La stratégie Covid-Free montre ses limites

Si le territoire a eu la chance d’être épargné par le Covid-19, il est désormais confronté au revers de la médaille : une difficile réouverture des frontières. Aux dernières nouvelles, cette éventualité n’est pas prévue avant début 2022…

L’impatience se fait grandissante au sujet des mesures strictes appliquées aux frontières depuis mars 2020. Pour le monde sanitaire, nous en parlions la semaine dernière, les acteurs économiques et, plus globalement, pour tous ceux qui ont des liens au-delà des mers.

Le sas à l’entrée du territoire, qui inclut le conditionnement des déplacements aux motifs impérieux et l’isolement en quatorzaine ou en septaine, nous a, certes, permis de vivre normalement (à l’exception de deux confinements), mais le système trouve aujourd’hui ses limites. La Nouvelle- Calédonie devra s’ouvrir à nouveau, quoi que progressivement. Or, le risque est grand puisque notre population est l’une des seules au monde à n’avoir pas été confrontée au virus et que l’immunité par la vaccination est loin d’être atteinte.

On observe le variant Delta

Deux aspects conditionnent l’assouplissement de ces mesures. En premier lieu, les autorités sanitaires regardent de près la situation en Métropole. Les règles ont évolué pour l’été en raison d’une amélioration de la situation épidémique, mais le variant Delta (indien), 60 % plus contagieux que le variant Alpha (britannique), progresse comme ailleurs et pourrait devenir majoritaire. En cas de nouvelle épidémie dans l’Hexagone, il ne sera pas question d’assouplir nos mesures, comme l’a expliqué en début de semaine le président du 16e gouvernement, Thierry Santa.

Le deuxième aspect concerne la vaccination. 52 528 personnes sont totalement vaccinées et 59 614 ont reçu la première dose. La campagne tourne toujours au ralenti (5 000 injections par semaine environ par rapport à un objectif fixé à 10 000) et elle est notamment à la traîne en province Nord et dans les Îles. Les populations mélanésiennes des tribus seraient particulièrement réfractaires et plus largement, ceux qui ne voyagent pas ne voient pas d’avantage à effectuer la démarche. La vaccination fait par ailleurs l’objet d’une vaste campagne de dénigrement.

La carotte ou la peur

Le message des autorités à ce sujet est le suivant. La Nouvelle-Calédonie ne pourra pas rester fermée éternellement. Les incidences sont importantes pour l’économie et donc l’emploi, pour la santé et donc les soins. Si le virus parvient à s’introduire, les personnes non vaccinées, et notamment les plus fragiles, seront très à risque.

Mais ces messages ne semblent pas porter. On ne croit pas, finalement, les autorités capables de rouvrir les frontières au péril de vies… Comment faut-il alors convaincre ?

Pour l’instant, le gouvernement a choisi de mettre tout en œuvre pour encourager les Calédoniens à se faire vacciner en proposant des services de proximité. Le vaccinodrome de Nouméa a été un succès, samedi, avec 1 000 injections. Les candidats rencontrés sur place ont trouvé cette formule « intéressante », notamment ceux qui n’ont pas la possibilité de se libérer en semaine ou qui trouvent les centres de vaccination « un peu trop loin » de chez eux.

La formule, déroulée dans plusieurs communes, a permis au total de procéder à plus de 4 350 injections. Mais ce dispositif, qui sera reconduit par exemple à Bourail le 7 juillet, à Boulari (pour une troisième journée), à Nouméa (le 17 juillet pour les deuxième injections) ou encore à La Tontouta, est assez lourd. À Nouméa, il a mobilisé une centaine de volontaires des directions territoriales, sept médecins, douze infirmières.

Selon un cadre du gouvernement, reste ensuite deux solutions à éprouver : « la carotte ou la peur ». Tandis qu’on voit fleurir les « cadeaux contre vaccination » aux États-Unis ou en Europe (bière, joints, tickets de baseball, bons d’épargne, bourses universitaires, etc.), notre compagnie aérienne a déjà lancé un jeu concours pour les nouveaux vaccinés avec 60 billets d’avion à gagner. L’OPT offrait samedi, par le biais d’un jeu toujours, des cartes Liberté.

Plus sérieusement, la septaine pourrait encore être réduite pour les vaccinés. Et à l’inverse, ceux qui veulent voyager et refusent de se faire vacciner pourraient devoir payer leur quatorzaine… Mais si ces approches ne fonctionnent pas ou pas suffisamment, quelles seront les méthodes employées ?

C.M.

©C.M./DNC