Législatives : un record de candidatures et de nouveaux clivages

Pas moins de 21 candidats se disputeront les suffrages des 190 000 électeurs calédoniens le 11 juin, au premier tour des élections législatives : 12 candidats dans la 1re circonscription (Nouméa et les Îles) ; 9 candidats dans la seconde (Grande Terre sauf Nouméa). Comment s’y retrouver et surtout de quels nouveaux clivages témoigne cette profusion de vocations politiques ?

Le bal des prétendants. – Ce record de prétendants à un scrutin législatif s’explique d’abord par l’explosion des « petits candidats ». Des candidatures, tantôt folkloriques, comme celle de Manuel Millar (plus proche du gourou que du politique avéré), tantôt plus académiques, comme celles des Insoumis du Pacifique dans la 1re ou de l’UPR dans les deux circonscriptions : chacun tentera de fixer à son profit les voix obtenues par leur champion au premier tour de la présidentielle.

La tentation de la reconstruction. – Mais ce record s’explique aussi par l’éclatement, depuis 2004, de la famille non-indépendantiste à laquelle la déconfiture de François Fillon vient de porter un nouveau coup. Enfin, à l’instar de la Métropole, la Nouvelle-Calédonie n’échappe pas aux velléités de recomposition de l’échiquier politique initiées par l’ère Macron. Le député sortant de la 2e circonscription ne prévoit-il pas, s’il est réélu, de voter en faveur de la réforme du Code du travail, « un bon texte » selon lui et une promesse de campagne du nouveau président de la République ?

Une 1re plus féminine. – Côté chiffres, on compte neuf femmes candidates ou suppléantes dans la 1re circonscription, contre deux seulement dans la seconde. Dans cette même circonscription, on dénombre deux indépendantistes, un candidat inclassable : restent donc six non-indépendantistes. Dans la 1re circonscription, trois candidatures sont estampillées indépendantistes : aussi, 9 prétendantes et prétendants se partageront les voix loyalistes dans cette circonscription.

Au jeu des familles. – Deux candidats sont issus de Calédonie ensemble : c’est totalement vrai pour Philippe Dunoyer, beaucoup plus confus pour Alain Descombels, dont le présent ne doit plus grand-chose au passé. Trois appartiennent à la mouvance Les Républicains : Sonia Backes, qui préside le groupe au Congrès, Bernard Deladrière, dûment investi par le parti au temps de Fillon, et Gaël Yanno, qui a soutenu Alain Juppé.

Deux ans de politique socialisante. – Voilà qui fait du monde ! Certes, mais on voyait bien jusque-là les clivages et les différences : durant les deux années écoulées du mandat Germain, associé à son grand argentier Philippe Dunoyer, le gouvernement Calédonie ensemble a mené une politique socialisante, appuyée au Congrès par les indépendantistes, Palika en tête. Les Républicains n’ont eu de cesse de démontrer et dénoncer ces errements qui ont anesthésié, puis démembré l’économie et dopé le chômage comme jamais. Mais ça, c’était hier !

Référendum et/ou apaisement ? – Aujourd’hui s’ajoute une fracture supplémentaire. Entre ceux qui souhaitent gagner le référendum de 2018 le plus largement possible pour négocier dans les meilleures conditions après le scrutin et ceux pour qui « la sortie de l’Accord » doit avant tout se faire « dans l’apaisement », comme un bon gros dodo. La paix à tout prix, en somme, même s’il convient de retirer de son vocabulaire toute référence à la montée de l’insécurité : « Bah, un peu de prévention et le tour sera joué ! » Même s’il convient de préférer les 90% de convergences avec les indépendantistes aux 10 % de divergences dont la souveraineté…

Le spectre de l’indépendance-association. – Pour la paix, faut-il s’adonner à l’indépendance- association ? La ministre des Outre-mer semble le croire, mais rassure les Calédoniens. « Dans un cas comme dans l’autre, la France sera à nos côtés ! », mais « si dans les deux cas, la France est à nos côtés, c’est que dans les deux cas, on n’en fait plus partie », remarquait l’historien Luc Steinmetz, dans le dernier Club politique de RRB. Imperceptiblement des glissements s’opèrent, qu’un petit nombre dénonce à ce stade de la campagne : Pierre Frogier, mais il n’est pas candidat. Harold Martin et Pascal Vittori dans la deuxième ; Sonia Backes, dans la première. Et ?…

100% France = choix restreint. – Reste qu’à ce jeu du plus petit commun dénominateur, les partisans de la Calédonie dans la France, s’ils veulent l’emporter dans les deux circonscriptions, ont un choix bien plus restreint qu’en apparence.

M.Sp.


Les 21 candidats des deux circonscriptions

Dans l’ordre et la numérotation des panneaux électoraux ; le ou la suppléante figure entre parenthèses.

1re circonscription :

1 – Alain Descombels, (Elia Sione).
2 – Sonia Backes, (Jean-Gabriel Favreau).
3 – Philippe Dunoyer, (Annie Qaeze).
4 – Louis Manta, (Francine Baumann).
5 – Lina Balmelli, (Jean-Paul Glaudel).
6 – Charles Washetine, (Rolande Trolue).
7 – Michel Hanocque, (Xavier Chombeau). 8 – Gaël Yanno, (Sacha Benisti).
9 – Germaine Némia-Bishop, (Sonia Seiko- Hotere).
10 – Bernard Deladrière, (Eugène Ukeiwé). 11 – Philippe Gras, (Karen Lopez).
12 – Macate Wenehoua, (Angélina Piepe- Gargani).

2e circonscription :

1 – Manuel Millar, (Pelekualoa Tuakoifenua). 2 – Bianca Hénin, (Christopher Bourgine).
3 – Philippe Gomès, (Gérard Poadja).
4 – Oscar Diaz, (Julien Dubrana).

5 – Louis Mapou, (Jean Creugnet). 6 – Gil Brial, (Joann Winchester)
7 – Henry Bodeouarou, (Pelenato Kavahuumai).

8 – Harold Martin, (Grégoire Bernut). 9 – Pascal Vittori, (Wilfried Weiss).