Joseph Dinne force le respect

Joseph Dinne n’a que peu joué au football. Il a surtout entraîné les jeunes – au Mont- Dore, à Mouli Sport, à l’AS Tiga désormais – et arbitré / © G.C.

Les joueurs qui se frottent à son autorité s’y piquent. Le doyen des arbitres calédoniens, 62 ans dont 24 au sifflet, ne transige pas avec le respect du jeu et de la fonction arbitrale. Affûté, soucieux de s’améliorer encore et toujours, il ne compte pas s’arrêter de sitôt.

Le long de la ligne de touche, un débordement est stoppé net par un tacle très rugueux. Coup de sifflet, faute. L’auteur s’éloigne, mais l’homme en bleu n’en a pas terminé avec lui. « Eh ! La prochaine fois, je te sors ! T’as compris ? » Joseph Dinne ne prend pas de pincettes avec les joueurs. Les contestataires tombent sur un os. « Je suis comme ça… En dehors, on boit un coup, on est amis. Sur le terrain, je ne te connais plus. »

Seuls comptent le respect de la règle, le respect du jeu. Il en est ainsi depuis 24 ans ‒ « et j’ai pas encore fini » prévient le doyen des arbitres calédoniens. « Les jeunes ne sont pas assez motivés, ils ne s’engagent pas trop. Ce sont toujours les anciens qui officient. » S’il faut remplacer un absent de dernière minute, au centre du terrain ou sur la touche, Joseph Dinne, 62 ans, mécanicien en retraite, ne pose jamais de question. Il saute dans sa voiture. « Les années n’ont pas de prise sur Joseph. Il est toujours partant, toujours là pour rendre service. Si on avait plusieurs arbitres de cet acabit, on n’aurait pas de problème », soupire Joël Guillerm, responsable des arbitres au sein de la Fédération calédonienne de football, qui peine à contraindre les 12 clubs de Super Ligue à fournir les trois arbitres, quelles que soient les sanctions.

FIDÈLE AU POSTE

L’arbitrage est un sacerdoce aussi ingrat que peuvent l’être les joueurs. Il l’était particulièrement en 2014, année où plusieurs rencontres de Super Ligue avait été arrêtées après l’agression d’arbitres. Jeté à terre, roué de coups de pied par un joueur de Gaïtcha lors de la rencontre qui opposait son club à l’AS Magenta, Joseph Dinne avait subi la plus violente de ces attaques.

Quinze jours plus tard, il était de retour. « J’étais écœuré par cette violence, par ce manque de respect envers les arbitres. Mais je n’ai jamais pensé à arrêter. Je suis toujours resté fidèle au poste. Et quand je monte sur le terrain ‒ il se frappe le cœur ‒ je donne tout ce que j’ai là ! » Par amour indéfectible du football, des beaux matchs. « J’adore arbitrer les grands clubs. Hienghène, Magenta, le Mont-Dore… Pour un match décisif de Coupe de Calédonie, l’enjeu donne une ambiance différente. Tu montes sur le terrain, t’es dans ta bulle. »

« IL A UNE CARRURE D’ARBITRE »

Des erreurs d’arbitrage, il en a commis, et il en commettra d’autres. « En une fraction de seconde, tu dois siffler penalty ou non… On n’est jamais parfait sur le terrain. On fait des erreurs, bien sûr », admet Joseph. Aux joueurs qui se plaignent, Joël Guillerm se fait toujours un plaisir de tendre un miroir. « Et eux, sont-ils parfaits ? Même les grands joueurs font des erreurs. »

Pour Joël Wakanumuné, joueur et entraîneur de l’AS Tiga, où Joseph entraîne les U15, l’une de ses qualités est de savoir se remettre en question. « Il est beaucoup dans l’écoute. À la fin du match, il vient te voir, il te demande si c’était bien, il veut savoir comment s’améliorer. »

L’ancien capitaine de la sélection assure que ses efforts pour le football calédonien ne passent pas inaperçus. « Il est toujours là pour nous. Il est encore en forme. Il a un bon cœur, la joie de vivre, toujours le sourire… Il est aimé par les joueurs. Il mérite de continuer à arbitrer. »

Gilles Caprais

 

« L’arbitre n’est pas considéré »

Un stage d’arbitrage annulé au dernier moment pour laisser le terrain aux joueurs. Des clubs qui peinent toujours à fournir les trois arbitres obligatoires malgré les sanctions. « En Nouvelle-Calédonie, l’arbitre n’est pas considéré. On est la cinquième roue de la charrette », martèle Joël Guillerm, qui place quelques espoirs dans une réforme du système de pénalités qui a, par le passé, coûté à Hienghène la victoire en championnat. « Les clubs n’acceptent pas le système des pénalités. On pourrait le remplacer par un système de bonus, des points supplémentaires pour ceux qui fournissent des arbitres tout au long de la saison. »