« Les joueurs du Pacifique apportent du spontané au XV de France »

Frédéric Pomarel (à droite), directeur technique des ligues outremers, au côté d’Etuato Mulikihaamea, membre du comité directeur de la Fédération. / © G.C.

Présente à Nouméa la semaine dernière, la délégation de la Fédération française de rugby a insisté sur les qualités physiques, mentales et techniques qu’apportent les joueurs et joueuses de Wallis-et-Futuna et de Nouvelle-Calédonie aux équipes de France.

  • OMNIPRÉSENTS DANS LES ÉQUIPES

Frédéric Pomarel a fait les comptes. Dans le groupe des 33 joueurs présélectionnés pour la coupe du monde, les outre-mers étaient « le territoire le plus représenté ».

Encore mieux : « il n’est pas une équipe de France, des U18 aux seniors, garçons et filles, sans joueur véritablement issu de la formation ultramarine », constate le directeur technique des outremers, qui s’incline devant le travail des formateurs. Satisfait du pôle espoirs de Nouméa, créé en 2017, il travaille actuellement à l’ouverture d’une structure équivalente à Wallis-et-Futuna.

  • « UN PATRIMOINE GÉNÉTIQUE HORS DU COMMUN »

Peato Mauvaka et Sipili Falatea, pour ne citer qu’eux, sont à la fois costauds et explosifs. Dans le Pacifique, « il y a un patrimoine génétique hors du commun, qui est reconnu aujourd’hui. On va essayer d’utiliser cette ressource, sans vouloir être vulgaire », explique Etuato Mulikihaamea, membre du comité directeur de la Fédération française et président du comité de Wallis-et-Futuna. Ces physiques sont ceux « du rugby moderne, qui est fait de mouvement mais aussi de combat », insiste Frédéric Pomarel.

  • UNE FORCE MENTALE

Le physique n’explique pas toute la réussite des joueurs du Pacifique. « Il y aussi cette culture qui est transmise dans les îles de Wallis-et-Futuna et de Nouvelle-Calédonie, cette volonté de gagner les duels en permanence, sans pour autant être annihilé par l’enjeu », insiste Raphaël Steyer, responsable du pôle espoirs de Koutio.

Lors du quart de finale perdu contre l’Afrique du Sud, « certains joueurs ont été pris par la pression », au contraire de Peato Mauvaka. « Nos gamins n’ont pas de pression. Ils vont sur un tournoi pour s’amuser, parce que le rugby est un jeu comme un autre », abonde Etuato Mulikihaamea, pour qui la « nonchalance » supposée des joueurs du Pacifique, longtemps vue comme une faiblesse autrefois, est désormais une « force » reconnue.

  • LE JEU AU COIN DE LA RUE, LA MEILLEURE FORMATION

Frédéric Pomarel se souvient d’une étude, réalisée par la Fédération, « qui avait fait mal aux techniciens que nous sommes ». Les enquêteurs avaient comparé l’activité des jeunes rugbymen au cours d’un jeu « délibéré », au coin de la rue par exemple, et au cours d’un entraînement encadré. « On s’est aperçu que dans le jeu délibéré, il y avait 1,5 à 2 fois plus d’activité : jeu au pied, courses, passes, duels… Et loin des adultes, les gamins généraient parfois leurs propres règles. Ils développaient davantage de compétences que dans une pratique encadrée. Or, le premier constat que j’ai fait outremer, c’est que le jeu délibéré existe encore, alors qu’il a pratiquement disparu en Métropole. »

  • UNE BONNE HUMEUR BÉNÉFIQUE

En dehors du terrain aussi, « les joueurs du Pacifique apportent du spontané au XV de France », estime Frédéric Pomarel. Leur joie de vivre est très appréciée : les moments de détente, depuis quelques années, sont pris très au sérieux par l’encadrement de l’équipe de France, conscient de la nécessité de reposer aussi bien les esprits que les corps. Le spontané, « ça fait partie du management des équipes ».

Gilles Caprais

Peato Mauvaka est-il le nouveau titulaire ?

Dans la hiérarchie des talonneurs, Julien Marchand était en tête de liste aussi bien au Stade Toulousain qu’en équipe de France. Sa blessure a donné l’occasion à son remplaçant d’aligner les prestations fabuleuses. « J’en vois beaucoup qui estiment aujourd’hui que Peato Mauvaka serait dans l’équipe type de la Coupe du monde », observe Frédéric Pomarel, bluffé par l’étendue des capacités du joueur découvert à Dumbéa, d’autant que ce dernier « n’est pas passé par les écoles de rugby, puisqu’il a découvert le rugby sur le tard », ce qui fait de lui « l’exception qui confirme la règle ».