La ville de Nouméa crée des régies pour ses services publics

Lors de son dernier conseil municipal, la ville de Nouméa a créé des régies pour assurer le contrôle de l’exploitation des services publics proposés à ses administrés. Une obligation légale qui vise à davantage de transparence, sans pour autant modifier la situation pour le public.

Le prix des services publics, leur délégation et le suivi des contrats sont des choses complexes. D’autant plus que les règlementations ont sensiblement évolué ces dernières décennies. Comme le rappelle le secrétaire général adjoint de la mairie, Philippe Jusiak, « la réglementation a été revue dans les années 90 face à des questionnements assez forts concernant le financement des partis politiques, notamment par les entreprises assurant la distribution de l’eau ».

C’est à partir de là qu’il a été décidé que les collectivités devaient mettre en place des régies, visant à davantage de transparence dans la gestion et l’exploitation des services publics à caractère industriel et commercial que sont l’eau et l’assainissement, la collecte et le traitement des déchets ou encore la gestion des services funéraires.

Très peu de collectivités calédoniennes ont pourtant mis en place ces régies. La mairie de Nouméa vient de se plier à cette règle, lors de son dernier conseil municipal, le 18 janvier, suite à un recours de l’association de protection des consommateurs, l’UFC- Que choisir, et qui s’intéresse également à la défense des droits des usagers des services publics. Pour Philippe Jusiak, il s’agit d’une instance qui a une autorité sur le service, mais qui, fondamentalement, ne change rien à son fonctionnement. « La régie dispose d’un conseil d’exploitation qui est une sorte de conseil de surveillance, explique le secrétaire général adjoint. Le conseil se réunit et émet des avis sur le service et il fait ensuite remonter l’information jusqu’au conseil municipal qui prend les décisions. »

C’est notamment le cas du niveau des redevances que les usagers payent afin de bénéficier des services. Pour Philippe Jusiak, l’instauration des régies répond donc à une obligation légale sans que cela ne change le fonctionnement actuel, le montant des redevances étant adopté par le conseil municipal après la consultation des CCSPL (commissions consultatives des services publics locaux), organismes paritaires qui permettent d’associer la société civile.

Renforcer le contrôle de la société civile

Une vision que ne partage pas forcément l’UFC-Que choisir. « Au même titre que les CCSPL, la régie permet d’associer la société civile au contrôle de la gestion et l’exploitation des services publics, indique Françoise Kerjouan, la vice-présidente de l’association. Les CCSPL se tiennent souvent en fin d’année et ne permettent donc pas de se prononcer sur l’évolution des redevances, simplement de la constater. » Pour la société civile, l’intérêt de la régie sera donc d’avoir la main, ou du moins l’opportunité, de se prononcer sur les montants des redevances, faire en sorte d’éviter leur flambée ou, au contraire, de préconiser une augmentation en vue de financer des investissements.

L’UFC estime, toutefois, que la mairie a fait le minimum syndical en retenant une composition du conseil d’exploitation de trois personnes, alors qu’il peut monter jusqu’à 15 personnes et être composé de différents collèges. En plus d’un élu, le conseil comprendra deux autres personnes qui ne représenteront pas nécessairement les usagers, comme le précise le règlement intérieur de la régie. Il pourrait parfaitement s’agir d’agents administratifs de la mairie, par exemple.

Au-delà des redevances, l’idée est également de pouvoir intervenir sur la question des règlements en matière d’assainissement ou de déchets, par exemple. L’UFC estime que la société civile n’est pas suffisamment sollicitée sur la question et se retrouve bien souvent face à des textes qui lui sont imposés. « Pour le service funéraire, la régie aurait pu être l’occasion de faire entrer les différentes communautés, par exemple. » Un dossier d’actualité qui pose notamment question sur les horaires d’ouverture au public et qui est loin de faire consensus. La présence des différentes communautés au sein du conseil d’exploitation aurait peut-être permis de désamorcer les tensions. Reste donc à savoir quelle sera la composition retenue pour les différentes régies.

Les bons comptes font les bons services

Les services publics à caractère industriel et commercial font l’objet de nombreuses recommandations et réglementations. Sur la plan comptable, leurs budgets doivent être équilibrés, ce qui signifie que les redevances payées par les usagers doivent permettre de financer le service. En cas de déficit, les communes n’ont pas d’autres choix que de les subventionner, ce qui signifierait que tous les administrés participeraient au financement, sans nécessairement bénéficier du service. Les budgets annexes de la ville de Nouméa sont à l’équilibre, mais pas ceux des autres communes, qui ont énormément de difficultés à atteindre cet objectif, notamment en raison des impayés ou de l’insuffisance du montant des redevances.

Imbroglio autour de la TGC

Les exonérations de taxe générale sur la consommation, ou TGC, sont multiples. C’est notamment le cas des organismes à but non lucratif ou encore des services d’intérêt général. La question de l’application de la TGC aux services publics est une question complexe, en particulier si ces derniers font l’objet d’une délégation de service public, comme c’est le cas pour de nombreuses communes en matière d’eau, de déchets ou encore d’électricité. Les prestataires sont soumis à la TGC, mais ni les communes ni les syndicats intercommunaux ne le sont.

La complexité provient du fait que ces prestataires perçoivent des recettes qu’elles reversent ensuite aux communes, comme celles prévues pour les investissements. Jusqu’à présent, les prestataires appliquaient un taux de TGC de 3 % alors qu’il n’y avait pas lieu de l’appliquer. Une pratique qui renchérit le coût des services publics de manière indue, selon l’UFC-Que choisir, qui a sollicité le président du gouvernement pour mettre fin à cette pratique. Rien ne dit encore si les sommes trop perçues vont être remboursées et par qui mais une chose est sûre, elles représentent un montant considérable.

M.D.