Culturisme : l’année en or d’Odile Tran Thu Hà

Odile Tran Thu Hà s’est imposée dans la catégorie « model physique » aux championnats du monde WBPF, début novembre à Wonju, en Corée du Sud. (© WBPF)

Victorieuse aux championnats de Calédonie, aux Jeux du Pacifique puis aux championnats du monde WBPF, la culturiste a réalisé une saison 2023 idéale. Elle fera cette année une pause dans cette discipline exigeante, sans abandonner l’entraînement ni l’idée de compétition.

Tout juste auréolée de sa triple couronne, Odile Tran Thu Hà fait une pause avec la compétition. « Je reprendrai peut-être plus tard, pour affronter d’autres personnes, avec d’autres critères. Mais dans l’immédiat, j’ai besoin de faire une pause. » Sport d’extrême rigueur, le culturisme demande « beaucoup de travail, de temps et de sacrifices ».

Ces deux dernières années, la journée type d’Odile commençait à 5 h 30 par une séance de cardio et un travail de la routine, l’enchaînement de poses destiné à être réalisées sur scène. Elle se poursuivait par le travail au sein de l’épicerie familiale jusqu’au soir, puis par la séance de musculation. Entre-temps, le plus difficile : 5 à 6 repas « sans sel, sans poivre, ni sauce ». « Quand j’ai commencé, j’ai cru que j’allais arrêter au bout de deux jours. » Mais la détermination a été la plus forte.

PLUS DE TRAVAIL, MOINS DE STRESS

Pour sa première participation aux championnats de Nouvelle-Calédonie 2022 de bodybuilding, devancée par Bianca Muller, Odile Tran Thu Hà obtient une deuxième place encourageante mais quelque peu frustrante. « Je manquais de volume. Et puis j’étais trop timide, trop effacée par rapport à mes concurrentes. Je ne prenais pas assez de plaisir. » Contracter tout en étant décontractée, telle est la difficile équation. « La scène, c’était ma plus grande peur. Mais j’ai aimé ça. Je me suis dit que j’allais persévérer, travailler encore plus dur, et prendre ma revanche. »

En septembre 2023, les kilos nécessaires sont arrivés, la pression s’est envolée. « Cette fois-ci, je n’ai pas du tout ressenti de stress, je me suis dit que ça ne servait à rien. » Dans la foulée, la championne de Calédonie s’impose aux Jeux du Pacifique, puis aux mondiaux WBPF, l’une des fédérations internationales de culturisme, qui réunit principalement des concurrents asiatiques. La dernière victoire d’une Calédonienne datait de 2013, avec le sacre de Virginie Foucault dans la catégorie « body figure ».

« ON EST EN MARGE DE LA SOCIÉTÉ »

« Elle a réalisé une performance remarquable, salue son entraîneur Matthieu Soerjana. Elle a de bonnes prédispositions génétiques, mais elle a surtout beaucoup travaillé et gagné en assurance. » Lui-même ancien compétiteur, champion de Calédonie à de multiples reprises, il comprend facilement que son athlète ait envie de faire une pause. « Notre discipline est assez particulière. Il faut manger toutes les trois heures, et pas comme les autres. Limiter l’alcool et le tabac, dormir suffisamment… On est en marge de la société. On vit pour le body. »

Mais si Odile ‒ qui ne compte pas arrêter l’entraînement ‒ venait à remonter sur scène, l’avenir serait encore devant elle. « Elle a encore une grande marge de progression », estime Matthieu Soerjana.

DU MUSCLE, MAIS PAS SEULEMENT

Odile Tran Thu Hà concourt dans la catégorie « model physique », relativement peu axée sur la masse musculaire (à l’échelle du culturisme). « La beauté du corps est le principal critère de notation », dit le règlement de la World Bodybuilding and Physique Sports Federation (WBPF), invitant les juges à récompenser « l’équilibre, la grâce et la confiance en soi » plutôt que la définition musculaire et les veines apparentes.

 

L’EXEMPLE DE SON FRÈRE, MAURICE

Odile a commencé la musculation en 2018. « J’étais très fine, je voulais prendre un peu de poids. » L’année suivante, elle accompagne son frère, Maurice, qui disputait alors sa première compétition de bodybuilding
(il a remporté le titre champion de Calédonie en catégorie « Athletic physique » en 2020 et 2022). « Ils représentent tous les deux l’avenir du bodybuilding calédonien », estime Matthieu Soerjana.

 

Gilles Caprais