Chauffe sociale en perspective à Vavouto

Décidément, rien ne va plus à l’usine du Nord. Aux difficultés structurelles directement liées à la crise du nickel s’ajoutent les écueils techniques. Les coûts de production s’en ressentent et placent depuis plus d’un an le projet sur le fil du rasoir. Dernière conséquence en date, l’annonce d’un programme de restructuration qui prévoit des licenciements bruts et mobilise, à juste titre, les syndicats.

C’est peu dire que les réactions étaient attendues après la publication, le 21 septembre, d’une note de service signée Marc Boissonneault, le président de KNS, annonçant aux salariés la préparation d’un projet de réduction des effectifs. Cette information, rapidement confirmée, a notamment eu pour conséquence la convocation dans l’urgence d’un comité d’entreprise au cours duquel l’annonce d’une cinquantaine de licenciements économiques a été exposée.

Si le climat dans lequel s’est déroulée cette réunion de crise est resté courtois, l’inquiétude était pourtant bien présente tant ces annonces, malheureusement prévisibles, sont porteuses de menaces.Les syndicats, à commencer par le Soenc nickel, ont fait rapidement connaître leur position. Outre le fait qu’elles n’acceptent pas la manière « brutale » de KNS pour dévoiler son plan de restructuration, les organisations du personnel sont évidemment opposées aux licenciements secs. Chiffres à l’appui, elles indiquent, par exemple, que les licenciements envisagés représentent à peine 2 % de la masse salariale et qu’en conséquence, il doit bien exister d’autres solutions pour faire des économies.

C’est d’ailleurs la raison qui a prévalu à la mise en place de deux expertises, l’une qui sera conduite par la Secafi (leader du conseil auprès des comités d’entreprise : ndlr) sur la question du droit d’alerte, et la seconde, par le cabinet Syndex, dont on sait la proximité historique avec l’Usoenc, sur la problématique plus spécifique des licenciements économiques envisagés.

Réactions politiques

À ce stade, les syndicats reprochent pêle-mêle à KNS l’absence de concertation préalable dans l’élaboration du plan de licenciement et de recherches de solutions alternatives mais aussi l’opacité de l’entreprise dès lors qu’il s’agit de présenter des bilans ou des perspectives économiques et sociales.

Or, ces craintes sont d’autant plus justifiées que les mesures envisagées devraient conduire au non-renouvellement des contrats à durée déterminée et à la fin d’une grande part de la sous-traitance dont on sait fort bien qu’elle est l’une des caractéristiques principales de la réussite ou non du rééquilibrage induit par l’usine du Nord. Dans ces conditions, les organisations syndicales ne se contenteront pas d’être vigilantes, elles vont exiger, très vite, des réponses sous forme de solutions permettant d’éviter des pertes d’emploi.

Et sur ce terrain, les syndicats ont déjà reçu le soutien de poids de l’Union calédonienne. Le plus vieux parti calédonien, qui a fait de l’usine du Nord son combat depuis des dizaines d’années et qui vit évidemment douloureusement la mainmise hégémonique du Palika et de ses alliés sur cet outil éminemment politique, n’a pas attendu pour prendre position. Par la voix de son président, Daniel Goa, l’UC a, elle aussi, regretté le manque de transparence de l’industriel et demandé que les solutions trouvées privilégient l’emploi. À travers cette prise de position, c’est directement la province Nord de Paul Néaoutyine qui est pointée du doigt.

Pourtant, l’annonce de KNS repose à l’évidence sur une réalité économique. Dans le contexte actuel, l’usine de Vavouto et l’ensemble du montage économique qui la supporte constituent un puits sans fond pour les actionnaires, à commencer par Glencore.

C’est d’ailleurs, est-ce un hasard, dans les jours à venir que le géant anglo-suisse doit annoncer sa décision de poursuivre ou non l’aventure en Nouvelle-Calédonie. Il est fort peu probable que quelques licenciements, aussi douloureux soient-ils pour les ménages qui seront impactés, soient suffisants pour changer la donne.

C.V.