Quelles conséquences sur l’économie locale ?

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Elle se déroule à l’autre bout du monde, mais la guerre entre la Russie et l’Ukraine devrait tout de même avoir des répercussions sur l’économie calédonienne. Une onde de choc qui pourrait se faire ressentir sur le prix des matières premières, dont celui du pétrole, mais également de certaines denrées.

♦ Flambée du prix des matières premières

La Russie et l’Ukraine ne sont pas de grands partenaires économiques de la Nouvelle-Calédonie et le territoire devrait donc être épargné par les pénuries. Mais la guerre se situe en Europe, cette zone économique où se trouvent bon nombre de fournisseurs qui approvisionnent le marché local, ce qui pourrait perturber l’importation de certains biens. L’escalade dans le conflit ainsi que les sanctions économiques de l’Union européenne et d’autres pays du globe contre la Russie affolent d’ores et déjà les cours sur les marchés internationaux. « Avec la crise sanitaire, il y avait déjà une tendance à l’inflation. Elle risque d’être accentuée par la guerre, explique Samuel Gorohouna, économiste à l’université de la Nouvelle-Calédonie. Les prix des matières premières seront les plus fortement impactés, ainsi que ceux des biens transformés, produits grâce à de l’énergie. »

♦ Gaz et pétrole

La Russie, qui fournit environ 40 % du gaz européen, est aussi l’un des plus grands exportateurs de pétrole. Si le carburant de Nouvelle-Calédonie vient principalement d’Asie et que son approvisionnement ne risque donc pas d’être directement perturbé, la guerre a dès maintenant un impact sur les cours mondiaux, ce qui devrait notamment continuer de faire grimper les prix à la pompe.

♦ Greniers à blé

À eux seuls, la Russie et l’Ukraine représentent près de 30 % des exportations mondiales de blé. Les deux États pèsent également lourd sur le marché du maïs, du tournesol, de l’orge ou encore du colza. Quelques heures seulement après le début de l’invasion russe, le prix du blé atteignait déjà des records.

Même si l’an passé, 3,6% seulement du blé importé sur le Caillou provenait d’Ukraine, cette inflation touchera directement l’alimentation animale et porterait donc un nouveau coup à un élevage local déjà en difficulté. Du blé que l’on retrouve aussi dans les produits transformés tels que les pâtes, la farine ou le pain. Des denrées dont le coût de production devrait logiquement augmenter avec, in fine, un impact sur le prix de vente à la caisse.

Autre secteur concerné, celui des engrais, notamment à cause de l’envolée du prix du gaz, nécessaire en Europe pour en produire. « Et puis l’Ukraine est l’un des principaux fournisseurs d’urée. Il devrait logiquement y avoir des conséquences ici », assure Gérard Pasco, président de la Chambre d’agriculture.

♦ Du bon pour le nickel ?

Le géant russe Norilsk Nickel assure près de 10 % de la production mondiale du métal vert. Or, en raison des risques de pénurie ‒ notamment au cas où l’Union européenne déciderait de boycotter le nickel russe ‒, les cours du ferronickel ont repris de la vigueur. Une situation qui pourrait, peut-être, profiter aux producteurs calédoniens. « Mais les potentiels effets positifs sur le prix du marché seront à contrebalancer par les coûts de toutes les autres matières premières et notamment ceux de l’énergie, tempère Guillaume Verschaeve, directeur général de la Société Le Nickel. Il n’est pas vraiment possible à ce stade de déterminer si l’impact sera positif ou négatif. »

 


Le trafic aérien perturbé

Avec la fermeture du ciel russe, les compagnies aériennes effectuant les trajets Europe ‒ Corée du Sud, Japon ou Chine ‒ Europe se retrouvent obligées d’adapter leurs plans de vol. Une situation qui affecte directement les Calédoniens, qui transitent le plus souvent vers le Japon et traversent l’espace aérien russe pour relier le Caillou à la Métropole.

Pour le moment, les avions d’Air France évitent la casse moyennant quelques heures de vol supplémentaires, mais Finnair et KLM ont annoncé qu’ils annulaient leurs liaisons vers ces destinations jusqu’à dimanche, en attendant de trouver une solution pérenne. Les clients en correspondance sur ces compagnies devraient toutefois être réacheminés sur les vols Air France.

Surcoût de carburant

Si le conflit russo-ukrainien venait à durer, les compagnies européennes devraient donc faire un détour par l’Asie Mineure et l’Inde pour desservir le Japon, la Chine et la Corée, ce qui devrait allonger les temps de vol d’une à deux heures. Un surcoût de carburant ‒ couplé à une envolée possible du prix du pétrole ‒ qui pourrait également pousser les compagnies à augmenter leurs tarifs et ainsi perturber la reprise d’un trafic encore fragilisé par la crise sanitaire.

 

Titouan Moal (Illustration Shutterstock)