Avec Wanaham, les îles veulent se passer de Tontouta

Jeudi 27 octobre, la nouvelle aérogare de Lifou a été inaugurée en grande pompe. Le bâtiment de 1 520 mètres carrés n’a pas que l’avantage du neuf, la province des Îles et le gouvernement comptent bien en faire un hub régional pour développer le tourisme « à la hauteur des ambitions » des Loyauté.



La nouvelle aérogare de Lifou ouvre une porte vers le Pacifique. Les travaux financés par la Nouvelle-Calédonie (1,07 milliard) et l’État (625 millions) sont une aubaine pour la province des Îles qui rêve de tourisme international. L’infrastructure flambant neuve « sera en mesure de traiter des escales internationales ponctuelles », indique le gouvernement qui en a la gestion.

Deux rotations spéciales transportant une délégation d’officiels ont été organisées entre Lifou et le Vanuatu, lors de l’inauguration jeudi 27 octobre. Signe, disent les acteurs impliqués, d’une ouverture régionale qui devrait s’amorcer dès que possible. « Le vol charter a démontré l’engouement des voyageurs pour la destination », assure la province des Îles. Les équipements sont aux normes pour le faire.

300 000 passagers

pourront être accueillis par an dans l’aérogare de Lifou-Wanaham à l’horizon 2030. Le gouvernement prévoit une augmentation annuelle de la fréquentation de 3 à 4 %.

Le bâtiment, trois fois plus spacieux que le précédent, permet d’accueillir plus de voyageurs et plus de marchandises. La mise en place de nouvelles lignes régulières dépend de l’État qui détient les compétences de police et de douane aux frontières aériennes. Les discussions sont en cours pour conférer à l’aérogare de Wanaham son statut international. Le président de la collectivité, Jacques Lalié, était à Paris pour aborder le sujet. « L’ouverture des lignes avec Singapour multiplie les atterrissages à Tontouta, nous devons absolument avoir un aéroport de relais en cas de panne, explique l’élu. Les touristes pourraient aussi venir des autres pays, directement dans les îles. » 
BIENVENU SUR CE VOL OCEANIA
Les autorités locales comptent « ouvrir le champ des possibles ». Le Vanuatu, Fidji ou Wallis-et-Futuna pourraient, à l’avenir, être accessibles depuis Wanaham. Le projet Air Oceania, version internationale d’Air Loyauté, doit répondre à cette ambition. La province des Îles a participé à un appel d’offres pour relier Wallis-et-Futuna. « Nous pouvons ouvrir Air Loyauté à des partenaires pour lancer une dynamique océanienne. À Paris, j’ai rencontré des privés qui veulent s’investir », annonce Jacques Lalié.
La troisième province de Nouvelle-Calédonie compte pallier au double handicap de l’insularité. Les îliens pourront par exemple partir au Vanuatu, sans payer un vol intérieur Wanaham-Magenta, soit 25 000 francs en moyenne. En plus, les trois communes en profiteraient pour développer le secteur touristique, pilier de leur économie. Pour l’instant, Ouvéa, Lifou et Maré attirent majoritairement une clientèle locale. 40 % des touristes viennent néanmoins de l’étranger, croisiéristes compris.

750 tonnes

de fret sont attendues par an à l’aérogare de Lifou-Wanama vers 2030. Une hausse du fret d’environ 2 % par an a été anticipée par le gouvernement. La partie réservée aux marchandises doit être terminée en décembre 2023.
« Les îles ne doivent plus être une option pour les touristes », insiste la collectivité qui espère des retombées économiques nombreuses pour les différents prestataires. Le tourisme est une manne financière importante pour les trois communes. L’activité se décompose en 230 structures, regroupant 550 emplois, de l’hébergement aux visites guidées. « L’arrêt des croisières a chamboulé le tissu économique, explique la province des Îles. Des familles ont dû partir sur Nouméa pour rechercher un emploi ou se réorienter. »

TOUT RESTE À FAIRE

Le lent retour des paquebots, marqué par l’arrêt du Pacific Encounter de la compagnie P&O le 8 novembre, doit inverser la tendance. 12 touchers sont prévus d’ici la fin de l’année. La cadence devrait s’accélérer en 2023, avec la réouverture de Maré. À l’avenir, la collectivité mise aussi sur l’aérogare pour inciter l’installation de nouveaux investisseurs.  Des espaces réservés aux boutiques de souvenirs ou à la restauration sont en train d’être aménagés.
La province incite la jeunesse à se lancer en indépendant pour briser « l’étroitesse du marché du travail ». Elle imagine de nouveaux projets et métiers, tels que la préparation de plats locaux pour les compagnies régionales. « Compte tenu des opportunités qu’offre cette nouvelle infrastructure et les services restreints proposés, tout est à faire, estime la collectivité. Elle laisse libre cours à l’imagination pour répondre aux nouveaux besoins. » 
Brice Bacquet

Photos : L’infrastructure a été inaugurée fin octobre en présence de Louis Mapou, président du gouvernement, Gilbert Tyuiénon, en charge du Transport, les autorités locales et une délégation du Vanuatu. / CELCOM PIL

Wadra Bay, un hôtel 5 étoiles en 2023 à Lifou

La construction du complexe hôtelier a été ralentie par la crise sanitaire. Mais l’établissement de luxe devrait bien accueillir ses premiers clients en 2023, entre janvier et mars, cinq ans après la pose de la première pierre en décembre 2018. Le Wadra Bay, situé dans le sud de Lifou, sur la tribu de Mou, passe de 4 à 5 étoiles. Ce sera le quatrième hôtel de ce standing en Nouvelle-Calédonie, après les trois complexes de Nouméa, de l’île des Pins et de Bourail du groupe hotelier Mariott.
Jacques Lalié a profité de son séjour parisien pour signer un nouveau prêt de 600 millions de francs auprès de la Caisse des dépôts et consignations. La somme doit combler en partie la montée en gamme et l’augmentation du budget (plus un milliard environ). Le projet porté par la province des Îles, à travers sa société Sodil, est soutenu par la défiscalisation. Le groupe InterContinental, en charge depuis 2019 des hôtels du Paradis d’Ouvéa et de Drehu Village à Lifou, exploitera aussi le Wadra Bay.
Une quarantaine de bungalows et cinq villas seront répartis, selon le site de la marque d’hôtels de luxe, dans les 6 hectares de « forêt tropicale » et de « jardins luxuriants », parmi « les tortues, les eaux cristallines et la culture locale ».