Incendies de l’est australien, la situation pourrait s’aggraver

Residents defend a property from a bushfire at Hillsville near Taree, 350km north of Sydney on November 12, 2019. - A state of emergency was declared on November 11 and residents in the Sydney area were warned of "catastrophic" fire danger as Australia prepared for a fresh wave of deadly bushfires that have ravaged the drought-stricken east of the country. (Photo by PETER PARKS / AFP)

Les Calédoniens ont découvert avec stupeur le résultat des incendies hors norme qui frappent les États de la Nouvelle-Galles du Sud et du Queensland, désormais placés en état d’urgence par les autorités. La principale ville du pays, Sydney, est désormais menacée.

« Catastrophique ». C’est le niveau de danger qui caractérise officiellement les dizaines d’incendies qui ravagent la côte est australienne depuis quelques jours. Un niveau qui dépasse largement l’échelle conventionnelle, a estimé Gladys Berejiklian, la Première ministre de la Nouvelle-Galles du Sud. Des incendies qui menacent désormais Sydney, la plus importante ville du pays. Les images de la mégapole que l’on aperçoit difficilement derrière l’épaisse couche de fumée sont impressionnantes. Les Calédoniens ont d’ailleurs eux-mêmes pu mesurer l’ampleur de la catastrophe en se levant, le 11 novembre au matin. Scal’air, l’association qui mesure la qualité de l’air à Nouméa, a publié un communiqué précisant que l’alerte orange avait été atteinte, à 8 h du matin, avec le dépassement du seuil d’information et des recommandations à destination des personnes sensibles. Le niveau de particules fines en suspension n’est repassé en dessous du seuil d’alerte que le lendemain matin. Seule Nouméa est équipée de capteurs, mais la fumée a été observée un peu partout sur le territoire, même aux Îles.

Une situation hors de contrôle

S’il n’existe pas d’inquiétude particulière sur le plan sanitaire, cette situation extraordinaire montre l’ampleur d’un phénomène qui semble échapper à tout contrôle. La Nouvelle-Galles du Sud est l’État australien le plus peuplé avec près de six millions d’habitants. Plusieurs morts sont déjà à déplorer (trois avaient été recensé le 12 novembre) et des milliers de personnes ont déjà dû être évacuées. La plupart des villes de la côte ont reçu pour consigne de se tenir prêtes à évacuer, y compris les plus grandes telles que Sydney. Près d’un million d’hectares a d’ores et déjà été ravagé par les flammes et les dizaines de brasiers sont loin d’être maîtrisés. L’inquiétude est d’autant plus grande que les conditions météorologiques ne sont pas favorables. Des vents forts et des températures nettement supérieures à 30 degrés attisent les foyers, en particulier au nord. Les services météo prévoient un peu de répit dans la Nouvelle-Galles du Sud. Les dégâts matériels sont considérables et de nombreux fermiers du Queensland, l’une des principales régions agricoles du pays, ont littéralement tout perdu.

Malgré l’urgence de la situation, une polémique politique a éclaté sur fond de climatoscepticisme. Le vice-premier ministre conservateur, Michael McCormack, a déclaré à l’antenne de la radio publique que le lien entre le changement climatique et l’importance des feux relevait du « délire de certains écologistes citadins illuminés ». Dans une tribune publiée par le Guardian, la maire écologiste de Glen Innes qui a été dévasté par le feu, Carol Sparks, estime pour sa part que le changement climatique est un fait scientifique et que « ce désastre était bien anticipé et prévisible ». Le Premier ministre, Scott Morrisson a, pour sa part, assuré que tous les moyens étaient mis en œuvre pour éviter le pire. L’armée pourrait être déployée pour venir en aide aux pompiers qui pourraient s’épuiser rapidement. Le pays redoute de revivre la tragédie de 2009 lorsque des feux de forêt avaient coûté la vie à près de 180 personnes.

 Une enquête sur la sécheresse en Nouvelle-Calédonie

Les autorités estiment toutefois que le pire est encore à venir. De nombreux autres États du pays sont l’objet d’une sécheresse extrême et donc d’un risque de feu très élevé. La Fédération nationale des agriculteurs a d’ailleurs dénoncé la stratégie de lutte contre la sécheresse, estimant que celle-ci revenait « à remuer les transats sur le pont du Titanic ». Ils pointent notamment la coalition climatosceptique du gouvernement qui nie la réalité. Cette prise de position de la Fédération nationale trouve un écho en Nouvelle-Calédonie où la situation est cependant loin d’être aussi catastrophique. La Chambre d’agriculture va lancer une enquête auprès de ses ressortissants pour évaluer l’impact de la sécheresse et ses conséquences sur les productions animales et végétales. Il s’agit aussi de recueillir des propositions de moyens à mettre en œuvre. Les agriculteurs et les éleveurs sont invités à répondre à un document en ligne composé d’une vingtaine de questions avant le 25 novembre. Il suffit d’être titulaire d’une carte agricole pour pouvoir participer. Le lien est accessible depuis le site internet de la chambre (www.nouvelle-caledonie.chambre-agriculture.fr).

Si les agriculteurs calédoniens n’en sont pas encore aux récriminations de leurs homologues australiens, la question pourrait sérieusement se poser. Chaque année, les feux font des ravages en Nouvelle-Calédonie et, pire, ils ont tendance à brûler plusieurs fois les mêmes surfaces, ce qui a des conséquences d’autant plus graves pour la ressource en eau. La côte ouest souffre alors qu’elle est le principal bassin de production agricole du territoire et hormis le barrage de Pouembout, les projets d’aménagement ne sont pas légion. L’approvisionnement en eau de l’île des Pins pourrait bien avoir déjà également fait les frais des incendies. C’est ce qui ressort du Forum H20, organisé par le gouvernement en 2018. Les experts estiment que le feu est la cause probable de la fermeture de deux captages présentant des taux de nickel anormaux en 2016. Les bilans dressés à l’occasion du forum, (en ligne sur le site www.forumh2o.nc) sont de manière générale peu rassurants. Ils montrent que seuls 10 % des périmètres de protection des captages en eau de la Grande Terre et de l’île des Pins sont peu dégradés. Pour le reste, 37 % sont dégradés et 53 % très dégradés.