Le port autonome voit grand

Outre la modernisation des infrastructures, « il y a tout à refaire » au port, indique Brice Kiener-Ixeko. Revoir les aspects financiers, réglementaires et l’organisation du personnel. « On va y aller par étapes. » (© Géorep.nc)

Agrandissement du quai n°8, dragage de la grande rade et aménagement d’un terminal de croisière : trois priorités que le port autonome compte bien mener à terme en 2026. « De beaux chantiers en perspective », un coût de plus de 13 milliards de francs.

♦ Un quai plus grand

Il en est question depuis 2004. L’extension du poste 8 de 750 mètres à 1 km, soit 250 mètres en plus pour recevoir davantage de bateaux. Les travaux ont démarré en 2017 avant d’être subitement arrêtés fin 2018 en raison d’un problème technique.

Si la méthode utilisée est connue, il s’agit de construire un terre-plein maintenu par deux palplanches, sorte de rideau d’acier, la terre généralement utilisée a été remplacée par de la scorie. « On a eu un comportement mécanique qu’on n’avait pas l’habitude de voir, des poussées qui ont déplacé les palplanches », explique Brice Kiener-Ixeko.

Après deux années d’études sur le comportement de la scorie, une solution a été trouvée. Le chantier a repris, mais cela a nécessité d’investir, entre autres, dans deux machines à hauteur de 600 millions de francs. L’enveloppe initiale est passée de 3 à 5 milliards de francs. « Un surcoût assez important financé sur fonds propres », précise le directeur du port autonome, ce qui a grignoté le fonds de roulement de l’établissement public. Résultat, seul le quai est payé. « Il faut maintenant trouver de l’argent pour l’aménager. »

♦ Un chenal plus profond

Le dragage de la grande rade doit démarrer dans la foulée pour adapter la profondeur du chenal aux porte-conteneurs et paquebots de croisière, dont la taille ne cesse d’augmenter. « La CMA CGM, par exemple, dans sa politique de réduction d’émissions de CO2, a décidé d’exploiter des navires plus grands, donc elle ne pourrait plus venir à Nouméa sans cette adaptation. »

La rade peut accueillir des navires avec un tirant d’eau (la hauteur de la partie immergée du bateau) de 10,5 mètres. L’objectif est d’atteindre 13,5 mètres. L’option retenue ? Déplacer le sable grâce à des barges et l’immerger en haute mer.

Concernant un éventuel impact sur l’environnement, Brice Kiener-Ixeko l’affirme : « on va voir comment le limiter au maximum ». Le port effectue un suivi sentinelle annuel de l’état de la biodiversité dans les rades. « Elles sont plutôt en bon état. La qualité de l’eau de la petite rade est baignable. Les endroits à préserver sont identifiés. » Reste à dénicher un moyen pour assurer son coût, estimé à 7 milliards de francs.

♦ Une nouvelle gare maritime

« On va vraiment développer la croisière, appuie Brice Kiener-Ixeko, il ne faut pas rater le virage. » La création d’un terminal est envisagée à proximité de l’entrée de la ville pour plus d’un milliard de francs.

Le quai Ferry n’est plus adapté. « Il a été pensé pendant les années 1990 pour le Club Med 2. Avec des bateaux de 5 000 personnes, c’est obsolète. » Seuls des paquebots de 200 mètres peuvent s’y amarrer. « Il n’y en a plus que 15 % de cette envergure, la plupart font plus de 300 mètres aujourd’hui. Ce n’est pas spécifique à la Nouvelle-Calédonie, les bateaux sont tellement gros que seules les installations dimensionnées sont les ports de commerce. »

Brice Kiener-Ixeko, militaire, ancien sous-marinier et ingénieur, dirige le port depuis avril 2022. (© © A.-C. P.)

Cela impliquerait de réaménager le site et de déplacer l’activité commerciale de l’autre côté du port. « Ce gros travail serait l’occasion de s’attaquer au volet environnemental et de développer une production d’électricité plus verte, notamment avec du solaire. Il faudrait également prendre en compte la montée des eaux. Quand il y a eu le dernier coup d’ouest, on a été submergé. »

Pour démarrer les travaux, Brice Kiener-Ixeko doit partir à la chasse aux financements, notamment auprès de l’État dans le cadre des contrats de développement. « De beaux chantiers en perspective » dont l’achèvement est prévu en 2026.

Anne-Claire Pophillat

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Une délégation de service publique devrait être lancée début 2024. « Il faudrait que cela soit mis en place début 2025 à Moselle, on verra ensuite pour les autres marinas. » Cela concerne une centaine de bateaux. La procédure engagée avec Port de l’Ouest pour la réalisation d’un port à sec à Moselle a été cassée en raison « de tarifs trop élevés ». Elle doit être relancée d’ici la fin de l’année.
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