La guerre contre l’alcool est déclarée

Après une première délibération relevant la taxe sur l’alcool, le gouvernement enfonce le clou en adoptant un nouveau train de mesures pour compléter l’augmentation des prix. La délibération cadre proposé par le gouvernement fait de la lutte contre l’alcool une « grande cause » de la Nouvelle-Calédonie.

La volonté du gouvernement d’augmenter la taxe sur l’alcool a suscité un tollé chez les producteurs et les importateurs. Le gouvernement n’y a pas été avec le dos de la cuiller en proposant de relever la taxe sur les boissons alcoolisées, importées ou locales, d’au moins 20 % au 1er janvier 2018. Selon le gouvernement, la hausse des prix, à l’instar du tabac, a un impact positif sur la diminution de la fréquence et la gravité des conduites à risque liées à la consommation d’alcool. De nombreuses études le démontrent et celle de l’Agence sanitaire et sociale de 2015. D’après le document, une hausse des prix de 30 % aurait un impact pour près de 33 % des consommateurs d’alcool. Autre résultat intéressant, une hausse aurait un e et particulièrement notable chez les jeunes qui serait 39 % à modifier leur consommation.
La délibération du gouvernement prévoit une augmentation de la TAT3S (taxe sur les alcools) qui pourrait rapporter jusqu’à 4 milliards de francs. Une augmentation sur la taxe de consommation des produits importés (TCI) sur les spiritueux pourrait, quant à elle, rapporter dans les 500 millions de francs.

Un véritable fléau aux lourdes conséquences

Cette mesure vise à donner des moyens supplémentaires au gouvernement pour mettre en œuvre l’autre partie de son plan, adopté en collégialité le mardi 12 décembre, mais aussi financer une partie du fonctionnement des hôpitaux qui ont à traiter les multiples conséquences sanitaires de l’alcool. Il fait de l’alcool une « grande cause » de la Nouvelle- Calédonie. On peut presque parler de fléau tant l’alcool a des conséquences catastrophiques sur la population calédonienne et sa santé. Entre 2011 et 2015, les services sanitaires ont enregistré 611 décès directement imputables à l’alcool. Et c’est sans parler des maladies chroniques, des victimes d’accidents de la route handicapées, des violences et dégradations en tout genre dans lesquels l’alcool joue un rôle non négligeable. Dans l’ensemble, 70 % déclarent boire et ils sont 36 % à avoir été ivres au moins une fois dans l’année. Les ivresses publiques manifestes sont 50 fois plus importantes qu’en Métropole et l’âge de début des consommations est plus précoce aussi. Les jeunes commencent à boire à 12-13 ans contre 15 ans en Métropole.

Encadrement des pratiques commerciales et « zones protégées »

Après le porte-monnaie, le gouvernement a donc adopté un avant-projet de loi du pays et une délibération cadre pour compléter le dispositif. Ces deux documents abordent les questions de prévention, de l’encadrement des pratiques commerciales, la protection des mineurs, la répression des abus d’alcool et de l’état d’ivresse sur la voie publique et la coordination des actions. D’autres mesures sont également prévues par le plan Do Kamo et notamment un travail sur l’estime de soi dont le manque est souvent la base des conduites à risque.

En matière d’encadrement des pratiques commerciales, le gouvernement propose d’interdire les publicités, le parrainage, la propagande, les promotions tarifaires et « plus globalement toute action ayant pour but de promouvoir la consommation des boissons alcooliques ». Des « zones protégées » seront par ailleurs délimitées autour des établissements de santé, des maisons de retraite, des établissements scolaires, des structures sportives, des lieux de culte ou encore des cimetières. Dans le même esprit, la délibération appelle l’ensemble des collectivités et institutions concernées et compétentes à adopter des réglementations visant à protéger les mineurs. Plus généralement, le document ouvre la voie à un durcissement de la réglementation en matière de répression et à la sanction d’abus d’alcool, mais aussi à la prévention et à la prise en charge. Ce plan attendu depuis longtemps, notamment par les acteurs de la sécurité routière et de lutte contre la délinquance, devra maintenant passer l’examen des élus du Congrès, mais aussi faire consensus au sein des di érentes assemblées et structures concernées par les questions de consommation excessive d’alcool.

Md