Patrice Faure : Une mission à part

Après sa septaine à l’hôtel, le nouveau haut-commissaire de la République, Patrice Faure, a pris officiellement ses fonctions. Celui qui va devoir gérer le troisième référendum et la période post-référendaire a effectué son premier geste public samedi. L’État a choisi un profil particulier pour une mission qui l’est tout autant…

C’est en déposant une gerbe au monument aux morts pour la France, place Bir-Hakeim, samedi, en présence des associations patriotiques, des élus et des représentants des institutions que Patrice Faure a officialisé sa prise de fonction. Puis, en début de semaine, il s’est rendu au Sénat coutumier et a participé à sa première réunion du gouvernement hors visioconférence. Il se rendra à Lifou jeudi.
Si cette nomination n’est pas une surprise sachant que Paris a toujours nommé un nouveau représentant de l’État à chaque préparation référendaire, elle revêt un caractère particulier en cette sortie de l’Accord de Nouméa.

Préparation

Patrice Faure aura pour première mission de préparer, en seulement six mois, la troisième consultation. Paris a misé sur un personnage reconnu pour son efficacité, compte tenu de la singularité du contexte. On attend de lui, par exemple, qu’il mette tout en œuvre pour éviter les débordements qui se sont produits autour des bureaux de vote lors du deuxième référendum, en 2020.

Sur la préparation référendaire, Patrice Faure a expliqué qu’il devait rencontrer tous les représentants politiques et les acteurs de la vie institutionnelle ou civile. Il a exprimé son objectif de garantir le dialogue, la production du document sur les implications du « oui » et du « non », l’organisation du prochain Comité des signataires et la troisième consultation. Il a aussi indiqué, lors de la séance du 16e gouvernement de mardi, qu’il souhaitait l’installation du nouvel exécutif.

L’après-référendum

Patrice Faure aura une deuxième mission. Il devra représenter l’État sur le territoire dans la période post-référendaire, quel que soit le résultat. C’est lui qui devra préparer le lendemain de l’Accord de Nouméa, dès le 13 décembre donc, et ce, jusqu’au 30 juin 2023,

pour mettre en œuvre « le projet consensuel », selon les termes employés par le ministre des Outre-mer, Sébastien Lecornu. Cette période servira à acter les nouvelles institutions de la Nouvelle-Calédonie, aborder et définir les sujets vitaux pour l’avenir, comme les inégalités sociales et économiques, le système éducatif, la poursuite du rééquilibrage, etc.

Il devra dans un cadre ad hoc participer pour l’État aux discussions avec les forces politiques calédoniennes qui mèneront au référendum de projet, voulu par la France, et qui portera sur le développement de la Nouvelle-Calédonie et ses futures institutions dans la République française si le non l’emporte le 12 décembre prochain ou sur la Constitution du nouvel État en cas de victoire du « oui ».

Un agent « très spécial »

La troisième mission serait beaucoup moins « publique ». Patrice Faure, rappelons-le, est issu de la DGSE (Direction de la Sécurité extérieure), les renseignements de la France. Il a également été chef du cabinet militaire du ministère des Outre-mer de 2004 à 2006. Des cordes à son arc que n’avaient pas ses prédécesseurs et qui tombent à point nommé dans le contexte géostratégique du Pacifique.

On sait que depuis la période référendaire, Pékin lorgne sur le devenir calédonien. Selon certaines sources, Paris vient d’en prendre toute la mesure et craint désormais une campagne d’influence plus marquée en faveur de l’indépendance avec des visées dans les mines de nickel, mais surtout sur un ancrage militaire et géopolitique dans cette région du globe. Le Vanuatu voisin en est l’exemple et les indépendantistes l’ont d’ailleurs bien compris. Ils commencent à s’en servir dans la balance des négociations post-référendaires.

Compte tenu de ce contexte géopolitique, la France reste donc très vigilante face aux visées chinoises, tout en visualisant également l’intérêt croissant des États-Unis dans cette zone d’influence. Le choix d’un profil comme Patrice Faure s’expliquerait donc aussi par ces aspects moins flagrants…


Convocation du Congrès

Suite à la demande du haut- commissaire, les élus du Congrès sont convoqués, mercredi 23 juin, en séance publique et extraordinaire afin de rendre un avis sur le projet de décret portant convocation des électeurs et organisation de la consultation sur l’accession à la pleine souveraineté de la Nouvelle-Calédonie.

D.P.