Harold Martin « viscéralement opposé à toute forme d’indépendance »

Ils seront bien neuf, ce dimanche, à briguer les suffrages des électeurs de la seconde circonscription de la Nouvelle- Calédonie. Neuf sur la même ligne, mais certainement pas à égalité tant la campagne, qui prend fin ce vendredi, a mis en évidence la vive inquiétude de la population sur son avenir et plus particulièrement sur l’échéance incontournable de novembre 2018. Leader incontestable du camp de la Calédonie française, Harold Martin n’a eu de cesse d’alerter les Calédoniens sur les risques de dérive et d’exiger la tenue du référendum prévu par l’Accord de Nouméa. Interview. 

À trois jours du premier tour, quel est le message essentiel que vous souhaitez délivrer aux électeurs calédoniens ?

Je suis viscéralement opposé à toute forme d’indépendance de la Nouvelle-Calédonie et, ce qui me fait bondir, c’est cette indépendance- association à la Pisani qui se prépare dans le dos des Calédoniens. Si je me suis présenté dans ces élections, c’est pour défendre jusqu’au bout la Calédonie française et pour dire la vérité aux Calédoniens.

J’ai dit et je maintiens qu’il faut aller au référendum et ne pas accepter une modification de la question comme certains le préconisent, une question, je le rappelle, approuvée par 72 % des Calédoniens. Au lendemain du référendum, du oui ou non à l’indépendance, et justement parce qu’il n’y aura plus d’Accord de Nouméa, alors il faudra bien rediscuter de la suite. Mais je suis consterné de constater qu’après avoir passé cinq ans à débattre de la sortie de l’Accord de Nouméa, après des dizaines de réunions, de missions, de comités des signataires, personne n’est en mesure de dire ce qui va se passer.

Et je constate que certains adoptent une posture électoraliste en nous disant qu’il faut nous entendre sur un soi-disant socle des valeurs, une déclaration commune ou s’entendre sur des institutions à venir. Tout ça, ce n’est qu’un écran de fumée pour nous faire gober leur indépendance-association dans laquelle ils ont bien prévu de conserver toutes les dispositions de l’Accord de Nouméa favorables aux indépendantistes.

Vous contestez vivement les fameux 90 % de convergences et 10 % de divergences. Mais sur quelles dispositions de l’Accord de Nouméa convient-il de revenir ?

Contrairement à ce que j’ai pu entendre ici ou là, avec la signature de l’Accord de Nouméa, nous avons fait des concessions, nous nous sommes montrés généreux, mais cet accord est limité dans le temps, il prend fin en 2018. Donc, après le référendum, il faudra bien renégocier, revoir la clé de répartition qui fait que 50 % des recettes fiscales de la Nouvelle-Calédonie vont aux Nord et aux Îles, alors que les trois-quarts de la population vit dans le Sud.

Il faudra rétablir l’équité électorale, en revenant sur le principe que nous avons concédé et qui fait qu’il faut bien plus d’électeurs pour faire un siège aux élections provinciales dans la Sud que dans le Nord et les Îles, ce qui ne correspond pas à la répartition politique de la Nouvelle-Calédonie, c’est-à-dire 1/3 d’indépendantistes, 2/3 de non- indépendantistes.

Enfin, il conviendra évidemment de revenir sur la restriction du corps électoral instituée par l’Accord de Nouméa qui déroge aux principes fondamentaux de la Constitution française. Ce n’est que parce que cet accord est transitoire que cette restriction est acceptable aux yeux notamment de la communauté internationale. En 2018, l’Accord de Nouméa prend fin et, avec lui, la restriction du corps électoral pour les élections provinciales.

Même si la compétence en matière économique ne relève pas du mandat de député, quelles sont vos préconisations ?

La priorité des priorités, c’est la restauration de la confiance. Pour ce faire, il faut que l’horizon soit dégagé et ne plus avoir l’épée de Damoclès d’une indépendance-association au-dessus de la tête. La deuxième, c’est de changer le gouvernement, mais aussi son mode de fonctionnement qu’il convient de réformer de toute urgence.

Mais puisque vous abordez cette question économique, un mot sur le nickel.
En 2016, l’État est intervenu à hauteur de 90 milliards de francs pour sauver les trois usines. Il faut bien prendre conscience que sans cette intervention, elles auraient disparu du paysage. La question va se poser dans les mêmes termes en 2020, mais qui peut croire que l’État remettra une nouvelle fois au pot dans le cadre d’une Calédonie indépendante. Quant aux actionnaires privés de la SLN, ils ne remettront plus jamais un sou à force d’entendre Néaoutyine, Gomès et Dang exiger 51 % du capital, juste pour mettre la main sur les massifs miniers de la SLN. De plus, dans le cadre du plan Christnacht, ces mêmes actionnaires n’excluent pas non plus, dans le cadre d’une indépendance-association, d’être nationalisés par une République de Kanaky. Pour s’en sortir, il faut donc premièrement, rester français et deuxièmement, condamner définitivement la meurtrière idée des 51 % dans le capital de la SLN.

Vous vous êtes engagé ces dernières années sur le dossier de l’insécurité en Calédonie. Est-ce toujours un enjeu ?

Plus que jamais. J’ai dénoncé l’instrumentalisation de la délinquance, une délinquance politique, une délinquance qui vise à faire peur dans la perspective de la sortie de l’Accord de Nouméa. J’ai été le précurseur dans la dénonciation de cette situation, mais désormais je constate que le débat s’articule bien autour de cette délinquance politique. En conséquence, le député élu le 18 juin devra s’employer pour obtenir très vite la restauration de l’autorité de l’État, si nécessaire par un combat de tous les jours auprès des autres députés et du gouvernement. Sur ce sujet, le député sortant se prévaut de son bilan, mais son bilan sur cinq ans, c’est une augmentation sans précédent de la délinquance.

Si vous êtes élu, comment voyez-vous votre action de député ?

Le premier rôle du député de la Nouvelle- Calédonie, c’est d’être à Paris, devant la représentation nationale et l’État, et de défendre la Calédonie française. Son rôle, c’est d’affirmer que nous sommes une très large majorité à vouloir rester pleinement français. Les députés qui ont siégé au palais Bourbon ont abandonné cette mission essentielle. À un an et demi de la sortie de l’Accord de Nouméa, il est plus que temps de reprendre cette mission.

C.V.