Cellocal et Sofaplast, un an après…

Il y a un an, un incendie criminel ravageait les 5 000 m2 du dock de Cellocal et Sofaplast au 4e km. 60 personnes travaillaient sur le site. Aujourd’hui, ces deux entreprises n’ont toujours pas redémarré leurs activités normalement et ne peuvent plus importer leurs produits pour pallier la demande du marché. Un droit à l’importation que le gouvernement n’a pas reconduit depuis fin novembre. Le point sur une situation qui pose « certaines questions ».

La nuit du 12 mars 2017, un gigantesque incendie détruisait, au 4e km, les entreprises Cellocal (bureaux et showroom) et Sofaplast (site de production et stock des produits finis), deux entreprises du groupe Lafleur, spécialisées dans la fabrication et la distribution de produits d’hygiène, de beauté, d’emballage et d’entretien. Devant l’étendue du sinistre, pour sauvegarder ses clients et son activité, la direction du groupe prenait les mesures nécessaires, seulement 48 heures après, pour replacer la majorité de son personnel, redémarrer son activité commerciale et sa distribution, en se délocalisant en grande partie sur le dock de Cocoge, à Païta, une autre entreprise du groupe Lafleur.

Mais avec un stock tampon de quinze de jours et un outil de production entièrement détruit par les flammes, le groupe a dû se tourner vers l’importation pour alimenter ses distributeurs. D’ailleurs, le gouvernement avait rapidement pris un arrêté, le 28 mars, « pour assurer la stabilité d’approvisionnement du marché calédonien en rouleaux de papier hygiénique (pour 5 millions), essuie-mains (276 000 rouleaux) serviettes (8 millions d’unités) et mouchoirs en papier (3,8 millions conditionnés en boîte). » Un arrêté valable trois mois.

Pendant ce temps, la police menait l’enquête et deux semaines après l’incendie, un jeune avouait les faits et était arrêté. Auditionné par la justice, il s’était ensuite rétracté sur ses propos, laissant le dossier sans suite. Concernant le site d’exploitation du 4e km, assurances passées, le nettoyage était engagé en août pour faire place nette, rien n’étant récupérable.

On aurait pu penser, mi-2017, que la situation était en bonne voie, que Sofaplast allait pouvoir s’occuper entièrement du plan de remise en route de sa production et que Cellocal allait distribuer normalement, bien au contraire !

Plus le choix dans les rayons

Un an après l’incendie, pourquoi les produits des ces deux entreprises ne sont plus en rayon ? C’est ce que bon nombre de consommateurs et de revendeurs se demandent depuis quelque temps comme Patrick, un commerçant de Magenta, où encore Laetitia, une habitante de port Moselle : « Nous ne trouvons plus notre papier hygiénique habituel dans les rayons. Il n’y a plus de choix. C’est comme les Kleenex. Mais on m’a dit que c’est normal, car il n’y a plus que la société Vega qui peut en produire ! » Des réflexions que l’on trouve également en boucle sur la toile et dans les discussions, certaines avançant des remarques sur la qualité des produits proposés et d’autres sur le manque de choix.

Mais si cette situation est résumée par ces propos, c’est bien ce qui fait l’actualité de l’approvisionnement du marché calédonien du papier hygiénique, des rouleaux et autres serviettes et mouchoirs en papier. Olivier Javelot, le directeur d’exploitation de Cellocal, s’en explique : « Sofaplast ne pouvant toujours pas produire localement faute de machines et, c’est normal, cela prend du temps, Cellocal, qui est son partenaire de distribution, ne peut plus, depuis la fin de l’année, en importer. »

Le gouvernement en cause

Effectivement, si l’entreprise Sofaplast, qui produisait les rouleaux de papier hygiénique, essuie-tout, etc, envisage un retour à la production pour le deuxième semestre de cette année (depuis un dock sur Païta et après un investissement sans aide d’accompagnement de relance d’activité d’1.7 milliards de Cfp comprenant l’aménagement, les achats- machines, mise en route, contrôles régularisés…), cette société ne peut plus distribuer ce type de produits, faute d’autorisation d’importation du gouvernement.

Alors blocage économique ou politique ? Chacun à sa propre explication.
Dans les faits, le premier arrêté du gouvernement de mars 2017, juste après l’incendie, stipulait « qu’il pourrait être prolongé par un nouvel arrêté au regard de l’évolution de la situation ». Un deuxième arrêté a donc suivi le 20 juin prolongeant « cette autorisation à titre exceptionnel et transitoire pour trois mois supplémentaires. »

Mais c’est ensuite que la situation a brusquement changé. Le gouvernement n’a pris son arrêté que le 24 octobre, soit un mois après la date prévue, laissant les sociétés Cellocal et Sofaplast dans l’impossibilité d’importer pendant cette période. Et comme si cela ne suffisait pas, ce nouvel arrêté d’octobre délivrait cette fois une « autorisation temporaire mensuelle d’un million de rouleaux de papier hygiénique » et l’ouvrait « à tous les importateurs. Des quotas individuels mensuels seront attribués par la direction régionale des douanes aux importateurs qui en feront la demande ». En d’autres termes, comme l’explique Claire Richard, la responsable exploitation de Cellocal, « nous nous sommes retrouvés à ne pouvoir importer que sur une période d’un mois, tout en partageant notre marché. Nous sommes passés de 1 650 000 rouleaux de papier à 588 000 en novembre. Et en plus, aucun rouleau depuis le début de l’année, puisque le gouvernement n’a pas prorogé son arrêté ! »

Le gouvernement reste sans réponse

Nous avons donc demandé au gouvernement de s’expliquer sur ce sujet de manière à connaître sa position, pour savoir pourquoi il avait, dans son arrêté, diminué les quantités et pourquoi il avait ouvert les quotas à tous les importateurs. Est-ce qu’une entreprise pouvait être favorisée sur ce marché ou, au contraire, une autre pénalisée ? Hormis la communication des arrêtés de 2017, aucun autre élément de réponse ne nous est pour l’heure parvenu.

Aujourd’hui, on s’aperçoit donc dans cette affaire que le gouvernement a donné un monopole de marché à la société Vega et que cette même société n’est pas en mesure de produire suffisamment pour satisfaire la demande calédonienne. On s’aperçoit également que cette société fabrique les mêmes produits avec des emballages différents, réduisant considérablement le choix du consommateur. À cela vient s’ajouter la demande de Sofaplast et Cellocal, mi-janvier, à la société Vega, de produire pour elles, afin d’arroser convenablement le marché, assumer la demande et surtout pour contribuer à sauvegarder leurs activités et leurs emplois. À ce jour, la société Vega n’a toujours pas donné de réponse.

Un élan de sympathie

Si les consommateurs et les distributeurs ont du mal à comprendre cette situation dont les explications trouvent leurs sources dans la position du gouvernement, la situation économique des sociétés Cellocal et Sofaplast est aujourd’hui diffcile. « Avec ce sinistre et ce qui se passe aujourd’hui, nous accumulons une perte importante de notre chiffre d’affaires, entre 30 et 35 % pour Cellocal et plus de 60% pour Sofaplast et sans compter les pertes indirectes. Nous avons dû nous mobiliser et pourtant nous avons dû réduire nos CDD et nos intérimaires, précise Olivier Javelot. Après le choc de l’incendie, nous avons observé une réelle solidarité au sein de nos équipes, une solidarité inter-entreprises. Nos clients nous ont soutenus et nous soutiennent encore, mais il faut que la situation se débloque, que l’orientation du gouvernement nous soutienne, sinon… »

En attendant un éventuel nouvel arrêté d’importation du gouvernement et, à moyen terme, une reprise de la production, Cellocal tient à préciser que depuis décembre, elle a ouvert un showroom au Plexus de Ducos pour présenter sa gamme de produits hygiéniques.

C.S