L’OPT veut atteindre les « meilleurs standards »

L’Office des postes et télécommunications a présenté son plan stratégique jusqu’en 2025. L’établissement public veut se replacer dans une dynamique de croissance et hisser la Nouvelle-Calédonie « à la pointe du progrès technologique ». Le déploiement du second câble sous-marin a commencé cette semaine.

Questionné sur la performance de son modèle économique et son monopole, l’Office des postes et télécommunications a engagé une nouvelle stratégie élaborée après une large consultation du monde politique, économique et social, de ses collaborateurs et ses clients. « L’OPT doit se réorganiser, se moderniser, répondre technologiquement aux attentes de tous ses clients et être un accélérateur de développement économique », renseigne Yoann Lecourieux, président du conseil d’administration.

Le plan prévoit une réorganisation interne par pôle de métiers sous la houlette d’un cabinet de conseil, la poursuite de l’aménagement du territoire, le développement des services lui permettant de continuer à s’autofinancer et de répondre, justement, aux besoins des clients. Ce plan est structuré autour de plusieurs grands chantiers porteurs, répartis sur trois ans.

Câble sous-marin

Mercredi 16 mars, le René Descartes a atterré Picot-2, le câble domestique, à Ouémo, qui doit apporter la fibre optique à près de 9 000 personnes sur l’île des Pins, Maré et Yaté. Le réseau, avec Gondwana-2, coûte 4,5 milliards de francs, financés sur fonds propres, via un prêt de l’AFD, une aide exceptionnelle de l’État et la défiscalisation.

 

L’installation du second câble sous-marin est engagée. Ce réseau est composé du câble international Gondwana-2 reliant Fidji et du câble domestique Picot-2 connectant Maré, Lifou, l’île des Pins et Yaté. Au total, 1 700 km de câble ont été acheminés depuis Suva à bord du câblier René Descartes, un navire de la flotte d’Orange marine. L’atterrage de Ouémo a marqué, mercredi 16 mars, le lancement du câble domestique et celui de Nouville, programmé le mardi 22 mars, marquera le lancement du câble international. Il sera déroulé durant un mois, jusqu’à fin avril, « à la vitesse d’un bateau » jusqu’à Fidji.

Suivront trois mois de tests et une mise en service en août, qui induira la commercialisation de nouveaux services et des baisses de tarifs. « Ce câble, résume Auxence Faffin, directeur général adjoint, permet de lutter contre la fracture numérique, d’améliorer la résilience du réseau calédonien, notamment en cas de coupure terrestre lors d’un évènement cyclonique, de sécuriser nos communications internationales et de favoriser le rayonnement numérique de la Nouvelle-Calédonie dans la région en créant une route Pacifique avec Wallis-et-Futuna et la Polynésie française. » Localement, on notera que le bouclage numérique précédera le bouclage électrique du territoire (presque achevé sur le dernier tronçon Thio-Canala).

Très haut débit

L’OPT va accélérer la couverture du territoire en très haut débit, mobile et fixe. En 2023, tous les sites mobiles seront équipés en 4G. En 2025, l’objectif est d’offrir une couverture en 4G à 98 % de la population et de déployer également la 4G+ et la 5G sur les sites à fort trafic ou d’intérêt économique.

Sur le réseau fixe, l’OPT va accélérer les raccordements à la fibre avec un objectif de 40 000 clients fibrés cette année, soit plus de la moitié. Fin 2023, les quatre communes de l’agglomération, Nouméa, Mont-Dore, Dumbéa et Païta, seront raccordables. Enfin, 100 % des clients seront raccordés en 2025 dont 25 % à 1Gb/s. Le rythme est actuellement de 1 000 clients par mois, indique Philippe Gervolino, le directeur général de l’OPT.

Sur cette base, l’office promet, dès cette année, de nouveaux forfaits Mobilis permettant des débits « trois à quatre fois supérieurs aux offres actuelles », une refonte complète de l’offre « Liberté » qui concerne plus de 150 000 clients. En juillet, une application Mobilis sera mise en service pour suivre sa consommation, ses factures, faire des changements d’abonnement, etc. Plus tard, elle concernera également la téléphonie fixe. Il y aura, par ailleurs, de nouvelles offres professionnelles de téléphonie illimitée. Enfin, l’OPT travaille au déploiement du réseau mobile « internet des objets ».

 


Maintien des services financiers

Le vaste programme de transformation vise à répondre aux besoins des clients.

 

Les services financiers sont également déficitaires. Ils font perdre environ 1,8 milliard de francs par an à l’OPT. N’étant pas un établissement bancaire, l’office n’est pas autorisé à accorder des prêts, seuls à même de rapporter de l’argent.

Pour la première fois, fin 2019, l’OPT a néanmoins fait l’objet d’un contrôle de l’IGF, l’Inspection générale des finances, puisque certaines de ses activités relèvent du système bancaire. L’établissement était loin de respecter les obligations légales visant à prévenir les risques de blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Il a fait l’objet d’un rappel à l’ordre de l’ACPR, l’Autorité de contrôle de la Banque de France.

Un plan de médiation et de « correction » a été mis en œuvre pour un coût de 1,2 milliard de francs sur les trois prochaines années et l’office a été condamné à verser une amende de 150 000 euros, une somme jugée « symbolique », « pour dire que le plan aurait dû être mis en place il y a plus de dix ans » et reconnaissant également la particularité de l’OPT en tant que service public (il risquait beaucoup plus). « Au final, on s’est posé la question de tout arrêter, explique Yoann Lecourieux. » L’objectif est maintenant de mieux réglementer le secteur, de rationaliser et d’améliorer les services qui ont finalement tous été maintenus.

 


Une activité postale déficitaire

À l’OPT, ce sont les télécommunications qui permettent de soutenir les secteurs de la poste et des services financiers. L’activité postale est déficitaire à hauteur de 1,9 milliard de francs par an. « Une dynamique de progrès et de digitalisation » est annoncée dans la distribution, le traitement du courrier-colis avec une recherche de nouvelles marges de manœuvre financières par de nouveaux services et des ajustements tarifaires.

Mi-2023, la livraison de colis à domicile ou au bureau sera proposée aux Calédoniens dans certaines zones urbaines, tandis que d’autres modes de livraison sont à l’étude, comme les points relais. Un portail des services postaux comprendra de nouvelles fonctionnalités aussi bien pour les particuliers que les professionnels.

L’OPT envisage aussi d’ouvrir ses agences à ses partenaires. « En Brousse, une agence OPT est souvent le point de commercialité principal ou unique, note Philippe Gervolino. Donc on pourrait imaginer demain de pouvoir accueillir des services externes. »

 

Chloé Maingourd (© A.-C.P. et Emmanuel Righetti)