Les rouleurs obtiennent un accord

Après une semaine de blocage des concessionnaires, les rouleurs ont finalement obtenu un accord grâce à la médiation du gouvernement. L’ensemble des camions a obtenu les attestations nécessaires pour poursuivre le travail. Le protocole d’accord va toutefois plus loin puisqu’il dessine les pistes de travail pour structurer la profession.

En 2015, le conflit des rouleurs avait mis la profession sous le feu des projecteurs ainsi que leurs difficultés. Le roulage est pourtant une activité clef dans la mine. Sans ces camions, le minerai ne sortirait tout simplement pas du sol calédonien. Si le personnage du rouleur était devenu presque mythique pendant le boom du nickel des années 60, le retour à la normale avait replongé le métier dans l’ombre et, ces dernières années, la course à la compétitivité a renforcé sa fragilité. En 2015, une des principales revendications des rouleurs en 2015 était de définir une stratégie pour le nickel. Une manière pour eux de gagner en visibilité, les perspectives étant d’assez court terme.

Mais l’avenir de la profession ne sera finalement pas écrit au travers de la stratégie nickel. Le conflit engagé lundi 11 juin entre les rouleurs et les concessionnaires portait sur les capacités de chargement des camions. Selon les rouleurs, pendant des années, la règle était qu’il n’y en avait pas, y compris après 1989, date de l’adoption de la délibération applicable aujourd’hui en matière de poids de charge. Depuis 80 ans que le roulage existe, résume Max Foucher, le président du syndicat ContraKmine, chacun a fait ce qu’il a voulu.

Une activité économique importante

En décembre 2017, un accident sur la mine de l’Étoile du Nord, à Kaala-Gomen, conduit au décès d’un rouleur. Cet événement tragique pousse les autorités à s’intéresser à cette question des poids de charge. Des dysfonctionnements sont alors mis au jour et notamment le fait que bon nombre de camions ne disposent pas des documents nécessaires pour assurer leur conformité par rapport aux tâches qu’ils effectuent. Les rouleurs pointent la responsabilité des concessionnaires. Depuis quelques mois, des discussion ont été engagées par le syndicat ContraKmine afin d’éviter la cessation d’activité de nombreux propriétaires de camions.

Pour un grand nombre de ces chefs d’entreprise, la baisse de tonnage s’est traduite par une baisse des capacités de 30 tonnes à 21 tonnes et de 25 tonnes à 11 tonnes, soit une diminution des chiffres d’affaires de l’ordre de 30 à 50 % (ces manques à gagner seront pris en charge par les mineurs). La situation était devenue intenable, expliquant le blocage des concessionnaires. Les rouleurs réclamaient des attestations de la part des constructeurs stipulant que les rouleurs pouvaient embarquer sans risque les tonnages pour lesquels les camions avaient été vendus.

C’est chose faite pour la grande majorité des camions. Pour les autres, les concessionnaires se sont engagés à la place des constructeurs. Ils endosseront ainsi les responsabilités en cas de problème. Les camions vont donc pouvoir reprendre le chemin des mines. Et l’enjeu était de taille puisque le gouvernement recense près de 250 rouleurs sur l’ensemble du territoire. De son côté, le ContraKmine estime que les investissements du roulage sont de l’ordre de sept milliards de francs.

Structuration de la profession

Le protocole d’accord engage également le gouvernement qui devra adapter la réglementation et plus particulièrement pour les rouleurs qui doivent emprunter une portion de voie publique. Au cas par cas, des conventions devront être passées avec les collectivités propriétaires des routes. Le principe de la convention prévoit que ce sont les mineurs qui prendront en charge le financement du renforcement des chaussées, de façon à éviter les dégradations des ouvrages. Les négociations ont par ailleurs débouché sur l’ajout d’une seconde partie au protocole d’accord. L’idée est de structurer et de sécuriser une profession qui est restée trop longtemps dans le flou.

Les pistes de travail sur lesquelles devront plancher le gouvernement portent notamment sur l’établissement de contrats commerciaux en bonne et due forme entre les rouleurs et les mineurs. Une formation « de roulage de descente » devrait être créée et dispensée par le Centre de formation aux techniques de la mine et des carrières, à Poro. Le protocole envisage aussi le renouvellement des camions de roulage. Le ContraKmine aura la responsabilité de soumettre aux concessionnaires un cahier des charges qui précisera les besoins techniques des rouleurs. Le financement pourrait enfin être simplifié, notamment au travers de négociations avec les organismes de financement. Le gouvernement s’est également engagé à demander à l’État de considérer le roulage comme une activité minière et non plus de transport. Une différence qui permettrait ainsi aux rouleurs l’accès à la défiscalisation nationale.

M.D.