Avant ou après le référendum : Avec qui pourrait bien discuter Philippe Gomès ?

Les Republicains (LR) party's Member of Parliament Claude Goasguen (C) and Union of Independent Democrats (UDI) party's MP Philippe Gomes (L) attend a session on June 28, 2017 at the National Assembly in Paris, one day after the inaugural session of the 15th legislature of the French Fifth Republic. / AFP PHOTO / Thomas SAMSON

Depuis deux ans, il assoit sa majorité gouvernementale sur les indépendantistes qu’il cajole et lesquels votent tous ses textes au Congrès. Depuis 24 mois, il se félicite des 80 % de convergences qui existent entre eux. Et quand viennent les élections, il les diabolise, les brocarde et les fustige de ne pas être aussi tricolores que lui… Louis Mapou et les siens l’ont mauvaise. Et déjà, il envisage de discuter des compétences régaliennes directement « avec l’État ». Mais alors, avec qui le député de la 2e espère-t-il encore négocier ?

Poissons rouges. – Philippe Gomès a un tropisme (il adore ce mot !) et pense que tous les électeurs ont la mémoire des poissons rouges. Que l’on peut leur dire blanc un jour et noir le lendemain ! Quand on voit les signataires de la plateforme, qu’il leur a dictée, on ne peut pas affirmer qu’il ait tort. Mais avec les indépendantistes les choses vont tout autrement : ils ont la mémoire, la gardent et se souviennent.

Les indépendantistes se sentent trahis. – Ils se souviennent, par exemple, que Germain doit son fauteuil de président du gouvernement au Palika, que tous les textes à tendance socialiste ont été inspirés et votés par leurs 25 élus du Congrès, sans quoi ils auraient été retoqués. En clair, les indépendantistes croyaient appartenir à une majorité gouvernementale, sinon politique et s’estiment trahis.

Mapou se dit choqué… – En témoignent les propos de Louis Mapou, entendus cette semaine sur toutes les ondes. Louis Mapou « choqué » d’entendre Philippe Gomès « rejeter en bloc les indépendantistes pour galvaniser ses troupes pendant la campagne électorale. Et ne rien dire de leur apport et de leur travail constructif au gouvernement comme au Congrès pendant toute la période écoulée… », regrette le candidat malheureux aux législatives dans la 2e circonscription. « Quand j’entends Philippe Gomès affirmer que les indépendantistes ne sont pas matures, je me demande dans quel monde on vit ? », ajoute-il.

… et menace. – « Cette plateforme des loyalistes a été conçue pour mieux discuter avec les indépendantistes, poursuit le leader de l’Uni. Je dis chiche ! Mais nous, ça fait trois ans que l’on attend que quelqu’un veuille bien discuter avec nous. Sauf que dans le même temps on s’offusque qu’un indépendantiste puisse un jour être élu à l’Assemblée nationale » : pas vraiment « fair-play », dit encore Louis Mapou. Qui ajoute, sur un ton qu’on ne lui connaissait pas : « Si on refuse de parler du transfert des compétences régaliennes. De quoi voulez-vous que l’on parle ! La souveraineté n’est pas détenue par les non-indépendantistes de Nouvelle- Calédonie. Mais par l’État ! » À ce compte-là, « C’est avec l’État que nous irons discuter, directement », menace-t-il.

Bataille d’influence. – Premier constat à la lecture des propos de Louis Mapou, on comprend que Philippe Gomès est disqualifié à ses yeux pour parler d’avenir. Qu’en est-il alors des autres signataires de la plateforme ? Sûrement que Pierre Frogier échappera à cette vindicte, pour des raisons historiques. Mais les autres ? Deuxième constat, et c’est un risque qu’il vaudrait mieux ne pas courir : les indépendantistes ont de bons réseaux à Paris pour entamer des discussions directement avec l’État. En squeezant la famille non indépendantiste de Calédonie : c’est bien le sens des propos de Louis Mapou ! Or, comme chacun s’accorde ici à souligner que, dans les nouveaux ministères Macron, il y a peu ou plus de « connaisseurs » du dossier calédonien… Les indépendantistes estiment certainement avoir une belle bataille d’influence à livrer. C’est tout ce qu’auront gagné les plateformistes !

M.Sp. ©AFP