de la « désinformation ». Les chambres consulaires et les organisations patronales y voient une attitude « injurieuse ». Voici les chiffres du projet défendu par l’Éveil océanien.

LE RUAMM PERD 10 MILLIARDS PAR AN

En 2021, les dépenses du Régime unifié d’assurance maladie maternité (Ruamm) s’élevaient à 88 milliards de francs, dont 23 milliards pour les hôpitaux, 50 milliards pour les prestations du privé, 3 pour les dépenses de gestion par la Cafat, etc.

Ses recettes principales sont les cotisations sociales (58 milliards dont 6 venant des indépendants et 52 des salariés) et les apports de la Nouvelle-Calédonie. Son déficit annuel est de 10 milliards. La dette totale du Ruamm, que le gouvernement évalue à 44 milliards, est principalement supportée par l’hôpital public, et par les provinces dans une moindre mesure.

116 000 TRAVAILLEURS CONCERNÉS PAR LA RÉFORME

La réforme concerne tous les travailleurs : les 68 000 salariés du privé, les 21 900 salariés du public (dont 8 600 contractuels) et les 26 000 travailleurs indépendants. Elle propose d’aligner par le haut la couverture maladie, et d’« homogénéiser » les cotisations à un taux unique de 13,5 %, ce qui doit rapporter 5,5 milliards au Ruamm. Pour combler le reste du déficit, il faudra notamment réduire les dépenses de santé, via le plan Do Kamo par exemple.

SALARIÉS : LA PLUPART GAGNERONT 1 %

Pour un emploi du privé, la cotisation représente 15,5 % pour les salaires bruts jusqu’à 513 900 francs, puis 5 % au-delà de ce seuil. Le passage à 13,5 % sera une augmentation de salaire de 1 % pour ceux qui gagnent moins de 830 000 francs. Pour les autres, le salaire diminuera.

Pour l’employeur, la réforme diminuera de 1 % les cotisations patronales pour les salaires jusqu’à 586 000 francs. Dans la fonction publique, les cotisations passeront de 14 % à 12 %, avec des effets similaires.

 

13,5 %

Le taux unique de cotisations voulu par la réforme du Régime unifié d’assurance maladie maternité (Ruamm).

 

LES INDÉPENDANTS COTISERONT DAVANTAGE

Les patentés bénéficient de taux de cotisation préférentiels, consentis lors de la création du Ruamm, en 2002. À couverture sociale égale, un patenté cotise moins qu’un salarié. Le manque à gagner pour le Ruamm est compensé chaque année par la Nouvelle- Calédonie via les impôts et les taxes, à hauteur de 4 milliards de francs.

Pour un bénéfice toutes charges déduites (30 % du chiffre d’affaires, au régime du forfait) de 200 000 francs par mois, la cotisation représente entre 5 % (10 000 francs par mois) et 7,5 % (15 000 francs), selon la couverture sociale choisie. Après la réforme (13,5 %), elle s’élèvera à 27 000 francs.

Pour un bénéfice de 800 000 francs, la cotisation mensuelle va de 51 700 à 62 800 francs. Après la réforme, elle grimpera à 108 000 francs. Un travailleur indépendant qui gagne moins que le salaire minimum agricole (140 280 francs) est couvert par l’aide médicale gratuite, il ne cotise pas.

EXONÉRATIONS : VERS UNE PROFONDE RÉVISION

Milakulo Tukumuli (Éveil océanien) assure que pour soutenir les petits revenus, une solution sera trouvée en 2023 dans le cadre de la révision des dispositifs d’exonération de cotisation, qui coûtent 1,7 milliard, et dans lequel il voit des anomalies.

Il en existe deux : la réduction sur les bas salaires, pour les revenus inférieurs à 1,3 SMG, et les secteurs aidés. Hôtellerie hors Grand Nouméa, agriculture, gens de maison et petite enfance bénéficient de 75 % d’abattement de cotisations, quel que soit le montant des revenus.

UN EMPRUNT DE 25 MILLIARDS ?

Le deuxième volet du plan, défendu en 2021 par Thierry Santa, repris par l’Éveil océanien, est un crédit de 25 milliards, qui doit soulager la trésorerie du Ruamm, et lui permettre de payer une grande partie de ses dettes envers l’hôpital. Pour financer cet emprunt à 4 %, un impôt devra être créé : la Contribution au remboursement de la dette sociale calédonienne (CRDSC), un prélèvement de 0,24 % sur les salaires, 0,15 % sur les retraites, 0,48 % sur les revenus du capital, et +0,6 % pour l’impôt sur les revenus de valeurs mobilières (IRVM). Son rendement annuel attendu est 1,6 milliard.

Gilles Caprais

Photos © G.C.

Après une première journée de mobilisation mardi 28 février, près d’un millier de personnes se sont réunies sous les fenêtres du gouvernement, rue Gallieni à Nouméa, mercredi 8 février pour protester contre la réforme du Ruamm.
Les manifestants ont répondu à l’appel du collectif Agissons solidaires, qui regroupe les chambres consulaires, les organisations patronales et une vingtaine de structures professionnelles. De l’autre côté de la rue, une contre-manifestation visant à soutenir le président Mapou a rassemblé une cinquantaine de personnes.