Opération séduction pour Vale-NC

Antonin Beurrier et Sonia Backes se sont exprimés, jeudi dernier, lors d’un point presse à l’issue de la commission plénière à la province Sud.

Antonin Beurrier, le président du conseil d’administration de Vale-NC a rencontré, le 13 février, les élus de la province Sud pour une séance de questions-réponses dédiée l’avenir de l’usine. Difficultés financières, plan social, nouvelle stratégie, l’exercice pédagogique avait aussi pour objectif de rassurer avant le passage de relais. Trois repreneurs pourraient être intéressés pour le rachat.

Alors que l’entreprise a perdu, l’an dernier, plus de 20 milliards de francs, le PDG de Vale-NC, Antonin Beurrier, a fait part du « besoin impérieux de changer la stratégie économique et commerciale ». C’est donc une refonte totale à laquelle il faut s’attendre. L’objectif consiste à faire coexister un modèle métallurgique à 85 % avec un modèle minier à 15 %, à baisser drastiquement les coûts et à conquérir de nouveaux marchés. Bref, il s’agit de montrer que l’entreprise peut être rentable afin d’attirer de nouveaux repreneurs. « C’est un challenge extraordinairement difficile, car il faut tout changer. Si on a un grain de sable, on sera en grave difficulté. »

Vale-NC change de visage

C’est quasiment une nouvelle entreprise qui va naître dans les six prochains mois. 40 % de l’usine devrait disparaître dont la raffinerie, jugée très coûteuse et peu rentable. « Malgré nos efforts, (…) la maîtrise opérationnelle n’a pas permis de baisser son coût », selon le président de Vale-NC. Elle sera donc prochainement fermée, vidée et sécurisée en attendant la décision définitive du futur actionnaire. Malgré ce changement radical, Vale-NC continue d’investir à l’échelle de 12 milliards de francs a n d’assurer la mise en conformité de tous les équipements, sécuriser les cuves, installer de nouveaux filtres-presses, nécessaires à la mise en œuvre de sa nouvelle stratégie.

Un nickel moins cher à produire

En réalisant ces coupes budgétaires, Vale-NC espère diminuer les coûts de production du nickel de 20 % ainsi que le prix du nickel produit. L’objectif est de passer de 20 000 dollars la tonne en 2019, à 12 000 dollars la tonne cette année.

Des étapes nécessaires avant l’export des saprolites

L’exploitation minière devrait être réorientée sur les latérites tandis que les saprolites, plus riches en magnésium donc plus difficile à intégrer dans les procédés locaux (y compris ceux de la SLN et KNS), devraient être exportées vers le Japon ou la Corée. Sauf que pour le moment, l’entreprise n’a pas obtenu les autorisations d’exportation. Pour mener à bien ce projet, « Il faut faire évoluer le Code minier et créer une redevance pour permettre aux Calédoniens de s’y retrouver », précise Sonia Backes, présidente de la province Sud, lors du point presse de jeudi dernier.

À la conquête d’un nouveau marché

Vale-NC souhaite se positionner sur le marché pour les batteries des véhicules électriques en doublant sa production de NHC, (nickel hydroxide cake). « Les clients sont prêts à payer plus cher ce produit-là qui coûte moins cher à produire et, en plus, on sait bien le faire », assure Antonin Beurrier. Aujourd’hui Vale-NC en produit 15 000 tonnes par an et devrait doubler la capacité cette année.

Le projet Lucy est maintenu

Le projet Lucy d’assèchement des résidus, annoncé il y a quelques mois, se met progressivement en œuvre et ne devrait pas s’interrompre. La n travaux de génie civil est prévue mi-mai et les premiers résidus devraient être placés au pied du barrage au cours du deuxième trimestre de cette année. Une discussion avec les repreneurs sera nécessaire pour établir un nouveau calendrier. « Le financement est assuré par Vale, qui étudie en parallèle une possibilité de partenariat industriel avec d’autres groupes », explique le PDG de Vale-NC.

140 licenciements annoncés

Cette mutation a de lourdes répercussions sociales puisque environ 140 personnes devraient être licenciées. La liste a été annoncée vendredi dernier, comme prévu. « Elle comporte une centaine de noms, mais elle est provisoire, car nous ne sommes pas tout à fait d’accord avec les choix qui ont été proposés par Vale-NC. Nous y travaillons », précise Pierre Tuiteala, du Soenc Nickel. Même son de cloche du côté de l’USTKE. « Nous restons prudents, nous voulons vraiment limiter la casse. Cette liste reste provisoire, mais il y a une bonne coordination avec la direction de Vale-NC donc nous sommes confiants », assure Pascal Pujapujane. Les personnes de moins de 50 ans qui seront licenciées partiront avec huit mois de salaire contre onze mois pour les plus de 50 ans. « Il y aura également un impact sur les contrats de sous-traitance, revus fin mars début avril », a annoncé Antonin Beurrier.

Vale-NC veut rassurer sur le volet environnemental

Cette séance plénière était aussi l’occasion de rassurer les élus sur la question environnementale. La rupture du barrage au Brésil, provoquant la mort de 270 personnes et des dégâts considérables, il y a un an, est encore dans toutes les têtes. Là encore, le PDG de Vale-NC a joué la carte de l’apaisement, garantissant la solidité de l’ouvrage dans le Sud calédonien. « Le barrage n’est pas construit pareil, tout est conforme, (…) nous avons des inspections mensuelles. Par ailleurs, nous le suivons le suivons en temps réel. (…) Il est parmi les barrages les plus sûrs au monde ».

Trois racheteurs potentiels

Trois offres de rachat se dessinent déjà, mais le passage de relais devra respecter un calendrier assez précis. Fin février, les candidats doivent soumettre leur offre. « Ce n’est pas uniquement un prix commercial, c’est aussi un projet social et environnemental. » La province, le gouvernement et l’État veilleront au grain. Fin mars, le groupe Vale devrait engager une sélection parmi les candidats. Une signature pourrait être envisagée n juin, mais il faudra attendre la fin de l’année pour que la transition soit mise en œuvre.

V.G.

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