L’UC donne le ton et pose ses conditions

L’Union calédonienne prépare sa stratégie dans la perspective de la reprise des discussions sur l’avenir de la Nouvelle-Calédonie avec l’État après les échéances nationales. Daniel Goa, reconduit dans ses fonctions, a annoncé la couleur à Voh.

Le président de l’Union calédonienne a été élu pour un onzième mandat, lors du 52e Congrès du parti qui s’est tenu du 1er au 3 avril à Voh. Le bureau politique a été reconduit dans son intégralité. Daniel Goa en doutait fortement, étant confronté en interne à une lassitude de la jeune garde. Mais, visiblement, il a été décidé de miser sur la continuité en cette période cruciale.

Le représentant l’avait fait comprendre lors du comité directeur du parti le mois dernier : c’est la position la plus dure que va prendre l’UC pour son entrée en négociation. Et à Voh, le président a asséné un discours particulièrement tranchant.

La France « ne fait pas mieux » que l’Allemagne nazie

On retiendra, en premier lieu, ses propos sur l’histoire « peu glorieuse » de la France, son « impérialisme omnipotent ». « Elle a, en 2022, le même comportement que l’Allemagne nazie en 1940 ou celui de la Russie poutinienne en Ukraine », a-t-il déclaré. Des comparaisons hasardeuses qui ont fait réagir, notamment, le parti Générations NC de Nicolas Metzdorf évoquant une « véritable honte ».

Le ressentiment domine toujours dans les rangs de l’UC contre l’État et l’organisation du troisième référendum, un « flop monumental », une « immense gabegie » et, surtout, une « faute politique majeure de la France » qui s’est départie de sa neutralité.

Le président l’a réaffirmé : cette terre restera à jamais une terre kanak. Et il a posé ses jalons. Le parti ne négociera pas pour un référendum de projet et ne discutera que du processus d’émancipation. Sur la base de sept points : la voie vers cette émancipation avec une date irréversible, le maintien du processus onusien de décolonisation jusqu’à son terme, les bénéfices des ressources naturelles et des outils de production au pays, l’irréversibilité des acquis en particulier le corps électoral provincial, le contentieux colonial pour le peuple premier puis les victimes de l’histoire, l’évaluation de la dette coloniale, la formation des élites.

Mise en garde

En attendant, Daniel Goa observe que les représentants de la droite locale n’acceptent toujours pas le fait majoritaire, l’exercice de la démocratie et continuent de les traiter avec « mépris » et « arrogance ». Il rappelle que les indépendantistes gèrent désormais la plupart des institutions et fait le pari que la « dernière forteresse » tombera aux législatives et sénatoriales si les militants choisissent l’option d’une participation.

Il a laissé entendre que l’État était en train de manipuler les Calédoniens « en impliquant pernicieusement la société civile (NDLR : dans les discussions sur l’avenir) pour mieux nous diviser et régner ». Selon l’UC, ce serait un moyen de ramener par la petite lucarne 41 000 Français dans le corps électoral. « Pourquoi l’État remettrait-il en cause (le gel électoral) pour une poignée de Français en mal de vivre (…) ? L’État souhaiterait-il nous recoloniser ? »

Enfin, le président a aussi invité les « amis océaniens », désormais « dans la case et pas en dehors », à comprendre que leur place est « avec nous et pas au-dessus de nous ». « Il est temps qu’il y ait une réciprocité constante et stable », a-t-il asséné. Voilà qui promet des échanges ardus dans les prochains mois.

 


Pour le RDO, il faut un président au FLNKS

Le Rassemblement démocratique océanien s’est réuni en congrès à Dumbéa le samedi 2 avril. L’ensemble du bureau politique a été renouvelé et Aloisio Sako demeure président. Le RDO a redit sa contestation du troisième référendum et est dans l’attente du recours formulé par le FLNKS. Il réaffirme que l’Accord de Nouméa est toujours légitime.

Le parti redit que le FLNKS doit nommer un président qui pourra porter la voix des indépendantistes auprès de l’État dans cette période charnière. « Il permettra d’établir une meilleure gouvernance,
car culturellement et coutumièrement, sans leader, sans un chef de file, la division nous guette. »

Le RDO a renouvelé son soutien au projet de société défendu par le FLKNS, la construction d’une société pluriculturelle autour de l’identité kanak, une répartition équitable des richesses. Dans la vision de la pleine souveraineté, le parti insiste sur le développement de l’économie bleue, verte, la sécurité alimentaire. Enfin, il invité l’ensemble des Océaniens à être solidaires envers le peuple autochtone.

 

Chloé Maingourd (© Archives DNC/C.M.)