Prony Resources : l’État en première ligne

Après un record à 32 000 tonnes de nickel contenu en 2023, PRNC vise une production de 40 000 tonnes cette année. Le mois de janvier est encourageant avec un rendement de 3 600 tonnes. (© Archives Y.M.)

La présidente de la province Sud, Sonia Backès, a présenté un plan de sauvetage de Prony Resources NC prometteur. L’accord du prêt de 140 millions d’euros (16,7 milliards de francs) permettrait cependant à l’État de disposer des 74 % du capital de l’industriel.

L’annonce au micro de l’assemblée de la province Sud a surpris son monde jeudi 15 février, les élus, les analystes comme les salariés de la société. La présidente Sonia Backès a détaillé le plan de sauvetage de Prony Resources New Caledonia. L’opérateur du Sud, dont le rendement est établi à 32 000 tonnes de nickel dans le produit intermédiaire NHC en 2023 ‒ un record ‒, a tout de même accusé une nouvelle perte estimée à 12 milliards de francs, et se retrouve à court de trésorerie. Comme ses confrères de Vavouto et Doniambo, le complexe hydrométallurgique, malmené par le retournement du marché, voit ses jours comptés. Si des perspectives de rétablissement sont tracées, comme s’en félicite Sonia Backès, le bout du tunnel n’est pas encore atteint.

L’État, premier créancier de PRNC, a avancé deux aides cumulables sur la table : une subvention annuelle sur l’énergie de 40 millions d’euros (4,8 milliards de francs), à condition que le « pacte sur le nickel » voulu par le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, pour relancer la filière, soit signé, et un prêt de 140 millions d’euros. En contrepartie, l’État a demandé la création d’une fiducie, c’est-à-dire un contrat intégrant la cession de biens comme garantie, composée des 19 % au capital du négociant mondial des matières premières Trafigura, des 30 % de la Compagnie financière de Prony (CFP), et enfin 83 % des 30 % détenus par la SPMSC, entité représentant les trois provinces, soit 25 %. Au total, l’enjeu porte donc sur 74 % des parts des actionnaires.

Selon des échos, le remboursement de cet emprunt de 140 millions d’euros devrait intervenir en mars 2025. Mais, si tel n’est pas le cas à l’échéance fixée, les actions pourraient revenir à l’État. Et dès la signature du prêt, ce même État aurait la possibilité de choisir, seul, le repreneur des fameux 74 % du capital au prix décidé par Paris. Trafigura, qui aurait pourtant réalisé des marges commerciales très confortables sur la production du Sud, ne veut pas financer le complexe métallurgique pour éviter le prêt. La CFP et la SPMSC n’en ont pas les moyens. À PRNC donc de rembourser l’emprunt.

HUIT À NEUF MOIS CLÉS

Première remarque, le groupe de trading Trafigura souhaite-t-il réellement partir ? Et le partenariat avec le géant Tesla peut-il être renouvelé ? Seconde observation : le prêt de 140 millions d’euros, en cas de signature sous peu, ne permettrait à Prony Resources New Caledonia de tenir que jusqu’en octobre, voire novembre, et encore à condition que le cours du nickel au LME, la Bourse des métaux de référence, se maintienne autour des 16 000 dollars US la tonne. Ce qui laisse huit à neuf mois pour trouver un repreneur des 74 % du capital. La mission a été confiée à la banque Rothschild. L’État aura son mot à dire. L’important étant de sauver l’usine du Sud.

L’investisseur intéressé par les atouts du site de Prony, parmi lesquels cette production de NHC connectée au marché des batteries pour véhicules électriques, acquerrait ces 74 % contre une somme bien modeste. En revanche, ce groupe s’engagerait à apporter les fonds nécessaires au fonctionnement pérenne de PRNC. Quelques centaines de millions de dollars US, selon des experts.

Le vœu de l’État, affiché dans le projet de pacte sur le nickel et relatif à l’approvision- nement de l’Europe en métaux critiques, se concrétisera-t-il ici par l’arrivée d’un industriel français, allemand ou italien ? À condition qu’une raffinerie voit le jour dans « le vieux continent ».

Yann Mainguet

L’Usoenc veut des actions d’urgence

La sous-traitance de KNS craint des effets catastrophiques après l’annonce du retrait de Glencore et la mise en sommeil à chaud du site. Membre du comité technique de la cellule de soutien et d’accompagnement de la filière nickel, l’Usoenc invite à prendre des mesures d’urgence « pour sauver nos usines ». Primo, « dégager une enveloppe budgétaire pour pouvoir aider les entreprises en difficulté », note Alexis Falematagia. Mais face à la probable insuffisance de ces soutiens des collectivités calédoniennes, le syndicat demande à l’État « de transposer » ses aides déployées lors de plans de sauvegarde de l’emploi.

Secundo, l’Usoenc propose « un aménagement temporaire du code minier sur les ressources géo-graphiques métallurgiques. Il faut exporter » du minerai brut « sous certaines conditions ». Au-delà d’une mutualisation des moyens entre les usines pour faire baisser les coûts, les représentants de l’Union pensent à l’instauration d’« un plan d’investissement clair et constant dans l’outil de travail », parce que « les usines sont vieillissantes ».

Premières mesures du comité technique

La cellule de soutien et d’accompagnement, initiée par le gouvernement, a réuni en début de semaine son comité technique. Première mesure : le recensement des entreprises et salariés touchés afin de leur faciliter l’accès aux dispositifs d’aide existants. Parallèlement, ce groupe identifie les chantiers publics pouvant être lancés à court terme pour compenser la perte d’activité et s’attache à simplifier les démarches administratives pour leur permettre d’atteindre ces marchés.